René Hausman, illustrateur, peintre et sculpteur belge, créateur des « Chasseurs de l'Aube » et Dominique Bonjean, archéologue, chef de service à Scladina, détaillent leur rencontre dans le cadre de l'exposition « Hausman à Scladina ».
Comment l'envie de travailler avec René Hausman vous est-elle venue ?
Dominique Bonjean : C'est au départ une envie plutôt personnelle : René Hausman habite Verviers, tout comme moi. Il y a très longtemps que je le connais. Ma première rencontre avec lui a eu lieu lorsqu'il réalisait l'affiche de la pièce « Le Malade Imaginaire », mise en scène par la troupe amateur dans laquelle je jouais. Mais l'élément déclencheur fut sans aucun doute la découverte de la BD des « Chasseurs de l'Aube ». Mes deux collègues, Kévin Di Modica (qui connaissait déjà le travail de Hausman) et Grégory Abrams, ont lu la BD également et nous avons été tous les trois charmés par cette œuvre.

Qu'est-ce qui vous a plu dans la démarche entreprise par Dominique Bonjean à Scladina ?
René Hausman : Dominique Bonjean connaissait l'œuvre « Les Chasseurs de l'Aube » et trouvait que je n'y avais pas raconté de choses trop farfelues (je m'étais tout de même documenté au préalable). Lors de notre rencontre, nous avons trouvé des similitudes dans nos intérêts et c'est donc ce qui a entamé notre collaboration. De plus, la Préhistoire est une période qui m'a toujours fasciné. « La Guerre du Feu » de Rosny-Aîné fut d'ailleurs mon livre de chevet pendant toute mon enfance et ma jeunesse : je l'ai lu et relu. « Le Livre de la Jungle » de Rudyard Kipling m'a également accompagné pendant très longtemps.
Comment avez-vous convaincu René Hausman de prendre part à cette expérience ?
Dominique Bonjean : J'étais déjà en contact avec lui car je lui avais commandé deux dessins pour le musée de Spy. Lorsque la ville d'Andenne nous a proposé de prendre part à l'Année 2009 de la Bande dessinée, j'ai presque immédiatement pensé à lui. Je lui ai donc envoyé un mail pour lui proposer de monter une exposition avec lui et cinq jours plus tard, il est arrivé à Sclayn pour visiter la grotte Scladina. C'est après cette visite qu'il a donné son accord. Mais il avait déjà mordu à l'hameçon auparavant car la liste des quinze planches devant figurer dans l'exposition était déjà prête lors son arrivée à Sclayn.
Quel est votre regard de scientifique sur le travail de René Hausman ?
Dominique Bonjean : Raconter le Paléolithique ancien est quelque chose de très difficile : nous n'avons finalement que très peu de témoins archéologiques de cette période. De plus, l'Homme de Neandertal devait probablement utiliser beaucoup d'éléments végétaux pour s'armer, s'abriter, peut-être même pour se vêtir. Or ces végétaux ne laissent aucune trace archéologique. René Hausman a donc dû se laisser guider par son pinceau. Toutefois, force est de constater que ses représentations de la faune et la flore de l'époque sont plus que vraisemblables.

À quels ouvrages vous êtes-vous référé pour réaliser « Les Chasseurs de l'Aube » ?
René Hausman : Il y a évidemment eu beaucoup de livres qui m'ont été utiles et si je devais les citer ici, j'en oublierais sans doute. Mais je me suis également beaucoup inspiré d'un peintre que j'ai eu le bonheur de rencontrer à Prague, Zdenek Burian. C'était un artiste spécialiste de la Préhistoire au sens très large : il peignait tout aussi bien les dinosaures que les hommes de Neandertal, les chasseurs du Paléolithique ou les animaux de l'époque. Notre rencontre a encore confirmé mon goût pour la Préhistoire.
Aujourd'hui, votre vision de la Préhistoire a-t-elle changé par rapport au moment où vous avez réalisé « Les Chasseurs de l'Aube » ?
René Hausman : Non, je ne pense pas. Je crois que je procéderais de la même manière aujourd'hui. J'ai eu le bonheur d'avoir l'approbation de personnes beaucoup plus qualifiées, telles que Dominique Bonjean à Sclayn et Fernand Collin à Ramioul. Ils considèrent mes histoires comme plausibles, donc je pense pouvoir me permettre de continuer sur la même voie. Bien entendu, une œuvre comme « Les Chasseurs de l'Aube » n'est pas comparable à d'autres choses plus « fantaisistes », comme « Saki et Zunie ».