La Chine, laboratoire de l'évolution humaine

Sur les traces du yéti...

Plusieurs types de primates anthropomorphes ont été découverts sur le territoire de l'Asie orientale. Tout comme certains primates fossiles africains sont probablement à l'origine du genre Homo et des grands singes (chimpanzés, gorilles), le Lufengensis de Chine semble être le point de départ des branches humaines ou simiesques (notamment des orang-outans) d'Asie. Loin d'être unique en son genre, le Lufengensis, qui vivait il y a quelque 14 millions d'années, fait partie d'une large famille de primates anthropomorphes. Celle-ci comprend notamment les Ramapithèques et les Sivapithèques indiens et pakistanais. Tous possèdent les caractéristiques d'hominidés archaïques : un prognathisme très marqué et une mâchoire inférieure arquée en « V ».

7.Gigantopithèque-molaire
Molaire d'un Gigantopithèque © Forschungsinstitut Senckenberg

L'une de ces espèces fossiles pourrait également être à l'origine d'un mythe encore largement véhiculé de nos jours. Une créature de haute taille, velue et au visage mi-homme, mi-singe, laissant d'impressionnantes traces de pas dans les montagnes de l'Himalaya... La légende du yéti serait fondée sur l'existence d'une autre espèce de primate fossile. Disparue il y a 3 millions d'années et nommée Gigantopithèque, en raison de sa haute taille (environ 3 mètres), il pourrait, au même titre que le Lufengensis et ses variantes, être à l'origine des Homo erectus d'Asie. Mais il serait aussi à l'origine de grands primates bipèdes, une espèce aujourd'hui éteinte, sauf dans l'imaginaire collectif : le yéti de Tintin au Tibet.

L'Homo erectus et les plus anciennes traces humaines

Les premières roches taillées d'Asie ont été exhumées sur le site de Dongyaozitou (nord-est de la Chine) : elles proviennent de dépôts datés de 3 millions d'années, ce qui les rendrait antérieurs aux premiers artefacts africains, réalisés par les Australopithèques il y a environ 2,5 millions d'années. D'autres outils en roche, vieux de 2,5 à 1,8 millions d'années, ont également été découverts sur divers sites chinois, parfois associés à des restes humains comme à Longgupo et Longgudong. Les dates obtenues restent cependant relativement incertaines.

8.Carte
Carte de l'Asie orientale. Infographie : É. Delaunois

D'autres sites (Yuanmou, Lantian...) ont livré des vestiges dont la chronologie est attestée avec beaucoup plus de certitude, mais qui sont légèrement plus récents (les plus anciens sont datés de 2 millions d'années). Ces vestiges sont ceux des premiers représentants du genre Homo en Asie, Homo erectus. Ceux-ci ont constitué une vaste population aux caractères morphologiques diversifiés, et tout à fait propres au continent asiatique. Les Homo erectus ont lentement évolué vers des formes de plus en plus graciles et à la capacité crânienne accrue, pour aboutir, aux alentours de 200 000 ans, à une anatomie tout à fait moderne, typique des Homo sapiens.

9.Homo erectus
Homo erectus, Museum of Natural History, Ann Arbor, Michigan. Licence Creative Commons

En complément de ces vestiges paléoanthropologiques, de nombreuses roches taillées ont été retrouvées. Si l'on considère globalement les industries lithiques produites par les Homo erectus, deux traditions techniques ont coexisté pendant quelques centaines de millénaires en Chine et en Corée. Avec la première, l'homme cherche à obtenir des éclats tranchants, qui pourront être ensuite retouchés en outils. Le concept qui sous-tend la seconde tradition est fondamentalement différent : des galets récoltés le plus souvent en bord de fleuve vont être aménagés en outils par des retouches le long des bords actifs. Quelques-uns de ces galets aménagés ont suscité l'émoi parmi la communauté scientifique en raison de leur ressemblance avec les bifaces africains et européens. Cependant, les concepts de fabrication sont ici totalement autres. Aujourd'hui, certains scientifiques ne peuvent y voir l'influence lointaine du continent africain sur l'Extrême-Orient.

10.Outils sur éclats

 

Outillage sur éclats : pointes (2,3) et racloirs (1,4). D'après Hou, 2008

 

12.pseudo-bifaces
Les pseudo-bifaces chinois. D'après Xie et Bodin, 2007 

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