Saint Nicolas, de l'histoire à la légende

Les lieux de cultes

Les archives que détiennent les monastères russes commencent à livrer des informations sur le culte de saint Nicolas dans l'Église byzantine et, à travers elle, en Turquie et dans les pays du Moyen-Orient. Ainsi, sous l'impulsion d'un tourisme de plus en plus développé sur la côte méridionale turque, la redécouverte du présumé tombeau de saint Nicolas, à Myra, attire aujourd'hui un nombre considérable de visiteurs ou pèlerins.

Pour ce qui est du monde occidental, le culte est essentiellement focalisé autour de deux localités : la ville italienne de Bari, dans les Pouilles, et la commune de Saint-Nicolas-de-Port en Meurthe-et-Moselle, à 12 kilomètres de Nancy. Toutes deux doivent leur renom aux reliques du saint qu'abritent leurs églises respectives.

 

St Nicolas Bari St Nicolas Bari
Procession de saint Nicolas à Bari

 

La Basilique Saint-Nicolas de Bari, de style roman, est l'une des églises les plus imposantes du sud de l'Italie, au centre d'une localité de près de 400.000 habitants. La translation du corps du saint en 1087 fut décrite avec force détails par des historiographes contemporains. On connaît jusqu'aux noms des 62 marins qui ramenèrent la précieuse relique, au terme d'une véritable expédition, longuement préparée, qui s'apparente plus à un vol qu'à un geste pieux. Arrivés le 7 mai au large de Bari, ils durent attendre la marée haute du lendemain pour entrer au port Saint-Georges, distant de quatre milles de la ville elle-même. De là, les ossements saints furent acheminés dans une châsse portée par une foule enthousiaste jusqu'au lieu où, peu de temps après, commença à s'élever la majestueuse basilique devenue depuis un des plus grands centres de pèlerinages du monde chrétien. Ainsi, cette année par exemple, pour le 922e anniversaire de la translation, les célébrations religieuses ont duré douze jours et les manifestations civiles, 6 jours, culminant les 7,8 et 9 mai. Le 7, un cortège historique de plus d'un millier de figurants a parcouru les rues de la cité entre 21 et 23 heures, suivi d'un gigantesque feu d'artifice. Le lendemain, les portes de la basilique ont été solennellement ouvertes dès 4h 30 du matin, au son de toutes les cloches de la ville. Entre 4000 et 5000 participants ont assisté à la messe dans et autour de l'édifice et plusieurs dizaines de milliers de pèlerins, venus essentiellement d'Italie et d'Europe de l'Est, ont ensuite participé aux célébrations et processions qui se sont succédé jusque tard dans la nuit et ont repris le samedi 9, jour du prélèvement de la manne.

Bari
Basilique Saint-Nicolas de Bari, Italie.
Construite entre 1087 et 1196, cette basilique contient des reliques du saint, dont on extrait la manne, chaque année, le soir du 9 mai.
Photo ©Szepattila
tombe saint  nicolas
Tombe à Myra, montrée aux touristes comme étant celle de st Nicolas. La tombe originelle serait sur l'île de Gemile, abandonnée vers 650 devant la menace arabe. Photo prise par le Padre Gerardo Cioffari

 

Eglise st nicolas
saint nicolas lorraine

Rien de tel à Saint-Nicolas-de-Port, commune de 7500 habitants. Érigée en gothique flamboyant entre 1481 et 1545, la basilique de Port possède des dimensions de cathédrale puisque ses deux tours de façade, à clochers bulbeux, culminent à 85 et 87 mètres. Elle n'accueille cependant plus qu'une manifestation religieuse importante, la procession aux bougies de la Saint-Nicolas, le soir du 6 décembre. Le reste de l'année, rares sont les fidèles qui viennent honorer le saint éponyme dont une phalange, dérobée à Bari par un Lorrain de retour de croisade, fut à l'origine d'un culte qui naguère attira sur les bords de la Meurthe des milliers de pèlerins. De la fin du XVe siècle jusqu'à la guerre de Trente ans qui la ruina en 1635, Saint-Nicolas-de-Port était une bourgade au commerce florissant, plus peuplée et plus connue que Nancy. On y venait de toute la France mais aussi de notre région, prier le saint thaumaturge, exorciste, guérisseur et protecteur des pauvres.

En France comme en Belgique et sans doute dans de nombreux autres pays, les églises dédiées à saint Nicolas sont nombreuses. L'actuel diocèse de Liège compte par exemple huit églises paroissiales (Liège Outremeuse / Saint-Nicolas / Stembert / Waret l'Evêque / Souxhon / Strée-lez-Huy / Vaux et Borset / Fraiture) et deux églises annexes (Theux-Marché et Hallembaye)4. Parler cependant de « lieux de culte » à leur sujet est délicat car les pratiques rituelles qui accompagnaient les fêtes patronales des corporations placées sous le patronage de saint Nicolas et les dévotions particulières qui l'honoraient ont disparu, depuis plusieurs siècles parfois. La fête du saint a pris, dès le XVIIe ou le XVIIIe siècles5, un caractère de réjouissances familiales, amplifié durant la seconde moitié du XXe siècle par une véritable exploitation commerciale. Qui, de nos jours, chez nous, prie encore saint Nicolas ?

 

Françoise Lempereur
Novembre 2009


crayon
Françoise Lempereur a soutenu une thèse de doctorat sur la transmission du patrimoine immatériel, matière qu'elle enseigne aux étudiants de master en Histoire de l'art et en Communication de l'ULg.


 
 


4 Source : service de presse et de communication de l'Evêché de Liège
5 Source : Alain COLLIGNON, Dictionnaire des saints et cultes populaires de Wallonie. Histoire et folklore, Liège, éditions du Musée de la Vie wallonne, 2003, p. 456

 
 
Photo de la statue de Saint-Nicolas © Yvan Cerfontaine, Les églises de Liège
 

Page : previous 1 2 3