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Diversité linguistique et apprentissage des langues en milieu scolaire

22 janvier 2012
Diversité linguistique et apprentissage des langues en milieu scolaire

cours

Une équipe de chercheuses du Service d'analyse des pratiques et des systèmes d'enseignement (aSPe, Professeure D. Lafontaine) présente les principaux résultats d'une étude européenne qu'elle a coordonnée. S'intéressant au multilinguisme présent dans de nombreux contextes de vie, cette étude s'est notamment penchée sur les attitudes et représentations d'élèves de l'enseignement primaire et secondaire à propos des langues qu'ils apprennent ou souhaiteraient apprendre.

 

L'enseignement des langues occupe une place importante dans la plupart des systèmes éducatifs européens. Dans la grande majorité des pays, cependant, l'anglais est la première langue moderne enseignée et l'apprentissage de langues autres que l'allemand, l'anglais, l'espagnol, le français et le russe est peu développé.

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Une recherche européenne menée dans le cadre du programme Socrates1

Il y a quelques années, notre équipe de recherche a eu l'occasion de coordonner une étude internationale visant à mieux comprendre les incitants et les freins à l'apprentissage de langues diverses, ainsi qu'à dégager des pistes pour favoriser le plurilinguisme des citoyens en s'appuyant sur le multilinguisme présent dans de nombreux contextes européens. Cette étude a été menée en collaboration par des équipes de recherche de cinq pays européens : l'Allemagne, la Belgique (Communauté germanophone et Communauté française), la Grèce, le Luxembourg et la Pologne. Elle a bénéficié du soutien de la Commission européenne (programme Socrates) et des institutions auxquelles ces équipes appartiennent.

De nombreuses recherches ont souligné l'importance des attitudes et des motivations dans l'apprentissage d'une seconde langue et leurs relations avec les compétences. Des auteurs tels que Dörnyei (2003a, 2003b) ont mis en évidence l'impact du contexte sur les composantes de la motivation et ses travaux ont aidé l'équipe à sélectionner les informations à recueillir. L'étude coordonnée par l'Université de Liège doit permettre de mieux connaître les attitudes des jeunes à l'égard d'une variété de langues de différents statuts, leurs motivations au développement de compétences communicatives dans chacune d'elles et les ressources potentielles dont ils disposent pour faciliter cet apprentissage. Il s'agit également de dégager des éléments de compréhension de ce qui fonde/explique les différentes attitudes et motivations. Quelles langues les jeunes rencontrent-ils dans leur environnement ? Pensent-ils maîtriser les langues qu'ils apprennent à l'école ? Souhaitent-ils en apprendre d'autres en plus et si oui lesquelles ? Quelle est leur vision des langues qu'ils apprennent et des pays où ces langues sont parlées ? Comment se représentent-ils les autres langues qu'ils souhaiteraient apprendre ? Etc.

L'enquête s'est déroulée dans des zones européennes d'étendue limitée situées sur le territoire des cinq pays concernés : les zones géographiques retenues sont relativement homogènes sur le plan linguistique (présence de migrants, proximité d'une zone où une autre langue est parlée, par exemple), et ne se veulent pas représentatives d'un système éducatif ou d'un pays.

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Ainsi, en Communauté française, c'est la commune de Herstal (banlieue ouvrière, avec une importante population immigrée), d'une part, et les Communes malmédiennes (communes rurales, proches des zones germanophones, avec facilités linguistiques), d'autre part, qui ont été sélectionnées. L'hypothèse sous-jacente à une telle approche est que des ressources et des attitudes spécifiques peuvent mieux être approchées si on évite de les noyer dans une masse de données censées refléter les environnements divers rencontrés dans tout un pays.

Plus de 6.000 jeunes ont complété un questionnaire écrit, à raison d'environ 300 élèves du 5e grade et 300 élèves du 9e grade2 dans chacune des zones. Les contextes y ont été étudiés en faisant notamment appel à des personnes-ressources.

