Portait de Pierre Duculot
Pierre Duculot1

Professeur, journaliste, festivalier aux nombreuses casquettes, secrétaire général à Wallonie Image Production et réalisateur de courts métrages, Pierre Duculot fait partie depuis une vingtaine d'années environ du paysage cinématographique belge, et ce à tous les échelons. S'il est aujourd'hui sur le devant de la scène, c'est parce que son premier long métrage Au cul du loup, dont l'avant-première aura lieu ce 23 janvier au Sauvenière en sa présence, arrive sur les écrans. L'occasion de revenir sur le parcours aussi riche qu'étonnant de cet ancien étudiant de l'ULg.

Pierre Duculot est né en 1964 à Liège. S'il passe son enfance à Jupille-sur-Meuse, il migre très vite dans le centre de la Cité Ardente pour poursuivre des études à la faculté de philosophie et lettres. « Je ne me posais pas la question  du choix de l'université, puisqu'il y a toutes les facs à Liège. Donc quand tu y vis, tu y restes. J'ai fait la philologie romane au début parce que j'avais dans l'optique de faire  une licence en communication, mais il  fallait d'abord deux ans de candidature dans une autre filière» explique Pierre. « Finalement, j'ai été au bout de ces études, tout en participant au théâtre universitaire avec Robert Germay, qui était une figure marquante pour les gens de théâtre et de cinéma de la région de cette époque. Après les romanes, comme j'étais encore jeune, j'ai fait la commu, pour faire plus de théâtre que de cinéma d'ailleurs, même si j'aimais le ciné-club qu'animait Philippe Dubois à l'époque. » L'université, le cinéaste l'a longuement et largement côtoyée : « deux licences, deux agrégations aussi, et j'étais membre du théâtre universitaire pendant des années encore après mes études, en tout cas comme administrateur de l'ASBL, jusque mes 28-29 ans. » Et s'il part rapidement enseigner dans la région de Charleroi, ce n'est pas totalement un hasard. « J'ai eu ma place à Charleroi grâce à l'université de Liège : Marc Mélon enseignait là-bas et voulait revenir à Liège pour faire une thèse, moi j'étais inscrit comme élève « thésard » auprès de Robert Germay pour un hypothétique doctorat sur « Les adaptions de cinéma au théâtre ». Je n'ai jamais écrit une seule ligne car j'ai très vite compris que je n'avais pas le profil d'un chercheur universitaire.  Nous étions donc intéressés, Marc et moi, d'échanger nos places . »

Très vite le jeune diplômé se trouve un peu malgré lui embarqué dans le monde du cinéma. « Il y avait un concours, pour être jury jeune — ou jury européen je ne sais plus – à Cannes, et je l'ai remporté. Là-bas j'ai rencontré des journalistes belges qui m'ont demandé si j'aimais écrire, et je suis devenu journaliste cinéma complémentaire, d'abord à la Revue du cinéma belge. J'ai ensuite rencontré André Ceuterick qui m'a amené à faire les catalogues pour les festivals de cinéma de Namur puis de Mons. » En quelques années et surtout quelques rencontres, Pierre Duculot devient une sorte de Monsieur Cinéma visible un peu partout : presse écrite, radio, télévision. Son secret ? Multiplier les contacts, s'investir pleinement et oser aller vers l'inconnu. Pierre est un voyageur (il a visité plus de 50 pays) mais surtout un ami fidèle : une fois en place, il n'abandonne jamais les copains, ce qui lui vaut une bonne réputation dans ce milieu où les relations humaines sont souvent fragiles.

Fin des années 90, il aide Véronique Cratzborn, ancienne étudiante de l'ULg également, qui travaille à l'époque chez Arena Films (société produisant entre autres les films d'Alain Resnais), à écrire et produire son film F(r)ictions. Il l'aidera ensuite pour la régie de Lavomatic, un épisode de la série Vivre ensemble demain diffusé sur France 2 et France 3. « De là est venue une passion pour l'écriture. Je me suis mis à faire des scénarios. Pour moi, car je ne savais pas où les déposer, je les faisais lire à des amis réalisateurs mais ils avaient leurs propres scripts. Alors, est arrivé un concours de scénarios pour le festival du court métrage de Bruxelles. J'y ai participé deux fois, je n'ai jamais gagné mais, la deuxième année, j'ai retenu l'attention d'un des membres du jury et suis resté en contact avec lui. C'est comme ça que je lui ai remis le scénario de Dormir au chaud, mon premier court métrage. Et comme personne ne voulait réaliser mes films, j'ai décidé de les réaliser moi-même ! Je n'y connaissais rien, mais je venais d'avoir 40 ans et je me disais que si je ne le faisais pas tout de suite je ne le ferais jamais. » Malgré un tournage placé sous le signe de la malchance et, comme le dit le réalisateur lui-même, du presque amateurisme, le court métrage est remarqué et Pierre Duculot réalise un deuxième court intitulé Dernier voyage dans la foulée. Suite logique : un long métrage entre en chantier assez rapidement.

Quand on lui demande si sortir d'une université plutôt que d'une école de cinéma peut porter préjudice, Pierre Duculot tempère : « les frères Dardenne ne sont pas sortis d'une école de cinéma, Thierry Michel en est sorti au bout d'un an, Micha Wald est sorti de filière scénario mais pas de réalisation, Nabil Ben Yadir n'a fait strictement aucune école, ni Abel et Gordon, ni Bouli Lanners, et on peut continuer cette liste ! » La meilleure manière, c'est de faire. « Et pas seulement le court métrage : prenez votre caméra et sortez dans la rue filmer des gens ! Il faut voir beaucoup de films aussi : beaucoup de scénaristes viennent parfois avec une idée qu'ils pensent originale, mais on se rend vite compte que ce n'est pas le cas... »

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