Le Blues avant 1945

Développement de 3 styles ruraux

Ed AndrewsOn put donc constater le développement de 3 styles distincts de  Blues dans les zones rurales du  Sud et  de l’Est des États-Unis, entre les années 1880’s et les années 1920’s mais pendant plus de 40 ans, aucune trace n’en fut conservée dans quelque archive que ce soit ni dans les travaux de musicologues… qui ne firent aucune recherche dans ces régions.                                                                        

Quelques années après les enregistrements de Blues classique et suite aux déclarations des chanteuses selon lesquelles le Sud et l’Est regorgeaient de musiciens Noirs qui leur avaient servi de modèles, des équipes mobiles y furent envoyées par les grandes compagnies de disques et les premiers blues ruraux furent enregistrés par Sylvester Waever en 1923. Ironie du sort, c’étaient des instrumentaux, or le blues est par essence un style vocal. C’était donc un piètre début.

Mais l’année suivante, la firme Okeh enregistra :  Barrelhouse blues et Time ain’t gonna make me stay par Ed Andrews et ce furent les premiers Blues ruraux authentiques. Ils furent suivis par beaucoup d’autres dans chacune des 3 catégories : Mississippi Delta Blues, Texas Blues et East Coast Blues.

 

Mississippi Delta Blues

Son HouseRobertJohnsonCe style était pratiqué soit par un soliste chanteur-instrumentiste (guitare, harmonica, piano) soit par un duo (2 guitares ou guitare-harmonica…). C’était un blues poignant et dramatique où les rétentions africaines étaient importantes, le rythme était syncopé, lancinant avec des riffs répétitifs qui prédominaient sur la mélodie. Les paroles étaient des métaphores à double sens, les textes étaient ésotériques et il n’y avait pas à proprement parler d’histoire. C’étaient des images juxtaposées sans liaison systématique entre elles et le chanteur recherchait pour lui et pour ses auditeurs un état de transe. C’est pourquoi son chant était véhément, tendu avec des effets spéciaux comme en Afrique, les falsettos entre autres.

bottleneckCes musiciens inventèrent aussi le jeu bottleneck avec un goulot de bouteille ou un tube en verre ou en métal (et de nos jours en plastique) qui permettait, par glissement sur les cordes d’une guitare, d’obtenir des effets de glissandos assez spectaculaires.

Les grands maîtres du Delta Blues furent : le pionnier Charley Patton et ses émules, Tommy Johnson, Bukka White, Son House, Skip James, Robert Johnson... La liste est longue.

Patton Robert Johnson
Charley Patton
Tom Rushen Blues, 1929
(Youtube)
Robert Johnson
Me and the devil blues
(Youtube)

 

Texas Blues

Au Texas, le contexte esclavagiste fut très marqué jusqu’à la Guerre civile et ensuite la ségrégation raciale y fut stricte, voire féroce, c’est toujours vrai à notre époque, même si les Texans blancs s’en défendent.

TexasGirlsBlindLemonJeffersonLes bluesmen du Mississippi durent s’ouvrir aux influences hispano-mexicaines et c’est là qu’un style pianistique a pu se développer avec succès. Les musiciens pratiquèrent un canevas de basses appuyées avec floraison d’arpèges et leurs chants furent des histoires logiques et continues souvent humoristiques, malgré le contexte social qui leur était défavorable. En fait ce fut l’application du  «I’m  laughin to keep from crying», le rire pour ne pas pleurer, allant de pair avec une auto-dérision féroce. Ainsi le plus célèbre représentant de ce style, le guitariste Blind Lemon Jefferson chanta dans Matchbox blues que tout ce qu’il possédait pouvait tenir dans une simple boite d’allumettes…

D’autres Texans noirs se distinguèrent dans ce style et vendirent beaucoup de disques comme le chanteur Texas Alexander, le guitariste Huddie Leadbelly Ledbetter, le pianiste Henry Thomas, etc.

Blind Lemon Jefferson
Blind Lemon Jefferson
Matchbox blues (Youtube)

 

East Coast Blues

Les musiciens du Mississippi furent ici soumis à l’influence de musiciens blancs de musique country. La guitare fut l’instrument de prédilection et l’accent fut mis sur la virtuosité, le jeu était faussement nonchalant et décontracté et les paroles racontaient souvent de banales histoires sentimentales, essentiellement des amours déçues, c’est le jeu qui comptait, pas ce qu’on chantait.

Blind Willie McTell - Libray of Congress JoshWhite -photoWGottlieb LonnieJohnson -photo Russell Lee

Blind Willie McTell ©Library of Congress - Josh White ©William Gottlieb - Lonnie Johnson (à g) ©Russell Lee
 

Beaucoup de guitaristes d’exception se firent connaître comme Blind Blake, Blind Willie Mc tell, Josh White, Blind Boy Fuller, Lonnie Johnson. À noter un duo : Sonny Terry (harmonica) et Brownie McGhee (guitare), etc.

 

BlindWillie Terry et Mc Ghee
Blind Willie McTell
Statesboro blues
 
(Youtube)
Sonnie Terry & Brownie McGhee
Two more songs
(Youtube)

 

 

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