Le présent article reprend les principaux constats internationaux de cette étude et dégage quelques pistes de réflexion complémentaires spécifiques au contexte de la Communauté française de Belgique.  




1 Cette recherche a été menée en collaboration par les personnes suivantes : Androulakis, G., Beckmann, C., Blondin, C., Fagnant, A., Goffin, C., Górecka, J., Martin, R., Mattar, C., Meißner, F-J., Mosorka, E., Nowicka, A., Pelt, V., Schröder-Sura, H., Skrivánek, W., Wilczynska, W. & Wojciechowska, B.
2 Dans une perspective internationale, le terme « grade » définit l'année d'études en référence au début de la scolarité primaire : ainsi, en Belgique, le 5e grade correspond à la 5e année primaire et le 9e grade à la 3e année du secondaire.

Les principaux résultats au niveau international

Cette partie de l'article propose une synthèse des principaux constats repris dans le rapport international, ainsi que des pistes qui ont été dégagées à l'intention des décideurs politiques (Androulakis et al., 2007).

Trois lignes de force se dégagent des résultats au niveau international.

Un environnement souvent plurilingue, mais peu de langues enseignées

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Selon les informations recueillies auprès des élèves à propos des langues parlées dans leur famille et dans leur entourage, l'environnement rencontré dans la plupart des zones, y compris dans certains pays officiellement monolingues, est généralement multilingue. Ce multilinguisme peut souvent s'expliquer par la présence sur le territoire de personnes d'origine étrangère. Dans d'autres zones, c'est plutôt la proximité de régions où une autre langue est utilisée qui est à l'origine de contacts et d'échanges. Dans les deux zones polonaises, cependant, les élèves rapportent très peu de contacts directs avec d'autres langues que la langue d'enseignement, malgré la proximité de l'une des zones avec l'Allemagne et Berlin en particulier. Enfin l'anglais est quasi omniprésent, au travers des pays, sans doute en fonction de la place que cette langue occupe dans les médias et l'Internet.

Conformément aux constats d'Eurydice (2005), on note peu de diversité au niveau de la première langue moderne enseignée (majoritairement l'anglais, l'allemand et le français) et c'est au niveau des langues enseignées en 2e ou en 3e lieu que l'on constate une certaine diversification, sans pour autant que les langues des élèves allophones y soient réellement prises en compte.

Selon les chercheurs, « il existe donc des intérêts potentiels et aussi des opportunités (compétences acquises dans le milieu familial, possibilités de contacts et d'échanges, ...) trop peu exploitées : face à la richesse des expériences des élèves dans les zones multilingues, les différents systèmes éducatifs n'organisent que l'enseignement d'une poignée de langues. Le bilinguisme, voire le plurilinguisme, en germe chez certains élèves se transforment trop souvent en un handicap plutôt qu'en atout pour leur avenir » (Androulakis et al., 2007, pp. 282-283).

Des attitudes positives envers l'apprentissage des langues, mais des différences selon les élèves

Au fil des questions qui leur sont posées, les élèves expriment un grand intérêt pour l'apprentissage des langues modernes, mais leurs attitudes varient cependant en fonction de plusieurs paramètres.

Tout d'abord, différents indices sont moins positifs au grade 9 qu'au grade 5 : ainsi, dans toutes les zones sauf une, l'image des cours de langue suivis est plus positive au grade 5 qu'au grade 9 et la confiance des élèves en leurs propres capacités d'apprendre des langues modernes est en général plus faible chez les aînés. Ce constat trouve un écho dans les souhaits des élèves quant à l'apprentissage d'une ou de plusieurs langues en plus de celles qu'ils étudient déjà : si la plupart des plus jeunes souhaitent apprendre au moins une langue supplémentaire, d'un cinquième à près de la moitié des aînés (selon la langue) préfèrent s'en tenir à celle(s) qu'ils apprennent déjà. Il n'a malheureusement pas été possible de mesurer l'investissement envisagé, de façon à renforcer le caractère réaliste des positions adoptées par les élèves interrogés. Les différences observées en fonction de l'âge (ou de l'avancement dans la scolarité) ne sont peut-être pas spécifiques aux cours de langues, mais elles doivent néanmoins être prises en considération par les autorités en charge de l'enseignement des langues modernes.

