John Gardner - La Symphonie des spectres

spectresIgnorer le nom de John Gardner était jusqu’il y a peu une lacune bien excusable. Elle l’est nettement moins, maintenant que les Éditions Denoël redonnent la traduction de son magnum opus La Symphonie des spectres, qui n’avait plus reparu en français depuis 1985.

Le volume de l’ouvrage est à la mesure de l’impression qu’il laisse à l’esprit, une fois sa lecture achevée : un sentiment d’écrasement, d’humilité devant un tel monument. Gardner, auteur sulfureux, rongé par l’alcoolisme et surdoué pour la solitude, a commencé La Symphonie des spectres en 1976, alors qu’il venait d’apprendre qu’il était atteint d’un cancer. Toutefois, le sentiment d’urgence dans lequel il l’a composé, l’espèce de fuite en avant qui l’a porté pendant des nuits entières à taper sur sa machine à écrire, ne se ressentent pas dans l’alternance harmonieuse des mouvements. Il y a bien des furioso, des andante, voire des allegro, cependant le tempo global reste au lento. L’édifice se construit avec patience, un caractère à la fois ; les scènes s’articulent avec une logique qui n’a rien de chaotique, mais juste ce qu’il faut de déhanché ; les énigmes se succèdent sans hâte et s’épaississent comme une brume plutôt que de s’abattre en rafales. Un long frisson de 780 pages.

Frédéric Saenen
Juin 2013

John GARDNER, La Symphonie des spectres, Denoël, 790 pp., 29,50 €.  Traduit de l’anglais par Philippe Mikriammos

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