Flavia Company - Volver antes que ir
companySous ce tire évocateur, Flavia Company, auteure hispano-argentine a publié il y a quelques mois, un long poème de 1117 vers d'une seule traite. Ce genre est une première pour l’auteure, déjà reconnue pour ses contes et ses nombreux romans et qui a décidé, pour l’occasion, d’étrenner la variété argentine de sa langue maternelle. Un texte réservé aux fanas de poésie ? Pas si sûr ! En effet, le poème est remis dans son contexte en début du «recueil» ce qui nous permet donc de nous rapprocher de cette écrivaine à première vue assez éloignée de ses lecteurs belges.

Nous apprenons ainsi que Volver antes que ir est une sorte de catharsis, suite à la lecture du journal intime de sa maman lors de son premier voyage d’Argentine vers l’Espagne. Cependant, cet hommage ne fut pas immédiat et c’est plus de vingt ans après avoir reçu ce manuscrit et suite à un voyage en sens inverse vers l’Argentine que Flavia Company se sent prête a enfin coucher sur le papier ses impressions et réflexions quant à l’expérience du voyage, de l’étranger et du souvenir.

Ce long poème, qu’il serait aussi beau d’écouter que de lire, nous touche donc par son origine, si personnelle, celle d’une enfant qui imagine déjà de nombreux allers-retours entre les deux continents mais qui sera contrainte par l’exil à rester d’un côté de l’océan. Au-delà de ce contexte, ce poème envoie en pleine face du lecteur des images fortes d’enfance et des réflexions de la narratrice que les adultes appelleraient «existentielles » dont le point de vue est naïf et tellement lucide à la fois.  En plongeant dans cet ouvrage, il faut donc se laisser aller, monter à bord de la barque de la poétesse et se laisser porter par le courant de mots vers un voyage duquel on ne peut revenir.

 

Acordate
: un país no es,
de ningún modo,
company-plaisirel lugar donde nacemos
: un país, si acaso, es el tablero que se elige
Para vencer los miedos de vivir,
Cosas que a cada cual se le juntan en una parte distinta,
Lo entendí mientras hoy masticaba un choripán

Souviens-toi
: un pays ce n’est pas
d’aucune façon,
le lieu où nous naissons
: un pays, à la rigueur, est un échiquier que l’on choisit
Pour vaincre les peurs de vivre,
Des choses qui se rassemblent pour chacun de nous dans un lieu différent,
Je l’ai compris aujourd’hui pendant que je mâchais un pain-saucisse
                    [ma traduction]

Pour ceux qui ne lisent pas (encore) l’espagnol, nous vous recommandons le roman Donne-moi du plaisir, de la même auteure, qui a été publié en 2001 par Flammarion.

 

Pauline Berlage
Juin 2013

 

Flavia Company, Volver antes que ir [Revenir avant de partir], Madrid, EugenioCanoEditor, 2012, 78 pages.

<   Précédent  I    Suivant   >

Retour à la liste de poésie
Retour aux Lectures pour l'été 2013