Par ailleurs, dans le cas des élèves du grade 9, l'intérêt pour l'apprentissage des langues varie en fonction de certaines de leurs caractéristiques : le genre (les filles tendent à se montrer plus positives), la filière dans les cas où les parcours des élèves diffèrent (les élèves de l'enseignement général manifestent des attitudes plus positives que ceux de l'enseignement qualifiant) et le statut socioculturel des familles (dans une zone sur deux, l'intérêt pour l'apprentissage des langues est plus élevé chez les élèves de milieu familial plus favorisé).

Si on analyse trois groupes de variables susceptibles de contribuer à l'explication des différences entre les élèves du grade 9 quant à leurs attitudes par rapport à l'apprentissage des langues (les caractéristiques personnelles, les caractéristiques du parcours scolaire et l'expérience de l'apprentissage des langues), c'est le dernier groupe qui constitue le facteur explicatif le plus important dans sept zones. Selon la zone, c'est l'auto-évaluation par les élèves de leurs compétences ou le vécu positif des cours de langue qui semble jouer le rôle le plus important, la confiance en soi n'intervenant que de façon marginale. Il s'agit ici de variables changeables, sur lesquelles il est possible d'exercer une influence. Parmi les caractéristiques du parcours scolaire, le nombre de langues étudiées dans le cadre de l'horaire habituel intervient dans quatre zones.

Selon les auteurs de l'étude, « au vu de ces constats, il apparaît comme souhaitable et possible de renforcer encore la motivation des jeunes par rapport à l'apprentissage des langues, en particulier au bénéfice des catégories d'élèves dont l'intérêt est actuellement moins marqué » (Androulakis et al., 2007, p. 284).

 


 

 
 
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Un intérêt pour des langues variées, mais une certaine hiérarchie

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Les souhaits d'apprentissage des élèves reflètent leur ouverture à une variété de langues, bien au-delà de celles dont l'étude est très répandue (anglais, allemand, français, en particulier). En tête des langues que les élèves souhaitent apprendre en plus de celles qu'ils étudient déjà viennent les langues romanes, et principalement l'espagnol et l'italien. Cette vision positive doit être nuancée en fonction de freins possibles également mis en évidence par l'étude, et qui varient en fonction de la langue.

Ainsi, dans le cas de l'espagnol et de l'italien, si les attitudes des jeunes interrogés à l'égard des langues elles-mêmes, des pays où elles sont parlées et des compétences à développer sont généralement positives ou très positives, ces langues ne sont pas jugées très utiles par rapport à leur future vie professionnelle.

Par ailleurs, le statut de l'anglais en tant que langue étrangère est très particulier : non seulement cette langue omniprésente dans l'environnement (Internet, cinéma, universités, ...) échappe largement à la détérioration des attitudes observée entre le 5e et le 9e grades, mais elle est perçue comme utile, bénéficie d'opportunités de contact et fait l'objet de pressions extérieures en faveur de son apprentissage. Cependant, l'anglais n'obtient pas des scores supérieurs à ceux des autres langues en ce qui concerne l'image des pays où elle est parlée et l'affectivité générale envers la langue. Cette langue, lingua franca incontestable, offre-t-elle bien tout ce qu'on peut attendre de l'apprentissage d'une langue en termes d'accès à la culture de ses locuteurs ?

