
En discutant autour d'un café avec des membres du Collectif du Lion, l'apparent hétéroclite « Get Magic » adopte vite la silhouette aux formes pulpeuses, intrigantes et attirantes du voyage. Cantonnés à un lieu confiné, il n'en reste pas moins que les acteurs de ces soirées emmèneront leur public dans une course effrénée pour atteindre une vibration sonore sans frontière entre les genres. « À travers cette collaboration avec l'InsideOut, nous avons perçu l'opportunité de mélanger les publics, s'enthousiasme Myriam Mollet, chargée de communication du Collectif du Lion. Nous avons constaté que certains spectacles ne se déroulent que dans des lieux attendus. Les concerts de jazz se déroulent dans des endroits bien précis, où tout le monde n'aura pas le réflexe de se rendre. Pourtant s'il y a un concert de jazz dans un lieu public comme le Passage Lemonnier, par exemple, toute une foule s'arrête, écoute et apprécie. » Confiant, Michel Debrulle, musicien et directeur artistique du collectif rebondit. « Aujourd'hui, nous sommes bercés par des a priori où on imagine qu'un certain public n'a pas envie de découvrir certains genres musicaux. Pourtant, je suis persuadé qu'il y a toujours cette curiosité d'entendre ou de voir des choses qu'on n'a pas l'habitude de voir. Des événements comme Un éléphant dans la ville (autre manifestation organisée par le collectif, Ndlr) ou, je l'espère, Get Magic, le prouvent. Je ne veux pas dire que les lieux qui sont habilités à programmer du théâtre ou du jazz ne doivent pas faire leur travail de spécificité. Mais le Magic Mirror et la collaboration avec l'InsideOut sont de bons prétextes pour décloisonner les genres et les publics. D'autant que nous proposons un prix démocratique pour ne pas freiner la curiosité du public. »

Et de diversité, il en sera question. Au long de ces soirées, seront confrontés le jazz, le rock, la poésie, le slam, la soul, le funk, le hip hop, la drum and bass, la danse, l'humour, le sarcasme, l'électro... le tout sans reprendre son souffle. Sans pour autant citer toutes les soirées, un petit tour d'horizon s'impose. Le 12 mai, la soirée d'ouverture gratuite sera placée sous le signe de l'humour. « On peut même parler de sarcasme, comme un fou du roi pourrait le faire, développe Michel Debrulle. On y retrouvera notamment le comédien François-Michel Van Der Rest (Causerie sur le lemming) comme Monsieur Loyal, l'équipe du Mensuel, qui sont un peu les guignols de l'info locale, Claude Semal, qui représente la belgitute par excellence, et dont les sarcasmes seront mis en musique, la caravane du Zoublistan, une fanfare décalée, chamanique mais au second degré, des DJ's et quelques surprises ». Parlons également du groupe de Jazz Rock Animus Anima, qui présentera son album le 13 mai. Ou encore de l'Ersatz Cabaret le vendredi 21 mai, qui proposera une soirée « hip-pop-slam-citadine poetry », où se rencontreront des artistes ayant en commun une habilité à jongler avec le verbe et le groove. Le 26 mai, le groupe de jazz Rêve d'éléphant orchestra partagera la scène avec Babelouze, un orchestre de tubas et trombones d'une trentaine de musiciens dirigés par Michel Massot, et onze danseurs de l'école P.A.R.T.S. Deux spectacles de danse seront destinés aux enfants et les inviteront à suivre les pas, ce sera les dimanches 16 et 30 mai.
Parmi toutes les autres soirées, soulignons enfin que certaines d'entre elles seront suivies d'After Parties à l'InsideOut pour ceux qui voudraient prolonger la fête jusqu'au lever du soleil.
Simples curieux, mélomanes avertis, enfants, adultes, amoureux de la fête, tout le monde risque de ressortir de ces cabarets-fanfares-cirques-concerts (dans le fond, difficile de dire à quelle sauce nous serons mangés) avec le sentiment très agréable d'avoir fait un excellent voyage à la frontière des genres.
Un lion éléphantesque

S'il a déjà quelques activités préalables, le Collectif du Lion devient une asbl en 1989. Depuis, il propose un jazz et une tradition de l'improvisation aux frontières du classable, qui évolue à la recherche d'un son, d'un rythme, d'une pulsion primitive du corps qui bouge, au sens le plus noble du terme. « On n'a jamais vraiment théorisé ce qu'on proposait, explique Michel Debrulle. Mais dans l'esthétique du collectif, il y a une volonté consciente ou inconsciente de faire une musique qui retourne à ce que les Espagnols appellent dans le flamenco El duende (entendez par là une forme de transe, d'illumination, une évasion du monde et un rapprochement de Dieu par les cinq sens). Une volonté de faire une musique qui va vers les gens, qui réveille en eux ces pulsions primitives. La danse et le rythme sont des dimensions importantes de notre musique ».
Au-delà des concerts, des productions de CD et d'une belle exportation à l'étranger, le Collectif du Lion organise des projets interdisciplinaires, sollicitant les richesses simultanées de la danse, du théâtre, de la vidéo, du cinéma, de la photo... Certaines manifestations font écho dans nos esprits, comme « Un éléphant dans la ville », dont la deuxième édition a eu lieu à Liège en 2009 et rencontra un beau succès. Une troisième édition est d'ailleurs annoncée à Tournai pour 2011-2012. Une belle réussite, qui n'est pas pour autant calculée.
« On ne s'est jamais posé la question de savoir si c'était de l'avant-garde ou pas, avoue Michel Debrulle. Il y a une spontanéité dans le fait qu'on avait envie de proposer cet art-là, sans se poser la question de savoir si ça allait marcher ou plaire... » Tout de même, la démarche et le parcours artistique seront reconnus. Depuis 2007, le collectif jouit même de subsides de la Communauté Française de Belgique, une belle reconnaissance, tardive pour un lion qui n'en est pas à son premier rugissement.
Voir aussi : Festivités dʼouverture Liège Métropole culture 2010
Philippe Lecrenier
Mai 2010

Philippe Lecrenier est journaliste, diplômé de l'ULg en information et communication à finalité presse écrite et audiovisuelle.
Infos et tarifs :
Pour plus d'informations ou pour consulter le programme : www.insideoutclub.be, www.collectifdulion.com.
Contact : insideout@mail.be, collectifdulion@gmail.com ou le 0478/39 02 49