Antoine Wauters - Césarine de nuit

wautersLong poème en prose, rythmé et rimé, où un mot entraîne l’autre. Hänsel et Gretel revisité de nos jours – où la sorcière du conte de Grimm semblerait un angelot, à côté des réalités vécues ici – entre l’enfance et l’âge adulte ? entre la terre natale et la violente terre d’exil ? Usine ou asile ? Exil, certes. Maison ? Prison, plutôt. Évasion ? Sans paroles. En rêve. D’un bout à l’autre, une détresse. Livres noyés dans le fleuve (des larmes ?) Artaud est cité. Césaire, aussi. Féminisé dans le titre du livre, prénom impérial d’un empire ruiné. D’une même haleine : clochards, poètes, criminels, qu’ils s’appellent Sélim, Saül ou Jean-Bastien… À réciter la prière une dragée à la bouche.

Érotisme et sadisme s’entrecroisent, comme raison et folie, comme rêve et réalité – toutes oppositions éculées, balayées par ce texte majeur. Romantisme pas mort (heureusement) : le végétal console le béton, la forêt guérit de la ville dégradée, comme l’enfance – fût-elle des pires – déjoue la condition humaine.

Privés de pain, livrés aux poubelles, la pire des punition s’avère encore être la privation de lecture, oui, la privation de livres.

Surtout, ne nous privons pas de celui-ci !

 

Césarine des bassins, des machines, des travaux de couture dont elle s’acquitte tout en bruissements. Car c’est ainsi. On lui fait accoucher chaque jour de petites filles et de petits garçons de coton, bien légères pelotes à tirettes et velcros. Le soir on lui réclame ses marchandises, ces enfants de lycra bien serrés liés dans de minces sacs plastique qu’on expédie ensuite par l’eau. À la ville. Aux grandes villes d’ici et là-bas. On ne vous dit pas où.

 

Rose-Marie François
Juin 2013

Antoine Wauters, Césarine de nuit, éditions Cheyne.

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