Gauguin, Picasso et Ensor sous l'oeil de la science
Il est intéressant de définir la palette d'un artiste et de voir si celle-ci connaît une évolution. L'utilisation combinée de la fluorescence X et de la spectroscopie Raman a permis d'identifier la plupart des pigments. On observe que les trois artistes utilisent un nombre assez restreint de pigments qu'ils préfèrent éclaircir au blanc de plomb afin d'obtenir une autre teinte.
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Fig.2: Photographie en lumière blanche et réflectographie infrarouge des tracés préparatoires au niveau des jambes du sorcier d'Hiva Oa © Centre Européen d'Archéométrie, Université de Liège. | Fig.3: Comparaison des oiseaux figurés dans le Sorcier d’Hiva Oa (à gauche) et dans D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? © Centre Européen d'Archéométrie, ULg |
Beaucoup de couleurs sont ainsi le résultat d'un savant mélange. Pour mieux connaître la technique d'exécution de l'artiste, l'archéomètre s'intéresse au support de la peinture, la préparation utilisée, la mise en place de la composition et l'écriture picturale de l'artiste. Sur Le sorcier d'Hiva Oa de Paul Gauguin, les tracés préparatoires sont restés visibles dans la composition finale (fig.2). En observant l'oiseau présent sur ce tableau et en le comparant avec d'autres réalisés antérieurement par Gauguin, on voit que le tracé est plus flou et hésitant (fig.3). Cette perte de précision pourrait être liée aux symptômes de la syphilis dont il était atteint. L'oiseau du Sorcier d'Hiva Oa a été identifié par un cryptozoologue. Il s'agirait d'un cousin du Takahe de Nouvelle-Zélande.
Fig.4: Détail de la nappe du pique-nique de La famille Soler montrant les traits réalisés à sec dessinés à même la préparation© Centre Européen d'Archéométrie, Université de Liège.
Pablo Picasso pour la Famille Soler a choisi de croquer directement au pinceau les personnages du tableau. Il a aussi utilisé la blancheur de la couche de préparation pour réaliser la nappe qu'il a modelée par quelques traits de fusain (fig.4).
L'analyse de l'écriture picturale de James Ensor pour La mort et les masques reflète bien sa touche expressive. La couche picturale est très inégale (fig.5). Dans certaines zones, la peinture a été appliquée rapidement en couche fine à travers laquelle il est possible de distinguer la texture de la toile. Des empâtements créent un relief irrégulier à la surface du tableau. Les tableaux présentés lors de l'exposition sont très différents tout comme la manière dont ils ont été réalisés.

© Centre Européen d'Archéométrie, Université de Liège.
Les analyses archéométriques ont fait bien d'autres découvertes que vous pourrez découvrir face aux œuvres, le catalogue d'exposition à la main.
Anne Peters
Octobre 2014
Anne Peters est étudiante en 2e année de master en Archéométrie.
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