Visions capitales est un ouvrage d’une beauté troublante et fascinante, exerçant à plein le « pouvoir de l’abjection » dans la mesure où c’est une spécialiste en la matière qui en signe les commentaires, Julia Kristeva. Si étonnant que cela paraisse, nous tenons là le catalogue d’une exposition qui s’est tenue, il y pas moins de quinze ans au Louvre, sur la décapitation dans l’histoire de l’art. Mais à fréquenter le texte de très haute tenue de Kristeva, l’idée s’impose que cet ouvrage est avant tout un essai, superbement illustré de surcroît, et que ce n’est pas la lettre qui y est serve de l’image, mais bien l’inverse. Très vaste sujet que celui des « Arts et rituels de la décapitation » à travers les âges et les œuvres, et qui est susceptible de convoquer des disciplines telles que l’anthropologie, la sociologie, la psychanalyse, l’esthétique ou l’histoire des religions. Kristeva évolue entre ces différents regards, avec l’érudition qu’on pouvait lui supposer, mais qui, enfin, déconcerte par son étendue et son infaillibilité. L’encyclopédisme n’a rien de sec, dans la mesure où il est parcouru d’impressions et d’analyses aux accents plus personnels, ce qui contribue situer le propos dans une intimité inattendue pour un tel registre.
Frédéric Saenen
Julia Kristeva, Visions capitales. Arts et rituels de la décapitation, Fayard / La Martinière, 2013, 146 p.< Précédent I Suivant >
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