L’Université de Liège pendant la guerre 1914-1918

Dès les premiers jours de la guerre, les bâtiments de l'Université sont occupés par les soldats Allemands, qui font bien peu de cas des bâtiments et de leur contenu. L'Université aura à subir de nombreuses pertes humaines et matérielles. Une plaque commémorative du massacre du 20 août, apposée sur sa façade, et un monument à la mémoire des étudiants et du personnel morts à la guerre perpétuent le souvenir de ces années tragiques.

placedelUniversite

Place de l'Université, avant 1914. Sur la droite, on voit à gauche, l'Université et à droite, l'ancien bâtiment de l'Émulation

 

La ville de Liège eut l’« insigne honneur » de figurer au premier rang des cités meurtries par la violence des combats du mois d’août 1914. Liège fut aussi la première ville universitaire à souffrir directement des dommages occasionnés par le passage des troupes ennemies. Le Grand État-major allemand avait programmé de s’emparer au plus vite de la Cité ardente par un coup de main. Mais le plan du général Helmuth von Moltke ne rencontra pas immédiatement le succès escompté. Au matin du 6 août, à l’exception de la 14e brigade esseulée sur les hauteurs de Jupille-Bressoux, aucune des cinq autres brigades allemandes chargées de pénétrer au cœur de Liège n’avait réussi sa mission. Afin de faire plier rapidement les autorités civiles et militaires belges, l’artillerie allemande bombarda la ville pendant toute la journée et une partie de la nuit. Au total, le bombardement ravagea une centaine d’immeubles et en abîma cinq cents autres, dont la Cathédrale, l’Académie des Beaux-Arts et le bâtiment central de l’Université de Liège. Constatant que le gouverneur de la Position fortifiée de Liège, le général Leman, refusait de céder au chantage, le général von Emmich se résolut dès le 7 août à faire entrer ses troupes dans l’agglomération pour y disposer ses pièces d’artillerie. Il s’agissait de faciliter le bombardement systématique des forts. La plupart des soldats allemands s’installèrent à la Chartreuse, à la Citadelle et dans les bâtiments publics comme le Palais provincial, les écoles primaires, les théâtres et l’Université. Le bâtiment central de la place de l’Université fut rapidement occupé. Le conservateur du matériel Paul Damry fut sommé par les nouveaux occupants de leur faire faire « le tour du propriétaire ». Les caves furent spécialement visitées, à la recherche d’hypothétiques francs-tireurs ou de caches d’armes.

Au lendemain de la chute des derniers forts liégeois (16 août 1914), de nouveaux régiments de soldats traversèrent Liège. L’un d’entre eux, le 39e régiment de réserve, fut logé à l’Université et dans d’autres immeubles de la place dont les locaux de l’Émulation qui abritent aujourd’hui le théâtre de Liège. Il fut aussi dispersé dans les rues avoisinantes, notamment dans l’hôtel du Baron d’Otreppe de Boncelles situé rue des Carmes et dans les écoles communales de la rue des Croisiers. Les caves des maisons bourgeoises du quartier furent promptement visitées, non plus pour y débusquer les mythiques francs-tireurs belges, mais afin d’y piller les bouteilles de vin qui y étaient entreposées. Le 19 et surtout le 20 au soir, la plupart des soldats allemands étaient complètement ivres.

Dans la soirée du 20 août, pour une raison difficile à saisir – mais l’alcool ne permet-il pas d’expliquer beaucoup de choses – on pense qu’un soldat allemand tira un ou deux coups de fusil d’une fenêtre du premier étage de l’Émulation dans la direction de l’Université. Le coup de feu fut immédiatement suivi d’une fusillade générale sur la place. Plus ou moins au même moment, un grand feu fut allumé par les soldats allemands dans les locaux de l’Émulation avec du mobilier brisé à coups de haches. À la recherche de francs-tireurs belges, on enfonça les portes des maisons des places de l’Université et Cockerill et l’on donna l’ordre aux femmes et aux enfants de sortir. Seize hommes, parmi lesquels cinq espagnols, furent conduits au pied de la statue André Dumont et fusillés les uns après les autres sans la moindre enquête. Un seul d’entre eux échappa miraculeusement au massacre. Les soldats allemands mirent aussi le feu aux rez-de-chaussée de plusieurs maisons « suspectes ». Seize immeubles de la place de l’Université –  rebaptisée après la guerre place du 20-Août – et trois de la place Cockerill furent complètement réduits en cendres. Deux femmes qui s’étaient réfugiées dans une cave, Marie Lecrenier et Jeanne Dumonceau, périrent dans les flammes.

21aout14
Soldats allemands posant devant les ruines de l'Émulation, place de l'Université, le lendemaine de l'incendie.

 

Page : 1 2 3 suivante