Les nouveaux amphithéâtres de l’ULg, drapés de rouge
BRI 0802-350À l’occasion de la rentrée académique 2013-2014, de nombreux étudiants et enseignants vont fouler pour la première fois le sol des anciennes salles du cinéma Opéra, fraîchement rénovées pour accueillir une nouvelle extension du campus universitaire. Au-delà d’un équipement adapté à l’invasion des nouvelles technologies – et des sièges à l’allure ergonomique –, une autre expérience attend les futurs habitués des lieux : l’intégration d’une œuvre de Jean Glibert, qui investit l’ensemble du complexe de ses nuances de rouge.

En empruntant les marches qui mènent au second étage de la galerie, certains Liégeois se souviendront de leurs sorties révolues dans l’ancien cinéma : une entrée sombre, au sol velouté d’un bleu démodé, avalait les spectateurs impatients dans son dédale de salles obscures. Mais lorsque le curieux pousse aujourd’hui la porte qui mène aux amphithéâtres, le paysage a radicalement changé ; il pénètre dans un espace aéré,  baigné par la lumière naturelle. Couloirs et escaliers donnent accès à cinq salles – dont une entièrement dédiée à la projection cinématographique –, à des espaces d’étude et de détente, ainsi qu’à une terrasse ; cette dernière, qui se déploie le long de la façade et surplombe la place de la République française, inscrit directement le lieu étudiant au sein de la ville. Pourtant, derrière la matérialité de ces travaux se trouvait un défi initial de taille : le projet de réaménagement, confié par l’Université au bureau d’architectes Dethier, faisait le pari de transformer un bâtiment des années 1980 en un site moderne, en accord avec les normes actuelles en matière d’accessibilité, de sécurité, d’énergie, mais également les nouveaux besoins en équipement.

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Quand le peintre rencontre l’architecte

Au-delà de cette impressionnante transformation, les lieux se dotent d’une autre particularité, qui vient surprendre le visiteur dès son arrivée : sol, murs et plafond, arpentés d’un gris sobre et discret, sont cinglés de parallélépipèdes rouge vif. Des couloirs aux escaliers, des amphithéâtres à la salle des professeurs – et jusque dans les toilettes –, les formes vermillon vrillent l’espace de leur présence nerveuse. Cette intervention, conçue en concertation avec l’architecte Daniel Dethier, porte la signature du peintre Jean Glibert.

Dans son atelier perché au centre de Bruxelles, l’artiste retrace pour nous la genèse de ce projet, mais aussi celle de ses réalisations antérieures. Formé à la Cambre, il abandonne rapidement une démarche picturale accrochée à un support classique (qu’il soit en toile ou en bois) pour adopter une approche différente de la peinture : il préfère l’inscrire dans un contexte architectural ou urbanistique. En collaborant avec des architectes, il dit vouloir «mettre la couleur dans l’architecture, de la même manière qu’on intègre l’architecture dans la ville» ; réfutant l’étiquette de décorateur qui lui a parfois été attribuée, Jean Glibert est loin de concevoir ses interventions comme de simples «habillages», mais bien comme des œuvres à part entière. 

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Avant de s’emparer des nouveaux amphithéâtres de l’Université, le plasticien avait déjà marqué la ville de plusieurs de ses interventions. Outre le poste électrique de la rue Pouplin, les murs antibruit du viaduc de Cointe ou encore l’hôtel Desoer de Solières, Jean Glibert a laissé son empreinte au Collège Saint-Benoît Saint-Servais. Ce dernier exemple correspond d’ailleurs, tout comme le projet du cinéma Opéra, à un contexte de rénovation et de réaffectation d’un bâtiment : lors de la fusion en 2004 des deux établissements scolaires, l’intervention de Jean Glibert visait, d’après Nobert Nelles1 à «contribuer à l’amélioration de la lecture du site, créer des repères permettant aux étudiants de s’orienter dans l’ensemble du complexe, participer par la couleur et la lumière aux aménagements». Les différentes caractéristiques qui ont fait l’attrait de cette démarche plastique – lisibilité, manipulation de la couleur et de la lumière, souci du détail – se retrouvent en filigrane entre les murs du complexe Opéra.

 


 

 

1 Dans l’ouvrage Jean Glibert, travaux récents, coordonné par Pierre Henrion et édité par le Parlement de la Communauté française en 2004.

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