Le festival "Images Sonores" célèbre l'ouverture aux autres musiques

Du 19 au 21 novembre aura lieu le 12e festival de musique électronique live Images Sonores. Cette année particulièrement, le festival est marqué par l'ouverture et propose des artistes influencés et intéressés tant par les musiques populaires — notamment le jazz et le rock — que par la musique mixte. Un rendez-vous à ne pas manquer.

Pousseur

Images Sonores, le festival de musique électronique live revient pour la 12e fois. Il se déroulera du 19 au 21 novembre à l'ancienne église Saint-André, à Liège (en soirée, à partir de 20h30). Ce festival est organisé par le fraichement renommé Centre Henri Pousseur, fondé en 1970 par Henri Pousseur lui-même, et jusqu'il y a peu appelé le Centre de Recherches et de Formations Musicales de Wallonie, ou CRFMW. Une belle occasion de fêter les 40 ans de l'institution, qui occupe un rôle important dans la pédagogie, dans l'aide à la production et dans la promotion de la musique électronique et de la musique mixte depuis les années 1970.

Henri Pousseur © Maxime Godard 

Cette musique, que l'on ne joue pas fréquemment, peut paraître peu accessible. Elle l'est pourtant à bien des égards et traduit les expériences de vie des artistes à travers leur musique et l'expérimentation du son. Il existe d'ailleurs des liens très étroits entre la musique mixte proposée par les compositeurs classiques et la musique électro qui s'intègre ostensiblement dans l'ensemble des musiques populaires. Mais beaucoup construisent une frontière fictive entre les genres, frontière qui ne profite pas à la musique contemporaine (lire et écouter à ce sujet À la frontière des genres). « Pourtant tant les musiques dites plus élitistes que les musiques populaires puisent dans les répertoires de l'une et de l'autre, explique Marie-Isabelle Collart, secrétaire générale du Centre Henri Pousseur. Et ce n'est pas nouveau. Beethoven, déjà, s'inspirait des Länder, des danses populaires allemandes, qu'il développait ensuite dans les mouvements de ses œuvres symphoniques. Et beaucoup de compositeurs d'aujourd'hui, en particulier les plus jeunes, conservent des liens étroits avec les genres musicaux qui les construisent.  Par exemple, Gilles Doneux, qui a reçu le prix Henri Pousseur 2009, et qui présentera Second Life Symphony, la pièce commandée par le Centre pour le festival, vient du milieu du rock et continue d'y jouer dans un groupe. Claude Ledoux, dont une création commandée par le Centre figure elle aussi au récital d'Arne Deforce et qui enseigne l'analyse musicale au Conservatoire de Paris et la composition à celui de Mons, a composé, voici deux, trois ans, une œuvre pour guitare électrique, qui a été créée au festival Ars Musica."  

Trois soirées pour un programme varié

Le festival Images Sonores défend donc depuis 12 ans cette musique trop peu connue du grand public. Il est constitué cette année encore d'une affiche alléchante. Variée, elle propose des œuvres d'étudiants du conservatoire, des œuvres créées au Centre Henri Pousseur et des œuvres issues du répertoire international des musiques mixtes. L'affiche sera composée de trois soirées à thème.

ledoux

La première soirée, « Multi-Violoncelle », proposera quatre œuvres faisant la part belle au violoncelle magistral de l'Ostendais Arne Deforce. La soirée se clôturera sur L'Aube assaillie, une œuvre pour violoncelle et installation électronique du jeune compositeur catalan Hèctor Parra, compositeur qui jouit déjà d'un grand succès sur la scène internationale et qui sera joué pour la toute première fois à Liège. Auront avant cela été proposées, outre la création du Prix Pousseur attribué à Gilles Doneux, deux œuvres issues de bourses du Centre Henri Pousseur ainsi que du prix Henri Pousseur 2009. La première est Timeless echoes de Kee Yong Chong (sino-malaisien ayant étudié en Belgique). « Cet artiste a reçu énormément de prix, et c'est légitime, commente Marie-Isabelle Collart. Sa musique est très raffinée et est le fruit d'une recherche méticuleuse sur le timbre. Elle est à la fois très belle et très intéressante en ce sens qu'elle établit un dialogue sensible entre sa culture d'origine et les idiomes contemporains occidentaux. Dans le cadre du festival, Kee Yong Chong voulait travailler avec Sigrid Tanghe, une artiste gantoise qui projetera sur écran des improvisations picturales sur l'œuvre pour violoncelle et installation électronique ». La seconde, Au bout du vide, l'ombre de Claude Ledoux,  sera une ébauche, où n'interviendront que le violoncelle et l'électronique, d'un vaste projet, qu'il n'a pu achever dans les temps ayant eu un sérieux problème de vue. Il associera la viodéographie à l'instrument et à l'informatique musicale. Pour assurer à la soirée une durée normale, le festival proposera Black Rock Unfolding, une œuvre de Luc Brewaeys, compositeur très présent à Bruxelles, en Flandre et à l'étranger, mais qui sera ainsi joué pour la toute première fois en Wallonie.

