De 1961 à 1984, Claude Strebelle lie son nom à celui de l'Université de Liège. Dès la fin des années 1950 quand le projet de déplacement de ses infrastructures du centre-ville vers le Sart Tilman est lancé, les autorités décident qu'un seul bureau ne pourrait prendre en charge la totalité de l'opération. L'intention est de désigner un urbaniste non seulement pour l'élaboration d'ensemble mais aussi pour une mission de coordination des différents architectes appelés à intervenir. Le choix se porte sur Claude Strebelle remarqué par le Recteur Marcel Dubuisson pour la qualité de ses réalisations au Congo. Dès 1961, il est engagé afin de réfléchir sur le plan de zonage. C'est à cette époque qu'il fonde l'Atelier du Sart-Tilman. Quatre ans plus tard, le Conseil d'Administration de l'ULg le nomme urbaniste et architecte du domaine. Les auteurs de projet des premiers bâtiments sont désignés avec son aide : Roger Bastin, le groupe EGAU, Pierre Humblet, André Jacqmain, Jean Maquet, Charles Vandenhove, Henri Lacoste ou Jean Opdenberg. Lors de la première phase d'aménagement dans les années 1960, Strebelle construit peu. Il signe quelques édifices comme l'atelier d'architecture (1963), la centrale de chauffe (1968) ou le poste central de commande (1968). Mais, avant tout, il se tient à son rôle d'urbaniste-coordinateur afin, selon ses propres mots, de « laisser la liberté à chacun en leur parlant uniquement du problème d'ensemble ». Avec le temps, sa position évolue. « Au départ, moi, le coordinateur, je me sentais un peu comme le bon Dieu [...] Maintenant quinze ans après, je m'aperçois qu'il n'y a pas moyen de coordonner l'architecture des autres. Ce que l'on peut faire, c'est susciter des idées, des pensées, apporter l'expérience du domaine, croire à ceux à qui on a confié des missions de créateur, mais non donner l'inspiration. Par contre, en dessinant moi-même et en intégrant mes projets parmi les autres, l'échange devient plus direct, plus concret ». Dès le début des années 1970, l'Atelier du Sart-Tilman prend ainsi en charge de nombreux édifices : les Halls de Métallurgie (1971), le SEGI (1974), les Instituts de Paléontologie, Minéralogie, Géologie (1973), l'extension de l'Institut de Chimie (1979), la Faculté de Droit, Economie et Sciences sociales (1981) et l'Institut de Psychologie et des Sciences de l'Education (1982).
L'Université ne confie à Strebelle qu'une seule construction importante à l'étranger : la Station de Recherches sous-marines et océanographiques (STARESO) de Calvi, en Corse. Achevé en 1971 après quatre ans de gestation, le projet répond à un programme simple : l'aménagement de structures pour le stockage, de deux laboratoires et des locaux nécessaires à la vie d'une équipe scientifique. C'est un édifice fonctionnel d'une grande qualité de vie ; l'élévation est ainsi conçue pour protéger les occupants des vents violents et les murs les préservent d'un soleil trop ardent. Véritable manifeste des conceptions esthétiques de son auteur, le bâtiment témoigne de l'importance accordée aux composantes sensibles de l'architecture. Comme dans la plupart de ses constructions, Claude Strebelle travaille à obtenir un caractère plastique affirmé et une haute qualité d'intégration au milieu. L'implantation « disloquée » du complexe s'adapte parfaitement au profil du front de mer, comme les matériaux (béton, pierre extraite de la roche native, ciment) s'harmonisent à la nature environnante. Le complexe est aujourd'hui encore tout à fait fonctionnel. Géré depuis 1989 par la s.a. Stareso, il poursuit ses missions de recherches et d'enseignement ; sa vocation pédagogique à l'origine réservée aux universitaires s'est d'ailleurs étendue aux secteurs primaires et secondaires. S'y ajoutent toute une série d'activités, notamment à l'attention des collectivités locales auxquelles la station propose ses services d'expertise et d'études.
Photo © Anne Goffart
Pierre Henrion
Mars 2009
Pierre Henrion est historien de l'art, il enseigne à l'E.S.A-Académie des Beaux-Arts de Liège et est l'un des trois conservateurs du Musée en plein air du Sart Tilman.