
À Amboise, au Château du Clos Lucé, dernière demeure de Léonard de Vinci, une exposition historique et artistique est consacrée au séjour en France du peintre de « La Joconde ». Réunissant de nombreux objets, documents, facsimilés et dessins originaux, elle saisit toute l'attention portée à Léonard de Vinci par le roi François Ier. Laure Fagnart, spécialiste de l'œuvre de Léonard de Vinci, chargée de recherches FNRS au service d'Histoire de l'Art et Archéologie des Temps modernes de l'ULg, est la commissaire scientifique de cette exposition.
Un matin d'été, chaudement ensoleillé, en bord de Loire. De nombreux cyclotouristes empruntent un itinéraire joliment balisé le long du fleuve. Les caves à vins ont portes ouvertes, et donnent d'autres repères, tout aussi plaisants, à une promenade tant historique qu'architecturale : Chambord, Chenonceau, Blois, Cheverny, Valençay, quelques grands crus du patrimoine français. Direction Amboise, et plus précisément le Clos-Lucé.
Le Château du Clos Lucé accueillit en effet les dernières années de Léonard de Vinci, qui y mourut en 1519. L'illustre personnage avait été invité à résider en France par François Ier, alors jeune monarque de vingt ans, qui en 1515, par sa victoire militaire à Marignan, venait d'emporter le Milanais. S'étant rendu à Bologne pour y signer un concordat avec le pape Léon X, François Ier n'ignorait rien de l'envergure et de l'aura artistique dont jouissait Léonard. Un an plus tard, à la mort de son protecteur Julien de Médicis, frère du pape, le peintre, alors âgé de 64 ans, répondait favorablement à l'invitation royale. Ce n'était pas, du reste, le premier contact de Léonard avec un souverain de France, et c'est ce qui explique en partie sa décision.
Le voyage de Léonard à l'automne 1516 ne se fit pas sans bagages, comme l'explique Laure Fagnart, chargée de recherches FNRS au Service d'Histoire de l'art et Archéologie de l'ULg. « Des documents attestent que Léonard est accompagné de plusieurs personnes, notamment de son disciple, Francesco Melzi, et de son serviteur milanais, Battista de Villanis. Mais surtout, Léonard amène avec lui, dans des sacoches de cuir, les peintures de « La Joconde », du « Saint-Jean-Baptiste », et de la « Sainte-Anne ». C'est ainsi qu'elles arrivent en France, à dos de mulets, dans un périple à travers les Alpes qui mènera les voyageurs jusqu'au Clos Lucé. »
Cette demeure royale à Amboise, qui s'appelait alors le château de Cloux, avait été mise autrefois à disposition de Louise de Savoie, la mère de François Ier et de Marguerite de Navarre. Les deux enfants y avaient joué dans le parc.
Marguerite s'y installera quelques années plus tard et y écrira « L'Heptaméron », inspiré du fameux « Décaméron » de Boccace. Erudite et amateur d'art, Marguerite s'entoure d'une cour où l'on trouve notamment Clément Marot et d'autres esprits brillants de la Renaissance française. Mais en 1516, c'est Léonard qui vient s'installer au Clos-Lucé, avec son entourage personnel, élèves et domestiques. Propriété de la famille Saint Bris depuis la seconde moitié du XIXe siècle, tout le domaine est aujourd'hui dédié à la mémoire de Léonard. Dans le parc ombragé, des canaux et ruisseaux, un magnifique jardin aquatique où l'on retrouve les plantes qu'il dessina. Plus loin, quelques reconstitutions, en taille réelle ou en maquettes, de certaines de ses inventions, comme un pont suspendu ou un ancêtre du char d'assaut. Et, durant plusieurs mois, une exposition réunissant les contributions historiques de spécialistes de Léonard de Vinci, sous la direction du plus renommé d'entre eux, le Professeur Carlo Pedretti, de l'Université de Los Angeles.