La revue XXI
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La revue XXI vient de souffler sa troisième bougie, et le succès – immense – est toujours au rendez-vous. Fruit de l'ouvrage de grands reporters assoiffés d'air du large et de récits au long cours, frustrés sans doute par une pratique professionnelle en crise, XXI a tout d'une grande. 

XXI, c'est du fond. Répondant à l'injonction de son rédacteur en chef, Patrice de Saint-Exupéry, elle propose au lecteur "du réel, du réel, du réel". Elle donne à voir des tranches de vie, du quotidien, de l'exotique, de l'ailleurs et pourtant si proche. Elle crée des ponts, tisse des liens entre le tenancier d'un motel de fortune au Pakistan, le Routard Inn, les sinistrés d'essais nucléaires sur les îles Marshall, les bonnes soeurs en fuite dans le Sud-Ouest de la France, ou encore l'avocat à la trempe d'acier de Lagos, qui lutte contre d'implacables promoteurs immobiliers. XXI nous raconte toutes ces histoires, chaque trimestre, dans un grand souffle de nouveauté, au travers de récits épiques ou misérables, parfois les deux. La plume vagabonde de Jonathan Littell s'y est égarée, dans le dernier numéro. 

Et puis, XXI, c'est une incroyable qualité de forme ; c'est le parti pris d'un modèle graphique jamais expérimenté jusque là. La revue est abondamment illustrée des oeuvres de jeunes artistes – collages, peintures, etc. – le tout avec une esthétique jamais prise en défaut. Elle rejette le parti pris de la photographie, celui de l'image choc dont on nous assomme ad nauseum et qui se substitue si aisément au propos de fond. D'ailleurs, chaque numéro est ponctué d'une bande dessinée. XXI renouvelle le plaisir de l'achat fébrile, de la longue contemplation avant l'ouverture, enfin, et puis cette odeur inimitable du livre neuf

Enfin, XXI ose le pari d'un modèle économique totalement inédit dans un paysage de l'édition en plein naufrage. Ses recettes reposent exclusivement sur ses lecteurs, ce qui permet le luxe rare d'une respiration à pleins poumons d'un papier non-vicié, totalement exempt de pollutions publicitaires. Quant à sa distribution, elle passe de manière privilégiée par un réseau de libraires indépendantes. Prenez le pari de mettre la revue, après l'avoir dévorée, dans les mains de quiconque ; l'addiction est immédiate et garantie. 

François Thoreau
Juin 2011

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