Verena Hanf, Tango tranquille

HanfViolette est une retraitée bruxelloise coulant des jours paisibles dans une confortable demeure bourgeoise. Son quotidien, cadencé de soliloques intérieurs et imprégné de musique, défile selon une immuable partition. Car cela fait un bail que Violette a réalisé le fantasme absolu dans notre société du tout-communicationnel : se dégager, radicalement, des liens sociaux en verrouillant sa porte, débranchant son téléphone et se barricadant en dedans.

Enrique, lui aussi, connaît la solitude, et sait la douleur intense qu’elle provoque. Ce jeune Bolivien, expatrié dans l’humide Plat Pays, souffre des regards méfiants des autochtones, de l’attitude hostile de son entourage, de son déracinement et d’un manque cruel d’affection. Et surtout de ces heures creuses qui s’égrènent, sans travail ni perspectives tangibles.

Deux personnages à vif, deux naufragés, deux sensibilités à fleur de peau, qui fuient leur passé, endossent leur présent et interrogent leur futur. C’est par une technique habile que l’auteur nous amène à pénétrer en profondeur ces curieuses consciences : le monologue intérieur dédoublé. Ce parti-pris narratif permet de toucher au plus près les méandres de leur âme, sans tamisage. Les phrases, percutantes dans leur brièveté, leur enchaînement et leurs formules, s’enchaînent sans fausse note, dans un accord parfait, grâce au style maîtrisé de Verena Hanf.

Samia Hammami

 

Verena Hanf, Tango tranquille, Le Castor Astral, « Escales des Lettres », 2013, 166 p.
 

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