Les années 2000 : le déclin et l’envie de survivre

Après une dizaine d’années d’existence, le Nickelodéon voit pourtant sa fréquentation baisser. M.-E. Mélon voit deux phénomènes extérieurs intimement liés à ce déclin : « d’une part, la Cinémathèque a commencé une collaboration avec les Grignoux, et si on s’arrangeait pour ne pas prendre les mêmes films, la concurrence restait trop forte ; d’autre part, le dvd est apparu, et avec lui des centaines de classiques sont devenus accessibles à tout le monde. ». Le ciné-club réagit alors en arrêtant les classiques et change sa programmation : le Nickelodéon projette désormais « du cinéma contemporain, clairement art et essai, des films qui sont davantage dans les marges, tant en documentaire qu’en fiction, expérimental, etc. ». Le fonctionnement interne se modifie aussi : « chaque membre de l’équipe travaillait dorénavant par séance et non plus par poste. Cela a fonctionné, mais nous ne pouvions plus proposer de projections hebdomadaires, et de moins en moins de films sur pellicule. La formation des projectionnistes a commencé à être de plus en plus compliquée… »

 
Marc-Emmanuel Mélon et Jean-Pierre Dardenne © François-Xavier Cardon

« Le dernier classique que nous avons projeté est The shop around the corner, de Lubitsch, un film merveilleux, un conte que nous avons programmé durant la période des fêtes de Noël et qui n’a attiré que 15 personnes… Cela amène aussi, je crois, à une troisième raison de la baisse de fréquentation : la chute de la cinéphilie. Ce qui m’a animé pendant les années 90, c’était de pouvoir former via le ciné-club et les cours de cinéma un certain public, plus exigeant. C’est une idée bazinienne qui m’animait beaucoup, mais les gens changent et j’observe, depuis près de dix ans, que les étudiants sont moins cinéphiles, ou s’ils le sont ils s’intéressent moins aux films anciens au profit des films plus contemporains. »

Les années 2010 : le renouveau

En ce début de décennie, le Nickelodéon semble plus que jamais confronté à la difficulté de retrouver son public. « À l’ère d’internet, des smartphones, nous sommes littéralement submergés d’images. Le téléchargement a sans doute nui au ciné-club, et je le regrette profondément : un film, par essence, est fait pour être regardé sur un grand écran, dans une salle avec d’autres personnes. Le cinéma est un art de masse, mais cela semble changer aujourd’hui et devenir un acte isolé, sur un écran à peine plus grand qu’une main. C’est un constat amer et triste. »

M.-E. Mélon ne perd pourtant pas espoir, et continue de soutenir, à distance, le projet qu’il porte depuis maintenant vingt ans. « Depuis quelques années, j’ai confié l’organisation à Grégory Lacroix. Je reste responsable du financement de l’activité, mais ce sont les étudiants qui gèrent dorénavant. Je ne suis pas mécontent de ce choix, car il y avait toujours cette présence du professeur qui pouvait être handicapante malgré moi. Avec Grégory, c’est redevenu un vrai ciné-club d’étudiants, qui assument leurs choix. C’est l’essence même du Nickelodéon, et j’espère que cela le restera. »

En attendant, le ciné-club a fait peau neuve avec une toute nouvelle équipe cette année, et a déjà pris possession du complexe ULg-Opéra, où les projections seront désormais organisées. Enfin, presque : la séance du 21 novembre dernier, en présence de leur réalisateur André François, a dû être déplacée salle Gothot en raison du nombre élevé de spectateurs (photo ci-contre) ! Un nouveau souffle semble animer le Nickelodéon, qui prépare déjà pour la rentrée 2014 quelques petites pépites que nous ne manquerons pas de vous signaler au moment venu. Ouvrez l’œil, et comme disait ce cinéphile de Quentin Tarantino : vive le cinéma !

Bastien Martin
Décembre 2013

Bastien Martin est diplômé de l'ULg, Master en Arts du spectacle, finalité cinéma documentaire. Il poursuit actuellement des recherches en cinéma d’animation.

Contacts : le Nickelodéon est présent sur facebook mais aussi ici.