Enfin, l'étude suggère une vision nuancée des attitudes à l'égard des langues de proximité et des langues nationales : elles ne suscitent pas automatiquement l'intérêt des jeunes. Par exemple, en Communauté française de Belgique, si l'utilité de l'allemand et du néerlandais (qui, avec le français, constituent les trois langues nationales et sont parlées dans des régions proches) est assez largement reconnue, l'image de ces langues et des « pays » où elles sont parlées n'est pas très positive. L'île grecque de Chios offre un autre exemple : alors qu'elle n'est séparée de la Turquie que par quelques miles nautiques, le pourcentage d'élèves qui souhaitent étudier le turc est particulièrement faible (du même ordre de grandeur que le pourcentage d'élèves intéressés par le chinois !).

 

Quelques pistes pour les décideurs

Un des objectifs du projet était d'adresser des pistes aux personnes dotées d'un pouvoir de décision ou de conseil en la matière, quel que soit le niveau où s'exercent leurs prérogatives : des instances européennes aux parents, en passant par les autorités nationales, régionales, locales et les enseignants, chacun est en mesure d'ajouter sa pierre à l'édifice. Les suggestions qui suivent synthétisent quelques idées forces développées dans le rapport international (Androulakis et al., 2007).

 

Enseigner l'intérêt des langues et des cultures

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Les élèves interrogés n'ont que des représentations limitées, voire partiellement erronées, des différentes langues, alors que les attitudes à l'égard d'une langue sont susceptibles d'exercer une influence sur l'efficacité de son enseignement.

Il serait certainement utile de veiller à sensibiliser les élèves à l'intérêt de compétences en langues, d'aider les élèves à dépasser la vision de l'anglais comme une simple lingua franca et de développer leur intérêt pour les langues – y compris l'anglais – en tant que moyen d'accès à une diversité linguistique et culturelle. Les élèves devraient être amenés à dépasser leurs stéréotypes.


Adapter la méthodologie de façon à exploiter les compétences déjà acquises et multiplier les interactions

L'importance des acquis antérieurs par rapport à de nouveaux apprentissages est bien connue. Dans l'optique d'un apprentissage des langues tout au long de la vie, il importe de tirer parti des compétences linguistiques déjà acquises par l'individu, qu'il s'agisse de langues du foyer, de langues apprises en milieu scolaire ou des expériences de communication vécues. Selon Androulakis et al. (2007), « dans la perspective spécifique d'un développement du plurilinguisme, l'articulation des apprentissages les uns aux autres montre en outre à l'apprenant la valeur de toute compétence linguistique, toute langue servant à en apprendre d'autres, y compris les langues minorisées dans la société et aujourd'hui encore à l'école » (p. 288).

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Développer et mettre en pratique l'éveil aux langues

Selon le ministre à l'origine de l'introduction de l'éveil aux langues en Communauté française, « l'éveil aux langues vise à préparer les individus à vivre dans des sociétés linguistiquement et culturellement plurielles en mettant l'élève en contact avec des matériaux sonores et visuels provenant d'une variété de langues de divers statuts (langue de l'école, langues nationales, langues endogènes, langues des migrants, ...). L'élève est amené à effectuer des activités de découverte de ces matériaux, à les explorer et à les comparer, tout ceci principalement de manière ludique » (Nollet, 2003, p. 10). Le recours systématique à cette approche peut renforcer l'intérêt des jeunes pour les langues en général et les aider à opérer des transferts de compétences d'une langue à l'autre.


 

 

Photos © ULg- Michel Houet

 

Définir au niveau local une politique du plurilinguisme

Si certaines orientations doivent être fixées au niveau du système éducatif, il serait utile de rendre possibles des adaptations aux contextes locaux, de façon à tirer parti des richesses de chaque environnement (présence de personnes d'une autre origine linguistique et proximité d'une région linguistique différente, en particulier).

