Erri De Luca, Histoire d’Irène

DeLuca-IrèneErri De Luca recueille les histoires, il ne les invente pas ; les écrire demande tout au plus de les calquer. Il dit les cueillir de la vie comme les raisins des vignes, m’offrant un prétexte pour confondre une fois de plus les mots « récolte » et « recueil ». La langue italienne utilise le même nom pour dire l’une et l’autre. En français les deux diffèrent et on ne peut les mélanger sans erreur. Histoire d’Irène fait exception : en français comme en italien elle est une récolte d’histoires. Elle en contient trois, et une poésie.

D’après l’auteur les histoires sont un reste, comme le sel de la transpiration. De l’Histoire d’Irène je préfère imaginer qu’elle est un reste comme les embruns de sel marin : tous ses récits sont un hymne à la mer. Pour Erri De Luca, c’est une manière de remercier l’île de Lipsi qui l’a accueilli pendant les étés de jeunesse. Comme lui, dans le premier récit, Irène aussi rendra hommage à la mer en signe de gratitude. Sourde-muette sur terre, seule la population marine a su l’accueillir et l’écouter. Irène lui rendra le fruit de son ventre. Dans le calque de l’auteur, ce personnage semble porter la force antique d’une divinité et incarne l’alliance entre l’eau et la terre, les humains et les animaux.

Si la mer est un foyer adoptif dans Histoire d’Irène, elle représente la seule voie de sauvetage d’un groupe d’hommes protagonistes du deuxième récit, Le ciel dans une étable. Avec ces hommes le père de l’auteur entreprend la fuite vers Capri, terre libérée, pour oublier la guerre combattue dans les Alpes.

Une chose très stupide, troisième histoire, raconte un moment de bonheur offert par la mer de Naples à un vieillard déjà une fois sauvé par la puissance d’une vague pendant sa jeunesse.

Un poème de gratitude clôt Histoire d’Irène. Ses quelques vers, secs et brefs, sont déposés à la fin de ces histoires maritimes pour signaler le terme et signifier une reconnaissance à l’égard de la mer, élément salvateur et source d’histoires.


 

Jessica Borotto

Erri De Luca, Histoire d’Irène, Trad. Danièle Valin, Folio, 2017, 128p.
 

Lectures pour l'été 2017
Romans, nouvelles et récits romancés

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