Nourrir l’humanité, c’est tout un métier, de Charles Culot et Valérie Gimenez

nourrirCharles Culot est fils d’agriculteur.  Interpellé par un fermier qui se désolait de la différence croissante entre le monde urbain et le monde rural, il décide de renouer avec ses racines et, pour ce faire, emmène avec lui Valérie Gimenez, citadine pure souche.  Ensemble, ils font le triste constat de la condition actuelle du milieu rural.  Le spectacle  qu'ils proposent est une étape de création, de leur Cie Arts & Tça, Carte blanche ESACT.

La productivité et la rentabilité sont devenus les maîtres mots des grosses exploitations agricoles.  Ces dernières produisent une agriculture industrielle et inadaptée à la culture locale.  Ces immenses fermes ont amené avec elles des normes économiques, administratives et hygiéniques qui portent préjudice aux petites exploitations familiales.  Pour rester concurrentielles, ces dernières doivent investir, ce qui a pour conséquence d’endetter les fermiers de génération en génération.

De cette enquête de terrain, Charles et Valérie ont fait une pièce.  En mêlant théâtre, vidéo et musique, ils veulent ouvrir les yeux de leurs spectateurs sur la situation actuelle et sur la nécessité d’agir.   Pour cela, ils ont réalisé une dizaine d’interviews qu’ils ont choisi de projeter et d’interpréter.  Les acteurs ne cessent donc de changer de personnage tout en s’appuyant sur une figure centrale, eux-mêmes.  Eux-mêmes, en tant qu’homme et femme ayant réellement vécu l’expérience de cette enquête, en tant que témoins directs de la situation et en tant que porteurs de la véracité du témoignage. 

Cependant, leurs personnages sont tout aussi authentiques puisqu’ils représentent les fermiers que le jeune duo d’acteurs a interviewés.  Jouer ces fermiers sur scène permet de renforcer l’impact des témoignages sur les spectateurs qui partagent le même espace-temps, ainsi que de faire porter le message par la jeune génération.  Cela permet de montrer toute l’actualité de la problématique et de ne pas la réduire à un événement passé et achevé.

Le spectacle prend place dans la salle B16 de Saint Luc.  Il ne s’agit pas d’une salle de théâtre.  Il n’y a pas de scène ni de coulisses ou d’espace régie.  Les spectateurs sont assis sur des chaises disposées en rangées.  Il n’y a pas plus d’une quarantaine de places.  Cet espace réduit et adapté pour accueillir le spectacle crée une ambiance intime où le spectateur partage une réelle proximité avec les acteurs.

En réalité, cette salle B16 est une ancienne écurie...  Cela n’est pas sans servir le propos tenu par le jeune duo d’acteurs qui s’attache à réveiller les consciences sur les difficultés de survivre aujourd’hui dans le milieu agricole.

Là où Charles et Valérie réalisent un coup de maître, c’est dans le fait que leur pièce incarne parfaitement les valeurs qu’elle défend.  En créant une pièce répondant à un besoin et en optant pour un discours humain et authentique, ainsi qu’en développant une proximité avec le public, le duo d’acteurs montre l’exemple.  Il s’agit d’une petite production locale se jouant dans une salle ne répondant pas aux normes du théâtre et dont les acteurs ne se préparent pas en coulisses, mais traînent en salle avant et après la représentation tout en discutant avec l’un ou l’autre spectateur.  Le duo a misé sur l’intimité, sur l’authenticité et sur l’humanité de ses spectateurs pour faire passer son message.

Pour aider le milieu agricole, le consommateur doit être sensibilisé.  Il doit se diriger vers une culture locale et saine.  Il doit réapprendre à considérer l’agriculture et la nourriture.  Nourrir l’humanité, c’est tout un métier porte en elle ce retour à l’homme, au contact direct, au naturel en somme. 

Maureen Dervaux
Mars 2013

crayongris2Maureen Dervaux est étudiante en 2e année de master en Arts du spectacle, finalité Spectacles et images numériques.