Patrick Corillon investit le Théâtre de Liège

porteentreeÀ l’occasion de la réouverture du théâtre de Liège, l’artiste belge Patrick Corillon joue avec les mots et les matériaux afin de proposer à tout un chacun une œuvre à la fois ludique, poétique et amenant à la réflexion.

Habitué des commandes publiques, Patrick Corillon s’est joint au projet de rénovation du théâtre en 2011 suite à une proposition émanant de la Communauté française. Agréablement surpris par cette invitation, il l'accepte avec plaisir. Son intervention se fonde dans un premier temps sur le bâtiment. L’artiste est alors amené à concevoir de courts textes prenant place au cœur des différents espaces. Un travail de réaffectation des lieux qui se mêle donc à celui d’autres artistes, en commençant par celui des architectes Pierre Hebbelinck et Pierre de Wit.
Dans un second temps, on lui confiera la tâche d'inventer des noms pour les différentes salles. On lui demandera aussi de réaliser une lithographie ainsi que la mise en place de deux performances qui seront présentées au public durant le week-end de réouverture du théâtre.

bar

Des fictions dans un espace dédié à la fiction

Présentant une œuvre au sein de laquelle la fiction occupe une grande place, Patrick Corillon fait revivre l’esprit des lieux qu’il investit. Ces histoires n’appartiennent pas au livre mais bien à l’espace physique au cœur duquel elles se déploient, lui donnant un sens. C’est à travers un questionnement sur notre rapport au monde et sur le caractère identitaire de ce qui nous entoure que l’artiste a réalisé les œuvres qui prennent place au sein du théâtre, un lieu dont le passé provient en droite ligne des Lumières. Ainsi, Patrick Corillon provoque un véritable travail mental et physique de la part du spectateur. Selon lui, « la meilleure façon d’être au monde est d’être à la fois spectateur et acteur de sa vie ». Un exemple est donné par ce texte figurant dans l’entrée de la galerie et visible grâce à des jeux de lumière :

Quand on s’arrête au beau milieu d'un bâtiment, c’est pour y promener son regard en toute liberté.
Les points où l’on pose les yeux ne sont que des moments de repos au cours de notre parcours.

Selon les matières et les procédés d’écriture choisis par l’artiste, les œuvres se dévoilent plus ou moins facilement à celui qui les regarde. Elles prennent également place dans des lieux insoupçonnés comme la cave ou la penderie du concierge, interpelant directement la personne concernée avec humour. Ainsi, le concierge recevra les bons conseils sur la manière de dormir durant les heures de travail. 

hall

De quel droit nommer des lieux qui appartiennent à tout le monde ? 

porteCette question est directement tirée de la fable contant l’origine de la nomenclature des salles. Comme un événement anecdotique de sa vie, Patrick Corillon raconte la manière dont un homme s’est présenté à lui alors qu’il prenait un verre avec un ami et l’a sommé de ne pas nommer les salles du théâtre, car elles n’appartenaient pas à une seule et même personne.Il prend alors comme exemple un village au sein duquel les lieux publics sont désignés par une partie du corps. On retrouve donc des noms tels que salle de la grande main pour désigner la grande salle ou encore au creux de la main pour indiquer la salle située sous cette dernière.

« Plus je me rapproche du monde de la scène, plus je me rapproche du monde de l’art »

Le théâtre a permis à Patrick Corillon de réinterroger la notion de temps, de voir que dans le travail des objets, il est intéressant d’avoir des temps différents. Selon lui, « dans les arts plastiques, il y a toujours cette idée que le temps ne compte pas dans un sens ou dans l’autre ». Au cours de ses performances, il va présenter des objets qu’il garde toujours en main, qu’il ne doit pas abandonner. Il construit également un rapport à l’autre qui est direct, qui est très différent finalement de celui des arts plastiques. Et lorsque l’on demande à Patrick Corillon s’il appartient davantage au monde des arts plastiques ou au monde du théâtre, il se définit davantage comme un plasticien.

 

Sieste sur les hauteurs de Liège

siesteCe n’est pas la première fois que Patrick Corillon travaille pour un projet au sein de la ville de Liège. En 1996, il réalise Sieste sur les hauteurs de Liège, une œuvre composée de trois souches moulées dans le béton dont les fictions mettent en scène un seul et même protagoniste, Oskar Serti. Cette œuvre traverse les saisons le long des chemins boisés qui constituent le musée en plein air du Sart Tilman.

Nul besoin donc d’attendre la réouverture du théâtre de Liège pour faire connaissance avec la poésie de Patrick Corillon !

 

Marjorie Léonard
Septembre 2013

 

crayongris2
Marjorie Léonard est étudiante en 2e année de maîtrise en histoire de l’art et archéologie, orientation générale, finalité spécialisée en muséologie