Préparer l'apprentissage tout au long de la vie

L'apprentissage des langues ne peut se concevoir que dans une perspective d'apprentissage tout au long de la vie : l'enseignement obligatoire ne peut généralement pas, à lui seul, conduire les élèves au plurilinguisme, mais il peut et doit non seulement développer les compétences des élèves dans une, deux ou plusieurs langues, mais surtout les préparer à entretenir, renforcer et élargir leurs acquis.

 

Quelques pistes et propositions plus spécifiques à la Communauté française de Belgique

En plus du rapport international, chaque pays partenaire a développé une monographie nationale dans laquelle il a décrit plus spécifiquement les résultats de « ses » zones linguistiques. Dans le cadre du rapport belge (Blondin, Fagnant, Goffin & Mattar, 2007), quelques pistes et propositions spécifiques ont été développées en fonction des particularités du système scolaire actuel de la Communauté française.

Pour rappel, l'étude s'est centrée sur des zones contrastées d'étendue limitée et relativement homogènes de façon à permettre une bonne compréhension de la situation de chacune d'elles en matière de langues. En Communauté française de Belgique, les deux zones analysées étaient constituées des Communes malmédiennes et de la commune d'Herstal. Les résultats de l'enquête ne se voulaient nullement représentatifs de la Communauté française, mais la plupart des propositions fondées sur l'étude des deux zones précitées ont une portée plus large. Les quatre pistes majeures développées dans le rapport national sont brièvement synthétisées ci-dessous.

Étendre les bénéfices des cours de langues à l'ensemble des élèves

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Parmi les zones analysées, seules celles qui sont situées en Communauté française comptent des élèves de l'enseignement ordinaire qui, au grade 9, ne suivent plus aucun cours de langue. Il n'est pas acceptable qu'une partie non négligeable des élèves soit privée de cours de langues alors que, selon la Commission européenne (1996), tout citoyen européen devrait être doté de compétences dans au moins deux langues en plus de sa langue maternelle et que l'enseignement obligatoire en Communauté française poursuit notamment l'objectif suivant : « Préparer tous les élèves à être des citoyens responsables, capables de contribuer au développement d'une société démocratique, solidaire, pluraliste et ouverte aux autres cultures » (Décret définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre, 24 juillet 1997, article 6).

L'organisation du 1er degré différencié entrée en vigueur en septembre 2008 a, depuis la publication originale de l'étude, généralisé l'obligation de suivre un cours de langue moderne à tous les élèves du 1er degré de l'enseignement secondaire ordinaire. Il faudrait cependant encore veiller, dans le cadre de la revalorisation de l'enseignement qualifiant, à intégrer au minimum un cours de langue dans le curriculum des sections professionnelles et techniques de qualification. Ce cours de langue devrait être adapté aux spécificités de l'enseignement qualifiant et des élèves qui le fréquentent.

 

Renforcer la cohérence des parcours en matière d'apprentissage des langues

Dès 2002, l'inspection des langues germaniques estimait à 15% au moins le pourcentage d'élèves ayant bénéficié de deux années de cours de langue moderne à l'école primaire qui changeaient de cours de langue à leur arrivée dans le secondaire (Poulain, 2002). Les informations recueillies à propos des parcours des élèves confirment et précisent cette estimation : « tant dans les Communes malmédiennes, qui bénéficient d'un statut spécial en matière d'apprentissage des langues, qu'à Herstal, où s'appliquent en la matière les règles générales définies par la Communauté française, un pourcentage non négligeable d'élèves de 3e année du secondaire ont abandonné - provisoirement (respectivement 5, 3 ou 9% des élèves selon que la 1re langue moderne est l'allemand, l'anglais ou le néerlandais) ou définitivement (respectivement 33, 26 et 35% des élèves) - l'apprentissage de la première langue moderne à laquelle l'école les a confrontés » (Blondin et al., 2007, p. 256).

