(Roman en vers)
Dans Comment j’ai écrit certains de mes livres, Raymond Roussel (1877 – 1933) relatait une « curieuse crise » qu’il traversa au moment de la rédaction de sa première œuvre, La Doublure. Il avait alors dix-neuf ans : « Pendant quelques mois j’éprouvai une sensation de gloire universelle d’une intensité extraordinaire. Le Docteur Pierre Janet, qui m’a soigné pendant de longues années, a fait une description de cette crise dan le premier volume de son ouvrage De l’Angoisse à l’Extase (pp. 132 et suivantes) ; il m’y désigne sous le nom de Martial, choisi à cause du Martial Canterel de Locus Solus. » Si ce dernier titre est, avec Impressions d’Afrique, celui qui assura sans doute sa renommée posthume, l’œuvre de Raymond Roussel reste à découvrir dans sa démesure et son étrangeté. Il faut aborder La Doublure, aberration littéraire, en étant averti de l’univers parfaitement forclos qui y est mis en scène. On y entreverra alors avec plus de sérénité l’ébauche de la manie énumérative qui caractérisera la création de Roussel, avec cette espèce d’essoufflement maniériste prétendant épuiser la description d’un extravagant « chosier », purement fictionnel. Pour y repérer aussi les éléments imaginaires qui raviront et nourriront la génération des surréalistes, plus tard celle des oulipiens.
Voir aussi : Le roman en vers : genre moderne !
Frédéric Saenen
Raymond Roussel, La Doublure, Gallimard, Collection « L’imaginaire » n° 637, 2013, 190 p.
< Précédent I Suivant >
Retour à la liste des Romans
Retour aux Lectures pour l'été 2014