Exposition Stephan Balleux : La peinture et son double sèment le trouble

Quand la matière dégouline d’un tableau et que la peinture brouille les limites entre réalité et illusion, l’artiste belge Stephan Balleux ne doit pas être bien loin. En l’occurrence, c’est au musée d’Ixelles qu’il se produit en ce moment sous le commissariat de Dominique Païni. L’exposition intitulée La peinture et son double vous fera vivre un rêve en noir et blanc, une expérience esthétique où le beau ne peut exister sans terreur.

 

« Stephan Balleux remet au premier plan la peinture et l’artiste »

2009Artiste pluridisciplinaire, Stephan Balleux s’intéresse au dessin, à la peinture, à la sculpture mais aussi au multimédia, et avant tout, au cinéma. À la manière d’un magicien, il brasse ces différents médias pour semer le trouble chez le spectateur. Il reproduit des images archétypales déjà créées et joue avec elles, ajoute, modifie, déploie, déforme la matière jusqu’à donner naissance à de nouvelles formes étranges tout en leur insufflant un nouveau sens. Ses tableaux, parfois sous l’allure de portraits « archimboldesques », comme aime à les qualifier Dominique Païni, questionnent l’image, la peinture, mais aussi, son double, « l’infime limite entre la présence et l’absence, la dialectique entre le présent et le passé ». Ce « paintingpainting » ainsi nommé par Stephan Balleux est un travail captivant, consistant à « peindre la peinture, à reproduire son image, son double ». Cette fascination pour l’image, sa reproductibilité et l’intérêt qu’il porte au travail plastique, lui permettent, comme le dit Bérénice Demaret, responsable presse et communication du musée d’Ixelles, « de remettre au premier plan – à l’heure du boom numérique et de la surabondance d’images – la peinture et l’artiste » !

 

Stephan Balleux, The wanderlust appreciation society, 2009
© Courtesy Stephan Balleux, photo Ornella La Vaccara, Bruxelles 2014

 

 

 paintingpainting

Stephan Balleux, Paintingpainting #16, 2005 © Courtesy Stephan Balleux, photo Kurt Deruyter, Bruxelles 2014

 

Il joue avec l’incertitude de la vision

À côté des sculptures mêlant le précieux de la porcelaine et le caractère brut des formes dégoulinantes, les peintures de Stephan Balleux défient les frontières de la représentation et de la perception. À chaque image est donné un sens nouveau selon les spectateurs. Chacun regarde l’œuvre à sa manière, met au point sa vision et découvre, au fil des accommodations, des dessins dans les dessins comme une sorte de mise en abîme, un ouroboros qui fait de la toile un entre-deux mondes fascinant et dérangeant à la fois. Cet univers  « singulier et pourtant familier » selon Bérénice Demaret est un jeu de travestissement du réel où la vanité du monde se joue entre le net et le flou. Stephan Balleux, par ses toiles d’un surréalisme résolument belge, prend le pari de ne pas en montrer de trop, mais de montrer plutôt, le quasi-rien de la peinture.

portraitEn collaboration avec Dominique Païni, commissaire de l’exposition, Stephan Balleux fait du noir et blanc un filon permettant de dramatiser l’arrivée de la couleur et de faire de celle-ci le phare esthétique de l’exposition. Cette conception vient exclusivement du commissaire, très inspiré par la toile the portrait (2007) de Stephan Balleux lui rappelant le film d’Albert Lewis, The picture of Dorian Grey (1945), où seul le portrait du protagoniste est en couleur. Le leitmotiv noir et blanc ne manquera pas de vous téléporter dans un espace-temps inconnu et mystérieux, mais sachez qu’il met avant tout en lumière la passion partagée des deux hommes pour le cinéma et l’histoire de l’image, dont la peinture est le premier média.

 

Stephan Balleux, the portrait, 2007
© Courtesy Stephan Balleux, photo Kurt Deruyter, Bruxelles 2014

 

Panorama, une performance

Panorama est une toile de dix-huit mètres de long dédoublée, longeant de part et d’autre le centre de l’espace d’exposition. Elle a été commandée expressément dans le cadre de cet événement comme une sorte « d’hommage avant la rétrospective » selon l’artiste, un panorama fidèle à cette idée de double que les toiles viennent refléter à la manière d’un miroir déformant. Les propos de Stephan Balleux révèlent la façon dont il aborde son travail : « Ce qui m’a amusé le plus, c’est le temps qu’il m’a fallu pour réaliser ce travail. Cette œuvre est pour moi une pièce-peinture-architecture-sculpture, elle est tout à la fois mais avant tout, elle est une performance. Je la qualifie comme telle car le spectateur ne peut pas embrasser Panorama d’un seul regard. Non seulement il doit se déplacer pour voir la toile, mais en plus, il doit accommoder sa vision à cause du flou et du net. Il doit également comparer les points de vues entre eux, innombrables sur la longueur et plus ou moins similaires les uns face aux autres. Le spectateur est actif. »

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Stephan Balleux, Panorama, 2014 © Courtesy Stephan Balleux, photo Ornella La Vaccara, Bruxelles 2014

 

Pour celles et ceux qui n’auraient pas eu l’occasion d’assister au vernissage du 25 juin, d’autres activités sont proposées tout au long de cette exposition qui se déroulera jusqu'au 14 septembre 2014. Nocturnes, apéros artistiques, workshop créatifs et stages permettront à tous les publics de participer à des activités variées – en collaboration avec le musicien Cédric Dambrain notamment ce 10 juillet – et de discuter avec Stephan Balleux, « l’un des plus brillants de sa génération dans ce bien petit pays », selon le commissaire, on ne peut plus admiratif. Les occasions ne manqueront pas, venez nombreux !

 

Ornella La Vaccara
Juillet 2014

crayongris2Ornella La Vaccara est étudiante en 1re année de master en Histoire de l'Art et Archéologie


 

Exposition Stéphan Balleux, La peinture et son double
Jusqu'au 14 septembre 2014

Musée d’Ixelles – Museum van Elsene
Rue Jean van Volsem, 71, 1050 Bruxelles

www.museedixelles.be

Programme complet des événements, animations et visites guidées disponible en ligne sur www.museedixelles.be rubrique Activités.