La généralisation des cours de langue recommandée au point précédent devra aussi s'accompagner d'une réflexion sur la façon d'assurer la cohérence des parcours scolaires : il n'est certainement pas efficace, ni pour la motivation des élèves et des maîtres de langue du primaire, ni pour l'organisation des cours du 1er degré du secondaire, de rassembler en 1re année du secondaire des élèves qui ont suivi 2 ou 4 années de cours dans la langue enseignée et d'autres qui n'ont pas encore commencé l'apprentissage de cette langue parce qu'ils avaient opté pour un autre choix au primaire. Il existe certes des moyens de gérer l'hétérogénéité des élèves, mais la différenciation « nécessite des ressources matérielles et humaines dont la plupart des écoles ne disposent pas. (...) La mosaïque à laquelle aboutissent ces incohérences ne peut que réduire les chances d'un apprentissage efficace des langues et par conséquent du plurilinguisme en ne respectant pas la continuité requise » (Blondin et al., 2007, p. 256).



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Combattre, à tous les niveaux, les stéréotypes à l'égard des langues nationales

Dans les zones de la Communauté française étudiées, les élèves, et principalement ceux du secondaire, manifestent des attitudes bien moins positives à l'égard des langues nationales que de l'anglais et des langues de l'immigration. Si les élèves de 3e secondaire reconnaissent le caractère instrumental et l'utilité de la connaissance du néerlandais ou de l'allemand, leur intérêt pour ces dernières et les régions où elles sont parlées est quant à lui limité.

Le renforcement de l'intérêt des élèves pour une variété de langues et de cultures (qui fait partie des recommandations générales issues des constats internationaux) devrait, en Communauté française, se concrétiser plus particulièrement à propos des langues nationales.

Ménager une place aux langues de l'immigration

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L'étude a mis en évidence le degré élevé de multilinguisme de l'environnement (famille, voisins, amis, ...) à Herstal et la présence de langues diverses, plus limitée mais réelle, dans les Communes malmédiennes. Les personnes d'origine étrangère sont nombreuses en bien d'autres endroits (les bassins industriels de Liège et de Charleroi, la Région de Bruxelles Capitale, principalement).

Même si les langues présentes dans l'environnement diffèrent d'une région à l'autre, elles constituent une source potentielle de motivation et une ressource pour l'apprentissage d'autres langues : dans la perspective amorcée par les cours de langue et culture d'origine, il faudrait valoriser encore davantage ces langues et développer les compétences déjà présentes chez les enfants.

Pour terminer sans conclure...

Le multilinguisme social et le plurilinguisme individuel ont besoin de soutien pour se développer.

Les résultats du projet Socrates ont été diffusés selon plusieurs modalités : un colloque organisé au Luxembourg en septembre 2008 a permis de clôturer la recherche et d'en communiquer les principaux résultats, les rapports nationaux et internationaux ont été diffusés auprès des responsables politiques, un site internet reprenant l'ensemble des rapports internationaux et nationaux a été développé, plusieurs publications sous forme d'articles scientifiques ont été rédigées,....

A plusieurs reprises, tout au long de cette recherche, les témoins privilégiés et les décideurs ont exprimé leur désir de moderniser l'enseignement des langues pour le rendre plus efficace. L'avenir montrera si certaines des pistes proposées se concrétisent ...

 

Christiane Blondin, Christelle Goffin et Annick Fagnant
Janvier 2012

 

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Christiane Blondin a mené diverses recherches à propos de l'enseignement des langues. Elle est actuellement responsable, pour la Communauté française de Belgique, de l'Étude européenne sur l'enseignement des langues.

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Christelle Goffin est responsable des aspects quantitatifs de l'Étude européenne des compétences en langues et participe également aux évaluations externes non certificatives en Communauté française.

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Annick Fagnant est actuellement chargée de cours au Département Éducation et Formation. Elle dispense notamment des cours de pédagogie et de psychologie éducationnelle aux futurs enseignants.

