Éloges unanimes de la critique musicale pour Musique en Wallonie
Moisson de récompenses pour Musique en Wallonie : la firme dédiée au patrimoine musical de nos régions, qui vient de fêter son 40e anniversaire en 2011 et de sortir six nouvelles productions à cette occasion, se voit reconnue comme jamais par la critique internationale. L'université de Liège qui l'abrite en tire une légitime satisfaction.

Si les expressions artistiques héritées du Moyen Âge et des Temps modernes bénéficient aujourd'hui d'une réelle visibilité en Wallonie – avant tout en architecture, sculpture et peinture –, il n'en  va en général pas de même pour la musique. Un nom tel que celui d'André-Modeste Grétry (1741-1813) demeure certes connu du grand public, mais ce n'est certainement pas le cas d'un Pierre de la Rue (1450-1518),  d'un Roland de Lassus (ca. 1531-1594) ou d'un Joseph-Hector Fiocco (1703-1741), tous trois originaires de nos contrées et qui ont fortement marqué l'histoire de l'art musical. Raison pour laquelle, fidèle à sa volonté première de défendre un patrimoine local, Musique en Wallonie a tenu à mettre ces trois compositeurs de talent à l'honneur pour son 40e anniversaire fêté l'an dernier.

Un patrimoine revisité sans a priori

jlwertz-®christophe.pirenne-006« Nous sommes organisés en ASBL dont le siège est à l'université de Liège, précise son administrateur délégué Christophe Pirenne, mais son conseil d'administration comprend les universités francophones et néerlandophones du pays. Notre équipe, formée de musicologues, chercheurs et animateurs du monde musical, ne tient donc pas à se laisser contaminer par des discours régionalistes stérilisants, du reste totalement étrangers au champ d'investigation scientifique qui est le sien. D'autant que par rapport à la découpe Nord-Sud de la Belgique prévalant de nos jours, celle qui avait cours dans un passé plus ou moins lointain suivait plutôt une ligne Ouest-Est : les comtés de Hainaut et de Flandre sont alors dans l'orbite de la France, Bourgogne comprise, tandis que la principauté de Liège est inscrite dans l'ensemble du Saint-Empire romain germanique. Le piège de l'anachronisme, comme d'habitude,  est facteur des pires dérives. » Dans cet ordre d'idées, il n'est pas inutile de rappeler que la musique qui s'impose de la fin du14e au 16e siècle dans la plus grande partie de l'Europe, où les cours s'arrachent les maîtres de chapelle, est dite « flamande », expression purement conventionnelle et non réservée aux seuls pratiquants de la langue de Vondel.  

 Par ailleurs, il existait une grande mobilité chez les compositeurs de la fin des temps médiévaux et de la Renaissance, et ce jusqu'à l'orée de l'âge classique. Pierre de la Rue par exemple, né vraisemblablement à Tournai et mort à Courtrai, visite durant ses années de service à la maison de Bourgogne quantité des territoires de celle-ci avant de parcourir les contrées germanophones des Habsbourg sous l'empereur Maximilien et, sous le règne de son fils Philippe le Beau, de se rendre en Espagne. Le Montois Roland de Lassus pour sa part, dont le nom fut très tôt italianisé en Orlando di Lasso, se retrouve dès son adolescence à Palerme avec le vice-roi de Sicile Fernando Gonzaga, puis à Milan, Naples, Rome, avant qu'il ne gagne par la suite l'Angleterre et les Pays-Bas et, in fine, Munich où il mourut après une prestigieuse carrière européenne. Il n'est guère que Joseph-Hector Fiocco d'ascendance vénitienne, né et mort à Bruxelles, qui soit resté sédentaire  pendant sa brève existence, en dépit d'un séjour à Anvers.

Ces renseignements de nature biographique, relatifs aux trois compositeurs retenus, et bien d'autres de caractère historique et artistique figurent – en français, néerlandais, anglais et allemand – dans les élégants petits livres accompagnant les CD. Historiens, musicologues et linguistes ont contribué à la qualité de ces textes, eux-mêmes agrémentés d'illustrations choisies avec soin par des historiens de l'art. « Nous bénéficions des compétences des chercheurs de l'ULg, se réjouit Christophe Pirenne. Et, le cas échéant, quand le besoin s'en fait sentir, nous faisons appel à des spécialistes d'autres universités. Le système que nous avons mis en place paraît donc bien fonctionner. »

 

Une reconnaissance internationale

 Comment ne pas en être persuadé au vu de l'avalanche de récompenses que les six nouvelles productions de Musique en Wallonie viennent de recevoir ? Place au Diapason d'or d'abord, décerné par le magazine français Diapason d'avril 2012 au Portrait musical de Pierre de la Rue, un coffret trois CD composé d'inédits et de rééditions : la Capilla Flamenca y interprète quatre messes, cinq motets, un magnificat et trois chansons ; le magazine Gramophone, publié à Londres et à la diffusion internationale, lui a attribué, lui aussi en avril, un précieux Award. Place au « Choc de la Musique » ensuite, délivré en mars 2012 par le périodique Classica à la Biographie musicale vol. I : Années de jeunesse de Roland de Lassus, un CD comprenant  madrigaux, motets, chansons et villanelles interprétés par Ludus Modalis ; après ces pièces de jeunesse, quatre autres anthologies suivront le parcours musical du célèbre Orlando. Place enfin au Diapason Découverte, du mensuel d'avril du magazine Diapason déjà nommé, qui échoit aux Petits motets de Joseph-Hector Fiocco : sur ce CD, l'ensemble bruxellois Scherzi Musicali – avec Nicolas Achten notamment – interprète cinq motets à une, deux et quatre voix composés pour la cathédrale Saint-Michel-et-Gudule. Pour rappel, ce Fiocco a également été récompensé d'un IRR Outstanding par le magazine anglais International Record Review.

 


 

 

Photo: Christophe Pirenne © Jean-Louis Wertz

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