Consommation d’insectes : quels comportements alimentaires ?

burgerBurgers aux insectes : pas mauvais

De par leur richesse en protéines, les insectes pourraient être considérés comme des substituts de viande. Les différentes problématiques rencontrées par la viande durant cette dernière décennie telles que l'encéphalopathie spongiforme bovine, les épidémies d'Escherichia spet de Salmonella sp., le traitement parfois brutal du bétail et la contribution de l'élevage au réchauffement climatique ont suscité, chez les consommateurs, un intérêt croissant pour les substituts de viande. Cette tendance se ressent dans certaines grandes surfaces où la vente de produits végétariens ne cesse d’augmenter. L'acceptation de la plupart des substituts de viande reste néanmoins encore faible. Cette faible attirance est due à plusieurs facteurs comme la récente apparition de ces produits, leur faible appel sensoriel, leur méconnaissance ou encore une certaine néophobie. Un substitut de viande idéal est un aliment assurant un apport nutritionnel comparable à la viande mais ce paramètre nutritionnel, n’est pas le seul à prendre en considération. L’acceptation de ce type de produit est tributaire de sa commodité (e.g. même place au sein du repas, même technique de cuisson), de son attrait sensoriel (e.g. apparence, texture ou saveur) et de sa fréquence de consommation.

burgers

Suite à ces différentes constatations, nous avons décidé de mener une nouvelle analyse sensorielle portant sur l’acceptation de burgers à base de vers de farine au sein d’une population de jeunes adultes (de 18 à 25 ans). Deux types de burgers ont été réalisés : le premier était richement carné et se composait de viande hachée de bœuf et de vers de farine alors que le second se voulait plus végétal et était composé de lentilles et de vers de farine. Les proportions d’insectes ajoutés ont été calculées dans la premier burger afin d’atteindre une équivalence protéique au steak haché 100% pur bœuf et, dans le second burger, dans le but de corriger le déficit en acide aminé soufré des lentilles. Au final, quatre burgers, possédant la même aromatisation, ont été présentés aux consommateurs : un burger uniquement composé de bœuf, un burger composé de bœuf et de vers de farine, un burger composé de lentilles et un burger composé de lentilles et de vers de farine. Un classement d’appréciation globale a été réalisé sur une échelle de 1 à 9 et ce dernier place les deux burgers aux insectes (cotation de 6 sur 9) à une position intermédiaire entre le burger de bœuf (7 sur 9) et le burger végétal (5 sur 9).

 

Six pattes et si délicieux

recettesEn plus de cette néophobie alimentaire de l’insecte, un obstacle au développement de l’entomophagie est le manque de méthodes d’intégration de ces derniers dans une alimentation dite «  de tous les jours ». Trop de personnes pensent encore que les insectes doivent être consommés crus, voire même vivants. Or de longue date, les insectes sont cuits, grillés ou bouillis avant d’être mangés « nature » ou intégrés dans des préparations culinaires plus complexes.

sixpattessidelicieuxcombyActuellement, il existe plusieurs livres spécialisés disponibles en français sur le sujet comme « Délicieux insectes » de Bruno Comby, « Délicieux ! 60 recettes à base d'insectes » de Romain Fessard ou encore « Six pattes et si délicieux » de Rudy Caparros, Éric Haubruge et Frédéric Francis. Cependant, encore aucun livre de recettes classiques n’intègre, dans ses chapitres, une recette à base d’insectes ! De plus, on remarque aisément que les auteurs de livres de recettes à base d’insectes se sentent obligés de mettre l’accent sur les qualités gustatives des insectes puisque le terme « délicieux » est utilisé afin de convaincre le consommateur de cuisiner des insectes. L’éducation et la conscientisation de cette pratique jouent un rôle important.

Changer le vocabulaire

Finalement, le terme « entomophagie » représente un concept relativement barbare et repoussant ! Simplement avancer des arguments portant sur les bénéfices pour la santé du consommateurs ou l’environnement pourrait s’avérer insuffisant dans la rupture des barrières psychologiques. Afin de promouvoir correctement les insectes comme des aliments à destination humaine, il est important de tenir compte du fait que la nourriture est l’expression d’une identité personnelle et culturelle. En effet, la nourriture est un point essentiel de nos relations sociales autant personnelles que professionnelles. Utiliser le mot « insectes » ou « vers de farine » amène constamment le consommateur vers la vision négative des insectes et l’empêche donc de les considérer comme un aliment. L’utilisation de mot en langues étrangères telles que des « Chapulines » ou des « Chicatanas », respectivement des criquets du genre Sphenarium et des fourmis ailées du genre Atta en mexicain pourraient faciliter leur intégration dans notre alimentation occidentale. Ce type de vocabulaire pourrait faire rentrer les insectes dans la catégorie des aliments ethniques et par conséquent, diminuer la néophobie alimentaire associée.

 

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