Lola Lafon, La petite communiste qui ne souriait jamais

LafonCe roman de Lola Lafon est en réalité la biographie romancée de la célèbre gymnaste roumaine, Nadia Comăneci. On y découvre sa vie, au gré des entraînements intensifs dirigés d’une main de fer par son entraineur Béla Károlyi, de ses triomphes dont l’obtention de son fameux 10/10 aux jeux olympiques de Montréal en 1976, jusqu’à sa fuite aux États-Unis. Ce roman est aussi l’occasion de se pencher sur la dictature de Ceaușescu, à travers la manipulation par le dictateur de l’image de Nadia pour en faire un symbole de propagande. Le récit met surtout en scène une série de réécritures : celle de Lafon qui se réapproprie l’histoire de la gymnaste ; celle de tous les managers de Nadia qui transformeront son image à leur guise ; celle enfin de Nadia elle-même, qui s’affirmera comme maîtresse de son destin. Les récits se retrouvent donc au cœur de ce roman, et ce jusque dans le dispositif narratif mis en place par Lola Lafon : en effet, elle devient un personnage de son propre roman, envoyant fictivement les pages de sa biographie à une Nadia Comăneci fictive. Cette dernière lui donnera son avis, la corrigera, et, petit à petit, mènera sa propre dictature du récit en tentant de censurer la narratrice du roman que l’on est en train de lire. Ce dernier constitue donc une belle réflexion non seulement sur le sport et la politique, mais également sur les récits et la manipulation dont ils sont l’objet.

 

Clara Pastor

Lola Lafon, La petite communiste qui ne souriait jamais, Paris, Babel, 2015 [Actes Sud 2014]

 

Lectures pour l'été 2016
Storytelling et fictions contemporaines
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