Fonck. Couvent, caserne, école : les vieux murs d’une nouvelle faculté d’architecture

Un ancien couvent devenu caserne

En fait, le site originel de la caserne est un ancien couvent posé sur une petite île formée par la Meuse et l’un des nombreux bras de l’Ourthe qui confluait en ces lieux avant les grands travaux d’assainissement et de rectification des cours d’eau entrepris au 19e siècle. C’est là qu’un petit prieuré, affilié à l’ordre français du Val-des-Écoliers, est signalé en 1231. Initialement situé hors les murs de la cité, en Outre-Meuse, le domaine est ensuite ceinturé par une extension des murailles entreprise à la fin du 13e siècle ; les courtines, bordées par les eaux, sont renforcées ultérieurement par des bastions dont le nom wallon de balwér, ou balloir, est resté inscrit dans la toponymie locale. Entre ville et campagne, la situation est plaisante pour le petit prieuré devenu couvent en 1614 ; Saumery, dans ses Délices du Païs de Liége, rapporte en 1738 que « la maison est bien bâtie et tous les appartements en sont riants ; leur situation ne contribue pas peu à leur donner cet agrément. La Meuse, et l'Ourthe, qui forment de cette Maison une espèce d'Ile, sont deux charmants objets pour ceux qui y font leur séjour. Ils sont, proprement parlé, à la campagne, et à la ville, mais ils voient l'une et l'autre du même coup d'œil. Il témoigne aussi que le cloître, qui communique à l’église, est propre et solidement voûté (…) L’église est assez grande, mais la décoration en est beaucoup plus simple

Le couvent des Écoliers se montre plutôt prospère jusqu’à la réquisition militaire entreprise lors de la Révolution de 1789. Les bâtiments conventuels qui subsistent attestent cette prospérité perdue. Au centre de la cour, élevé en brique et calcaire, le bâtiment principal a connu plusieurs remaniements. Il présente aujourd’hui au rez-de-chaussée, dans un haut soubassement appareillé en calcaire, des baies à linteau courbe à clé et un portail millésimé 1731 ; la grille en fer forgé affichait naguère les armoiries de l’abbé Chervin-Rivière accompagnées par la crosse et la mitre. Les deux étages, en brique, présentent un caractère plus mosan (et plus archaïque) avec des baies à linteau droit et des bandeaux de pierre au niveau des seuils. On retrouve ce même caractère mosan dans une aile secondaire, perpendiculaire, entièrement appareillée en brique.

couvent portail couvent chapitre

Bien que profondément transformé au 18e siècle pour offrir sa physionomie actuelle, le bâtiment continue d’abriter un rare témoin de l’architecture gothique du 14e siècle, l’antique salle capitulaire, aux six voûtes à nervures construites en tuffeau ; au fond de cette salle subsistent les vestiges d’une baie gothique aux piédroits moulurés et à colonnettes engagées surmontées de chapiteaux à bouquets ; l’arc brisé des autres baies originales est encore visible à l’intérieur, même s’il n’est plus perceptible dans la façade refaite au 18e siècle. Un autre souvenir de l’époque gothique subsiste ailleurs, dans le sommet du pignon nord élevé en tuffeau, avec la trace d’ouvertures ogivales aujourd’hui murées.

Ecoliers250Une église gothique de belle ampleur, précédée d’un parvis — le Parvis des Écoliers —, jouxte initialement le couvent ; des traces archéologiques, découvertes fortuitement et interprétées par Patrick Hoffsummer, laissent supposer qu’elle aurait été édifiée au 13e ou au 14e siècle mais, menaçant ruine, elle est détruite en 1810. Le cloître et quelques bâtiments secondaires connaîtront le même sort en 1832 pour faire place à des écuries et logements de troupes.

entrée manège 1900Sécularisé à la Révolution, le couvent est reconverti en hôpital de campagne et en caserne : il devient  l’« Hospice de l’Égalité » puis accueille des troupes de cavalerie qui reçoivent même, en 1803, la visite de Bonaparte, alors Premier Consul. Les bâtiments conventuels se montrent évidemment peu appropriés à leurs nouvelles fonctions et les nouveaux occupants, qui logent même des chevaux dans la salle capitulaire, ne sont alors guère soucieux de patrimoine ; actuellement, un plancher surélevé masque la base des colonnes qui auraient été endommagées par le piétinement des chevaux.

 

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