Le 15 juin prochain, une nouvelle salle permanente, dénommée TréZOOr, sera inaugurée à l’Aquarium-Muséum Universitaire de Liège, situé quai Van Beneden. Elle prendra place sur la mezzanine située à l’étage du péristyle d’entrée du bâtiment, là où était exposée jadis une collection de coraux. Le public, à partir du 16 juin, pourra venir admirer de véritables trésors, présentant un intérêt à la fois scientifique et pédagogique, mais aussi, avec le temps, artistique.
Prouesses artisanales, pièces très rares et traces d’espèces disparues seront ainsi exposées. Le tout agrémenté de capsules vidéo, de panneaux explicatifs en quatre langues et d’un futur accès pour les personnes à mobilité réduite. L’exposition retrace l’histoire des sciences naturelles de l’ULg. Elle pousse également le public à se questionner sur le rôle important joué par les musées et sur l’intérêt de conserver des objets anciens. Intéressons-nous donc à quelques pièces qui y seront présentées.
Carnet de voyage et aquarelle
Le comte de Castelnau (1812-1880) a vécu à l’époque des grandes explorations du 19e siècle. Lors de ses nombreux voyages à travers le globe, ce naturaliste français a découvert des centaines d’espèces jusqu’alors inconnues, dont un grand nombre de poissons. Une partie de ses carnets de voyage a été conservée ici, à l’Université de Liège.
« En plus de noter les caractéristiques des espèces qu’il découvrait, le comte prenait le temps de les dessiner à l’aquarelle », raconte Sonia Wanson, directrice-adjointe de l’Aquarium-Muséum et coordinatrice de TréZOOr, « il s’agit d’un travail scientifique et artistique remarquable. Aujourd’hui, un biologiste n’est plus capable de réaliser des dessins d’une telle précision ».
Des copies numérisées très fidèles aux originaux sont exposées, ce qui permet ainsi aux visiteurs de feuilleter ces fameux carnets d’explorateur du comte de Castelnau.
Embryons en cire
Le public peut également admirer la collection de modèles anatomiques en cire, qui pour la plupart datent de 1870. Ces modèles, utilisés dans un but pédagogique, représentent fidèlement, mais en très agrandi, des larves de plancton, d’acariens ou d’écrevisses, mais aussi des embryons humains !
Réalisés par Ziegler, « ces modèles embryologiques sont basés sur de très bonnes observations, à tel point qu’ils sont encore utilisables aujourd’hui », explique Marie Bournonville, assistante aux collections de l’Aquarium-Muséum, « pour preuve, on en a retrouvé certains dans le bureau d’un professeur qui les utilisait toujours dans les cours qu’il donnait aux étudiants ! On a réussi à le convaincre de nous les confier en lui proposant des copies de ces modèles, plus grandes et en plastique ».
Sotalie d’Édouard Van Beneden
Autre curiosité à découvrir : le spécimen-type d’une sotalie, un petit dauphin brésilien, découvert par Édouard Van Beneden, célèbre zoologiste de l’ULg. Mais qu’est-ce qu’un spécimen-type, me diriez-vous ? Il s’agit du premier individu observé d’une espèce jusque-là encore inconnue. « Posséder un spécimen-type, c’est un trésor d’une exceptionnelle valeur scientifique », se réjouit Sonia Wanson, « par exemple, des chercheurs actuels s’intéressent aux conséquences de la pollution sur l’organisme des dauphins, notamment en étudiant les os de ces animaux. Ce spécimen-type qui date du 19e siècle est étudié par ces scientifiques afin d’évaluer les dégâts sur ces espèces de la pollution des eaux en le comparant avec des spécimens actuels ».
Méduse en verre
Place maintenant aux pièces les plus incroyables qui orneront la nouvelle salle permanente : la collection des Blaschka.
Ces deux frères artisans ont réalisé, aux alentours de 1870, des modèles d’animaux marins en verre et en couleur d’une précision exceptionnelle. Les visiteurs peuvent notamment admirer des représentations de méduses plus vraies que nature. « À l’époque, Édouard Van Beneden avait besoin de modèles pédagogiques pour expliquer aux étudiants ce qu’étaient des invertébrés marins », raconte Sonia Wanson, « des animaux qui perdent leur forme dès qu'on les sort de l’eau ou qu'on les conserve dans le formol. Van Beneden s’est donc tourné vers les verriers Blaschka ».
À l’aide de verre filé et soufflé, ces frères résidant en Bohème réalisaient des modèles d’une qualité inégalable. « Ces deux artisans n’ont pas eu de descendance, et n’ont transmis leur savoir-faire à personne. Des verriers ont bien tenté par la suite d’égaler les Blaschka, sans succès », souligne Sonia Wanson. Des 77 modèles en verre commandés à l’époque par Van Beneden, 39 sont encore en état d’être exposés, après avoir été restaurés par Isabelle Pirotte. Une collection qui sera d’ailleurs très prochainement classée comme trésor du patrimoine par la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Et bien d’autres trésors
Sotalie, embryons, aquarelles et méduses en verre sont accompagnés d’une multitude d’autres pièces exceptionnelles. Parmi ces dernières, certaines sont exposées dans l’espace dédié aux espèces disparues du fait de l’activité humaine. Un loup de Tasmanie naturalisé est présenté au public, ainsi qu’une statue de dodo grandeur nature !
N’hésitez donc pas à franchir les portes de la nouvelle salle d’exposition permanente TréZOOr, bien qu’elles soient gardées par deux impressionnants lions taxidermisés...
Lucien Demoulin
Juin 2017
Lucien Demoulin est journaliste indépendant