Les Primitifs flamands à Liège
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À l'invitation du très prestigieux Centre d'étude de la peinture du XVe siècle dans les Pays-Bas méridionaux et la Principauté de Liège, Dominique Allart vient de publier un recensement des œuvres qui représentent un témoignage de la tradition des Primitifs flamands dans les collections publiques liégeoises. Bien plus qu'un répertoire, cet ouvrage, richement illustré, comporte les descriptions techniques, iconographiques, une analyse historique, accompagnées quelquefois d'une discussion sur l'authenticité ou la datation, qui font appel à des techniques  d'archéométrie. 

L'art des Primitifs flamands a exercé, tout au long du XVe et encore au XVIe siècle, une influence notable dans toute l'Europe occidentale. Les tableaux des grands peintres étaient des modèles qu'il convenait d'imiter. Les 44 œuvres recensées ici témoignent plus ou moins clairement du rayonnement qu'ils ont exercé. Elles apportent aussi de précieuses informations concernant les pratiques religieuses et sociales, les événements historiques, la vie quotidienne... Peu d'entre elles rendent compte d'une production locale, sans doute décimée par les destructions successives, notamment celles que perpétrèrent les troupes de Charles le Téméraire et les armées de Louis XIV, sans compter les pertes consécutives à la Révolution liégeoise.

 

Sans conteste, l'œuvre la plus remarquable de l'ouvrage est La Vierge à l'enfant avec Marie-Madeleine et une donatrice, exposée au Grand Curtius, datant de la fin du XVe siècle et dont la composition rappelle notamment une œuvre de Jan van Eyck.  Fait rare, la donatrice, qui n'a pas pu être identifiée,  - une femme, laïque, représentée sans mari ni enfants -,  se tient à genoux, faisant face à la Vierge, dans une proximité très inhabituelle pour l'époque. Le tableau est par ailleurs riche d'éléments iconographiques à portée symbolique.    

 

 


La Vierge au papillon

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L'œuvre la plus ancienne est un tableau épitaphe de Pierre van der Meulen, doyen de la collégiale Saint-Paul, décédé en 1459. C'est un des rares vestiges d'un type de monument

funéraire courant au XVe siècle, qui associait une pierre tombale (encore en place dans la cathédrale) et un tableau représentant le défunt en prière. Seule œuvre ayant survécu au sac de Liège en 1468, elle revêt donc une importance toute particulière.

Comme toutes les peintures de l'époque, elle est riche de nombreux symboles et allusions, que les contemporains comprenaient facilement, mais qui nécessitent aujourd'hui les explications des historiens de l'art. Ainsi, des détails iconographiques évoquent le doyen défunt, sa vie terrestre et son espoir de félicité dans l'au-delà. Le papillon, présenté à l'enfant Jésus, symbolise la résurrection et annonce donc l'avenir du Christ, mais aussi la vie éternelle qu'espère le défunt. Le choix des saints représentés, reconnaissables par leurs attributs - l'épée de Paul, la clé de Pierre, le vase à onguent de Marie-Madeleine -, de même que les livres, sont des éléments compréhensibles pour qui connaît Pierre van der Meulen.

Dans le cadre d'un mémoire de licence en Histoire de l'Art, sous la direction de Dominique Allart, Pascal Heins a pu analyser cette œuvre. Il a bénéficié, pour la circonstance, de l'apport de différentes techniques d'archéométrie : dendrochronologie, radiographie, réflectographie infrarouge, analyse par méthode PIXE. Il ressort de ces investigations que le bois du support provient d'un chêne de nos régions abattu en 1445, que les pigments sont conformes à ce que l'on connaît de la palette du XVe siècle, mais que le cadre a été repeint et le fond doré refait vraisemblablement au XIXe siècle. L'étude rend aussi assez vraisemblable l'hypothèse selon laquelle ce tableau aurait été réalisé dans un atelier liégeois au milieu du XVe siècle.

 


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