 

Références

Androulakis, G., Beckmann, C., Blondin, C., Fagnant, A., Goffin, C., Górecka, J., Martin, R., Mattar, C., Meißner, F.-J., Mosorka, E., Nowicka, A., Pelt, V., Schröder-Sura, A., Skrivánek, H., Wilczyńska, W., & Wojciechowska, B. (2007). Pour le multilinguisme : Exploiter à l'école la diversité des contextes européens. Résultats d'une étude internationale, Liège, Éditions de l'Université de Liège.
Blondin, C., Fagnant, A., Goffin, C., & Mattar, C. (2007). Pour le multilinguisme : Exploiter à l'école la diversité des contextes européens. Analyse de trois zones belges dans le cadre d'une étude internationale, Liège, Éditions de l'Université de Liège.
Dörnyei, Z. (2003a). Attitudes, orientations, and motivations in language learning: Advances in theory, research and applications. In Z. Dörnyei (Ed.), Attitudes, orientations, and motivations in language learning: Advances in theory, research and applications (pp. 3-32). Oxford, UK: Blackwell.
Dörnyei, Z. (2003b). Introduction. In Z. Dörnyei (Ed.), Attitudes, orientations, and motivations in language learning: Advances in theory, research and applications (pp. 1-2). Oxford, UK: Blackwell.
Eurydice (2005). Chiffres clés de l'enseignement des langues à l'école en Europe. Bruxelles : Unité européenne Eurydice.
Nollet, J.-M. (2003). Pourquoi l'éveil aux langues en Communauté française ? In C. Blondin & C. Mattar (Eds.). S'ouvrir aux langues et aux cultures grâce à l'éveil aux langues (pp. 39-82). Université de Liège : Service de Pédagogie expérimentale.
Poulain, R. (2002). Mémorandum de l'inspection des langues germaniques de la Communauté française au Ministre Hazette à propos de l'année scolaire 2000-2001, Document non publié.
 

Pour en savoir plus sur cette étude...

Ouvrages collectifs publiés à l'issue de la recherche
Androulakis, G., Beckmann, C., Blondin, C., Fagnant, A., Goffin, C., Górecka, J., Martin, R., Mattar, C., Meißner, F.-J., Mosorka, E., Nowicka, A., Pelt, V., Schröder-Sura, A., Skrivánek, H., Wilczyńska, W., & Wojciechowska, B. (2007). Pour le multilinguisme : Exploiter à l'école la diversité des contextes européens. Résultats d'une étude internationale, Liège, Éditions de l'Université de Liège.
Blondin, C., Fagnant, A., Goffin, C., & Mattar, C. (2007). Pour le multilinguisme : Exploiter à l'école la diversité des contextes européens. Analyse de trois zones belges dans le cadre d'une étude internationale, Liège, Éditions de l'Université de Liège.
 
Site internet sur lequel les résultats de la recherche international sont diffusés
http://www.uni-giessen.de/rom-didaktik/Multilingualism/
 
Autres publications de l'équipe de coordination à propos de cette étude
Blondin, C., Fagnant, A. & Goffin, C. (2008) Les attitudes des jeunes à l'égard des langues : présentation d'une enquête européenne réalisée dans le cadre du programme Socrates et réflexions quant aux difficultés engendrées par une telle entreprise. Les Cahiers des Sciences de l'Education, 25&26 (2006), 77-96.
Blondin, C., Fagnant, A. & Goffin, C. (2008). L'apprentissage des langues en Communauté française : curriculum, attitudes des élèves et auto-évaluation. Education et Formation, e289, 73-92.
Fagnant, A., Blondin, C., Goffin, C. & Mattar, C. (2008). Image des langues et motivation. Les Langues Modernes, 3, 17-27.
Goffin, C., Fagnant, A. & Blondin, C. (2009). Des langues très appréciées : les langues du voisin ? LIDIL. Revue de Linguistique et de Didactique des Langues, 40, 17-30.


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