Johan Muyle, artiste entrepreneur
Les reines mortes

Johan Muyle (Charleroi, 1956) est un des artistes belges qui illustrent de la façon la plus spectaculaire la manière dont un créateur, poussé par la logique même de son projet esthétique, peut être amené à porter tantôt le casque du chef de chantier, tantôt la casquette de l'entrepreneur.

Bouddha Thumas

Ce sculpteur s'est d'emblée fait remarquer par la conception de pièces nécessitant une collaboration avec autrui, qu'il s'agisse des animaux qu'il faisait empailler par un taxidermiste, dans des œuvres datant des années 1980 (notamment Les reines mortes) ou d' objets de récupération auxquels il donnait une seconde vie en les intégrant dans des sculptures mobiles dont le mécanisme était mu par un moteur électrique. Ces travaux au caractère bricolé l'amenaient déjà à recourir aux services de divers techniciens.

À gauche :Les reines mortes, 1988-91, BPS 22  Charleroi 2006 © M. Lander - À droite : Bouddah Thumas (multiple), 1991 © M. Lander. Ci-dessous : I promise you a miracle, 2003 (détails) Bruxelles, Gare du Nord  © Johan Muyle
 
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Suite à plusieurs séjours en Inde, à Madras plus précisément, où il a rencontré des peintres d'enseignes cinématographiques, Johan Muyle a développé une série d'œuvres monumentales basées sur le portrait. Des peintres qu'il a fait venir par la suite en Belgique pour répondre à deux commandes d'art public dont on peut voir le résultat à Bruxelles. La première, « I promise you a miracle », est une gigantesque fresque murale (1600 m²) installée à la gare du Nord. Elle met en scène une quarantaine d'artistes belges dans des paysages qui rappellent les mythes de l'enfer et du paradis.

Il ne faut pas rire du bonheur

La seconde, « Il ne faut pas rire du bonheur », court sur la façade d'un immeuble d'habitations sociales situé à Uccle ainsi que dans un couloir au rez-de-chaussée et rassemble des visages d'humoristes connus.

Il ne faut pas rire du bonheur (detail), Uccle © Johan Muyle

 Ces projets se sont concrétisés tous deux par l'ouverture d'un chantier important dont l'artiste fut le maître d'œuvre. Ainsi, de sa conception initiale aux dernières finition, « I promise you a miracle » a nécessité plus de trois années de travail (de juin 2000 à septembre 2003), un investissement de 400.000 euros et l'engagement de nombreux collaborateurs, dont les peintres indiens et une série d'assistants.

Il sera encore question d'art urbain à Liège, en ce printemps 2012, avec une manifestation dont Johan Muyle est le directeur artistique. Pour « OPENAIRS », il a en effet invité des artistes de renommée internationale à créer une œuvre originale avec un medium commun : la structure gonflable. Ces pièces monumentales, signées notamment par Claude Lévêque, Orlan ou l'inattendu Elvis Pompilio, baliseront un parcours dans le cœur historique de la ville.

Johan Muyle s'explique sur la manière dont il conçoit les relations entre nécessités esthétiques et exigences entrepreneuriales au cours d'un entretien qui s'est déroulé le 22 novembre 2011 à la Maison du Peuple de Saint-Gilles, lors d'un colloque organisé par SMartBe.


Carmelo Virone
Février 2012

 

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Carmelo Virone est coordinateur du Bureau d'études SMartBe. Écrivain, traducteur, essayiste, critique littéraire et critique d'art, il a été longtemps rédacteur en chef du bismestriel de littérature belge Le carnet et les instants


 

Pour découvrir son œuvre : www.johanmuyle.com