Fiction française

 

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Jacques Spitz, L'Œil du purgatoire (L'Arbre vengeur, Collection « L'alambic »)

 

L'Œil du purgatoire de Jacques Spitz (1869-1963) est un récit affolant. Poldonski, peintre désabusé, rencontre le « génie » Dagerlöff, qui n'a qu'une obsession : remettre en question le principe de causalité. Le savant inocule à son « cobaye malgré lui » un bacille ayant pour effet d'« accélérer » la vue, au point de la rendre anticipative. Résultat : Poldonski se retrouve doué de la faculté de contempler une projection de ce que sera l'être ou l'objet qu'il a devant lui. Si d'abord les choses lui apparaissent plus vieilles d'un jour ou deux (un verre ébréché, une fleur fanée ou un aliment pourri), le processus s'emballe et le narrateur contemple alors le monde tel qu'il sera dans plusieurs mois, plusieurs décennies, plusieurs siècles... Le tour de force de Spitz est non seulement d'avoir mené à son terme logique cette spirale infernale, mais aussi d'avoir envisagé ses répercussions sur le psychisme d'un individu. Poldonski comprend qu'il va assister à la mort des individus l'entourant, à la débâcle de son cadre familier, à l'inéluctable évolution d'un univers qui va se peupler de cadavres, puis de squelettes et enfin de... Mais de quoi, au juste ? Véritable trou noir littéraire, ce roman inclassable ouvre un questionnement philosophique que l'on sait destiné à rester béant mais vers le centre duquel on se précipite, dévoré par la curiosité. (Frédéric Saenen)

 

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Fred Vargas, Dans les bois éternels (J'ai lu)

Fred Vargas m'a surprise avec Dans les bois éternels. Il est vrai que l'on retrouve le même ton, les mêmes personnages, un scénario qui porte sa marque habituelle. Mais il y a quelque chose de plus. Les personnages ont pris de la consistance, ils se sont comme libérés de certaines contraintes à être ce qu'ils sont sans être vraiment différents. Et quelques passages de réjouissance philosophique assez étonnants, comme lorsqu'elle offre au membre fantôme d'un des protagonistes un petit bijou spéculatif à la James. (Vinciane Despret)

 



 

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Michel Wagner, L'apparence de la mort (Éd. Beauchesne)

Ce récit retrace l'itinéraire d'un jeune poilu lors de la Grande Guerre. Michel Wagner, écrivain et traducteur belge, glisse dans ce livre toute sa passion de l'écriture, laquelle se traduit dans un français très riche et très pointilleux. Au-delà du style parfois complexe de l'auteur, style se déploie comme une musique d'une justesse indubitable, j'ai aimé ce livre car il transpire l'humanité et dénonce, si j'ose dire, l'absurdité de la guerre qui fait sans cesse apparaître la mort.

Je me permets de vous recommander ce livre car je connais l'auteur et je sais pertinemment qu'il ne triche pas avec les mots, il m'a avoué en personne : « Beaucoup d'écrivains choisissent d'écrire leur requiem en dernier lieu, moi j'ai voulu que mon premier roman soit mon requiem, j'y ai mis tout mon cœur et toute mon âme. » (Laurence Messina)

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