Encensé par James Ellroy et Robert Crumb, Prix Révélation au Festival d’Angoulème 2014, Mon ami Dahmer retrace le parcours d’un des plus célèbres et sinistres tueurs en série de l’histoire des États-Unis (17 meurtres commis entre l’âge de 18 et 31 ans). La maîtrise et la justesse du trait de Backderf et la sobriété des dialogues en font une œuvre incontournable pour tout amateur de romans graphiques. 236 pages surprenantes et dérangeantes, à la froideur émouvante. Une plongée en apnée dans le monde de la folie et de l’horreur ordinaire, à commencer par celle qui est décrite dans les planches consacrés à l’adolescence de Dahmer (ado solitaire à l’homosexualité refoulée et collectionneur de cadavres d’animaux) et au contexte familial (père froid et distant, mère dépressive et dopée aux médicaments).
Qu’on ne s’y méprenne pas : il ne s’agit pas de réhabiliter un tueur psychopathe ou de susciter de l’empathie envers quelqu’un qui s’est rendu coupable des pires atrocités. Bien que Derf Backderf ait fréquenté Dahmer pendant ses années de lycée, il ne prétend pas nous livrer toutes les clés d’interprétation de cette descente aux enfers. Tout au plus se permet-il de souligner l’impardonnable et incompréhensible indifférence du monde des adultes à l’égard de celui qui a répandu le malheur autour de lui pendant plus d’une décennie. Sa conclusion ? « Ayez de la pitié pour lui mais n’ayez aucune compassion ».
Michel Delville
Derf Backderf, Mon ami Dahmer, Trad. Fanny Soubiran, Éditions Çà et Là, 2013, 236 p.< Précédent I Suivant >
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