Inaugurée le 18 septembre 2009, la nouvelle gare des Guillemins a pris sa place dans le réseau à grande vitesse nord-européen. Quand, en 2010, tous les chantiers reliant la Belgique à ses voisins seront achevés et toutes les nouvelles lignes mises en service, une douzaine de villes importantes seront en connexion rapide : la Cité ardente sera à 40 minutes de Bruxelles-Midi, à 2 heures de Paris et de Francfort, à 3 heures de Londres.
Liège-Guillemins occupera par ailleurs une place centrale au sein de l'Euregio Meuse-Rhin : avec ses nouvelles infrastructures, elle sera gare-relais pour deux grandes villes de l'espace eurégional : Hasselt en Limbourg belge et Maastricht en Limbourg hollandais. On comprend la taille des enjeux qui se nouent autour de la modernisation des installations liégeoises, sur le plan technique bien sûr mais également symbolique. Il fallait pouvoir signifier le nouveau dynamisme de la ville. Et, très tôt, on prévoit, pour rencontrer cet objectif, de confier l'édification de la gare à un architecte actif sur le plan international.
L'ancienne gare de 1958
C'est une filiale de la SNCB-Holding qui est mandatée pour étudier et construire la nouvelle gare. Créée en 1993, la s.a. Euro Liège TGV se spécialise dans l'étude technique, le suivi et la réalisation de projets architecturaux et ferroviaires (infrastructures, terminaux, cabines de signalisation, centres logistiques...). Sous sa houlette, une importante phase d'études du site est entrepise. Elle prend en compte un tronçon de 2,5 km incluant la gare en place.
D'une manière générale, il s'agit de moderniser les infrastructures pour être à même d'accueillir les trains à grande vitesse et leur clientèle dans des conditions optimales. Dès 1995, les conclusions de l'étude de faisabilité laissent apparaître l'obsolescence des installations en activité depuis 1958. Ces bâtiments ne sont cependant pas sans qualité. Devenue nécessaire au moment de l'électrification des lignes, la gare construite sur un complexe datant de 1863 symbolise une volonté progressiste très porteuse à Liège dans la seconde moitié des années 1950. Les architectes du groupe EGAU qui la dessinent figurent d'ailleurs parmi les auteurs de projet les plus talentueux du modernisme en Belgique. Ils conçoivent notamment la Cité de Droixhe, considérée comme un des ensembles d'habitations sociales les plus aboutis du pays. Le bâtiment des Guillemins est mal entretenu et fort dénaturé par des modifications et ajouts anarchiques. Son intérêt architectural s'amoindrit dès les années 1970. Et, de toute façon, les défauts qu'il présente par rapport aux exigences contemporaines de la circulation ferroviaire à grande vitesse sont insurmontables : morphologie des quais courbes trop courts et trop étroits, désuétude de l'accueil des voyageurs, nombreux cisaillements de voies... La gare et le tri postal qui la prolonge doivent être détruits ; ils disparaissent au cours de l'été 2007.
Un atout maintenu : l'arrivée en ville
Le site par contre est maintenu. Sa localisation à proximité du centre ville apparaît comme un atout déterminant. L'option d'exurbanisation des installations est vite abandonnée. Il y aura des voix pour plaider en faveur de la mise au point d'une plate-forme multimodale (train + train à grande vitesse + transport routier + avion) à Bierset mais elles ne seront pas entendues. Heureusement sans doute : l'exemple de la gare de Satolas, à proximité de Lyon, qui est conçue sur ce modèle - par le même architecte que celle de Liège - et qui n'a jamais fonctionné de façon optimale, devrait suffire à donner un contre-argumentaire explicite.
On ne reconstruit pourtant pas sur les fondations des bâtiments de 1958. Les études montrent en effet que l'axe de la nouvelle gare doit être établi à 150 mètres de celui de l'ancienne, vers la Meuse. Cette disposition apporte une solution à un double problème : il fallait d'une part pouvoir aménager des quais rectilignes plus longs et plus larges et ce afin de faciliter l'accès des trains ainsi que l'embarquement des voyageurs ; il fallait d'autre part être en mesure d'établir une liaison harmonieuse avec le réseau autoroutier tout proche.
Cette décision permet en outre de maintenir les installations en activité pendant la construction des nouvelles infrastructures. On devait en effet pouvoir poursuivre l'exploitation quotidienne et faire coexister la circulation ferroviaire et le déroulement du chantier. Ce dernier s'ouvre au milieu des années 1990 avec les travaux pour une nouvelle cabine de signalisation en bord de Meuse.
Le chantier pour le bâtiment de la nouvelle gare démarre quant à lui en 1999 avec le dégagement du site. Le plus impressionnant reste sans aucun doute la construction de la voûte et des passerelles qui sont réalisées selon une technique de poussage : les éléments assemblés sont déplacés progressivement au-dessus des voies. Le premier ensemble de cinq arcs et des tronçons de deux passerelles sur lesquelles ils prennent appui est poussé au-dessus des voies fin mai 2005. La dernière opération de poussage de l'ensemble de la structure est réalisée en juin 2006. Le reste du chantier s'enchaîne alors jusqu'à l'aménagement des abords qui se termine à l'automne 2009.
