La Régate : comme un couteau dans la plaie
La régate

« Les sportifs du club étaient indispensables lors du tournage, ajoute David Murgia, qui campe le personnage de Pablo, en double scull avec Alex lors des régates. À côté de l'aide logistique qu'ils fournissaient, ils participaient même au montage de certaines séquences. » Et Joffrey Verbruggen d'embrayer : « Ça demandait beaucoup de concentration de tenter de maîtriser ce sport complexe qu'on ne connaissait pas, tout en jouant et en gardant la tension requise par Bernard. »

Depuis le début de sa carrière, Bernard Bellefroid se « coltine la réalité de la vie ». Concernant ses futurs projets, cet inconditionnel des 400 coups et de La Promesse bûche simultanément sur l'écriture de trois scénarios. Primé cette année au festival « Premiers plans » à Angers et raflant le prix du public et celui de la jeunesse l'année dernière au Festival de Namur, La Régate est un film sur cet amour que l'on n'arrive pas à exprimer. C'est aussi une œuvre âpre, sobre, mais résolument gorgée d'espoir.

 

Sébastien Varveris

 

Le film

La Régate traite la question de l'amour parental de manière originale. Dans le lien paradoxal qu'il établit entre amour et violence,  Bernard Bellefroid, d'une part, problématise la représentation de la violence à l'écran et, d'autre part, envisage la question du vivre ensemble dans sa dimension la plus physique.

Le film s'installe un peu maladroitement : les scènes de présentation des personnages ressemblent trop à des scènes de présentation de personnages. Le statut, le passé et le caractère des protagonistes se révèlent trop vite, par des dialogues qui fonctionnent comme des alibis révélateurs de données purement informatives, qui ont certes leur rôle, mais qui agissent comme des prétextes puisant dans la textualité ce qui au cinéma trouve d'autres formes d'expression. Mais assez vite, le réalisateur s'accapare ces formes d'expression pour emmener son film dans une direction inédite.

La Régate

La Régate est un film particulièrement agressif. Rythmée par des scènes de confrontation physique, l'intrigue fonctionne comme un couteau qu'on ne cesse de remuer dans la plaie. Hâtivement, le film violente les esprits dans sa manière paradoxale de se démarquer de la représentation banalisée de la violence : les scènes de confrontation sont effectivement d'autant plus violentes que le réalisateur choisit de ne pas les montrer, ou de les mettre en scène avec parcimonie. Bellefroid parvient ainsi, avec subtilité, à rendre à la violence sa charge attentatoire. Au spectacle de violence se substitue alors un point de vue brutal énoncé avec fermeté, une claque adressée directement au spectateur pour le réveiller sur la réalité, celle qui peut commencer par un simple regard provocateur et se terminer par un lynchage complètement insensé.

Dès lors, tout devient question de canalisation. Une canalisation des regards d'abord : entre le regard du chien enragé et celui du chien battu existe une telle tension que le premier réflexe est celui de fuir les yeux. Mais dès qu'il y a croisement de regards, un semblant de douceur monte à la surface, devient complicité avant d'exploser soudainement et de se transformer en secousse corporelle. La canalisation prend alors une forme physique, sportive, où le battement des muscles devient un prétexte d'évasion, autant pour Alexandre que pour le spectateur. Le choix de l'aviron est d'ailleurs d'autant plus significatif qu'en plus de sa dimension de défilé cinégénique, il est littéralement un sport de canalisation et de bifurcation. Une fois drainée, la violence s'estompe pour laisser une chance à la cohabitation. Mais incessamment, un paradoxe se réitère : celui d'un amour problématique qui ne trouve pas de forme d'expression. On chavire alors dans un film où embrasser et étrangler s'expriment par le même geste et où la douleur est d'abord une frustration face à l'acte d'aimer.


L'interview de l'équipe

 

 

Abdelhamid Mahfoud
Mars 2010

 

 

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Sébastien Varveris est étudiant en 2e année de master en  Information et Communication, finalité spécialisée en journalisme

 

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Abdelhamid Mahfoud est étudiant en 2e année de master en Arts du spectacle, finalité spécialisée en Cinéma documentaire

 

 


 

 

Voir la bande-annonce et des extraits du film sur le site laregate-lefilm.com

Photos ©  M. Jaspar / Artemis - Samsa - LC

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