Photo Claude Ledoux © Pierre Rasidic

« Portraits en Regard » est le thème de la deuxième soirée. Elle s'intéresse à deux compositeurs de deux générations et de deux régions différentes, mais avec des univers qui, tout en étant personnels, se rapprochent. Le premier, qui a tout juste 50 ans, est le francophone Jean-Luc Fafchamps, qui joue également du jazz, du rock, et qui accompagne beaucoup de chanteurs et est l'un des deux pianistes de l'ensemble Ictus. « Réaliser son portrait est une envie que je trainais depuis longtemps », explique la secrétaire générale du Centre. Trois de ses œuvres seront jouées : Street Music, pour alto électrifié, Lettre Soufie : Z1, pour alto, piano et installation électronique, et Lettre Soufie : Z3 (Dhâl), pour trombone et installation électronique. « Ce qui est particulièrement réjouissant, explique la secrétaire générale, c'est que ces œuvres ont été écrites pour des musiciens qui les interpréteront. Street Music a été écrite pour Vincent Royer et Lettres Soufies : Z1 pour Vincent Royer et Jean-Philippe Collard-Neven et Z3 pour Alain Pire ». Le second compositeur de la soirée, qui a juste 30 ans, est le néerlandophone Stefan Prins. « Quand l'idée de réaliser un portrait croisé a germé, nous avons assez rapidement pensé à lui, développe Marie-Isabelle Collart. Il a lui-même choisi les œuvres qu'il allait présenter et proposera Not I, pour Guitare électrique et installation électronique, et Infiltrationen, pour quatuor de guitares électriques et installation électronique, deux œuvres dans lesquelles instruments et électronique s'infiltrent constamment. Ce sera une belle soirée. Ce sont deux artistes forts de générations et de régions différentes, qui ont un univers très particulier, qui ne se limite pas à la seule musique ».

fafchamps
Jean-Luc Fafchamps © Mirjam Devriendt

prins
Stefan Prins © Joachim Devillé

                                                                                               Lettre Soufie Z1

Le dimanche sera le jour de la « Carte blanche au Conservatoire Royal de Liège » et tournera autour de Related Rocks du célèbre compositeur finlandais Magnus Lindberg, œuvre pour deux pianos, deux claviers échantillonneurs, deux percussions, et installation électronique. « Nous voulions construire quelque chose autour de cette œuvre qui a une importante partie de percussion. La soirée propose donc un répertoire international basé sur les percussions et l'électronique, ainsi que deux œuvres sur bande d'étudiants de la classe de composition et de composition mixte du conservatoire, à savoir Bertrand de Lamalle et Coralie Dubois ».

Le festival promet donc d'être varié. Et si en 12 ans, il s'est créé un public fidèle, il n'en reste pas moins que cette musique reste fort peu connue du grand public. Pourtant, comme le rappelle Marie-Isabelle Collart, il faut oser la curiosité. « C'est au-delà de l'expression artistique une belle démonstration de ce qu'il est possible de faire avec la technologie d'aujourd'hui. C'est aussi ce type de musique que proposent les plus jeunes compositeurs contemporains. Mais il ne faut certainement pas voir en cette musique quelque chose d'abstrait et d'inaccessible. Ces musiques sont autant d'expressions de la vie de ces artistes, mais également le fruit de musiciens qui ont grandi tant dans la musique classique que dans les musiques populaires. Et le brassage est intéressant à découvrir ». Pour ceux qui désirent ne pas rater le train cette année, ce sera donc du vendredi 19 au dimanche 20 novembre à l'ancienne église St André place du marché à Liège, chaque soirée débutant à 20h30.

Philippe Lecrenier
Novembre 2010

 

crayon

Philippe Lecrenier est journaliste indépendant et collaborateur du site Reflexions 

 

Informations : www.memm.be ou info@memm.be ou 04/ 223 22 98


 

Sites des artistes mentionnés
Arne Deforce : http://www.arnedeforce.be/
Kee Yong Chong : http://www.chongkeeyong.com/
Hèctor Parra : http://brahms.ircam.fr/composers/composer/3571/
Sigrid Tanghe : http://www.sigridtanghe.com/
Claude Ledoux : http://users.skynet.be/ledouxcl/
Luc Brewaeys : http://www.lucbrewaeys.com/home.php
Jean-Luc Fafchamps : http://jeanlucfafchamps.com/bio.php
Stefan Prins : http://www.stefanprins.be/eng/index.html
Magnus Lindberg : http://www.magnuslindberg.com


L'Offre liée à cet événement est réservée au personnel ULg. Pour la consulter, identifiez-vous en cliquant ici