Diversité linguistique et apprentissage des langues en milieu scolaire

 

Un intérêt pour des langues variées, mais une certaine hiérarchie

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Les souhaits d'apprentissage des élèves reflètent leur ouverture à une variété de langues, bien au-delà de celles dont l'étude est très répandue (anglais, allemand, français, en particulier). En tête des langues que les élèves souhaitent apprendre en plus de celles qu'ils étudient déjà viennent les langues romanes, et principalement l'espagnol et l'italien. Cette vision positive doit être nuancée en fonction de freins possibles également mis en évidence par l'étude, et qui varient en fonction de la langue.

Ainsi, dans le cas de l'espagnol et de l'italien, si les attitudes des jeunes interrogés à l'égard des langues elles-mêmes, des pays où elles sont parlées et des compétences à développer sont généralement positives ou très positives, ces langues ne sont pas jugées très utiles par rapport à leur future vie professionnelle.

Par ailleurs, le statut de l'anglais en tant que langue étrangère est très particulier : non seulement cette langue omniprésente dans l'environnement (Internet, cinéma, universités, ...) échappe largement à la détérioration des attitudes observée entre le 5e et le 9e grades, mais elle est perçue comme utile, bénéficie d'opportunités de contact et fait l'objet de pressions extérieures en faveur de son apprentissage. Cependant, l'anglais n'obtient pas des scores supérieurs à ceux des autres langues en ce qui concerne l'image des pays où elle est parlée et l'affectivité générale envers la langue. Cette langue, lingua franca incontestable, offre-t-elle bien tout ce qu'on peut attendre de l'apprentissage d'une langue en termes d'accès à la culture de ses locuteurs ?

Enfin, l'étude suggère une vision nuancée des attitudes à l'égard des langues de proximité et des langues nationales : elles ne suscitent pas automatiquement l'intérêt des jeunes. Par exemple, en Communauté française de Belgique, si l'utilité de l'allemand et du néerlandais (qui, avec le français, constituent les trois langues nationales et sont parlées dans des régions proches) est assez largement reconnue, l'image de ces langues et des « pays » où elles sont parlées n'est pas très positive. L'île grecque de Chios offre un autre exemple : alors qu'elle n'est séparée de la Turquie que par quelques miles nautiques, le pourcentage d'élèves qui souhaitent étudier le turc est particulièrement faible (du même ordre de grandeur que le pourcentage d'élèves intéressés par le chinois !).

 

Quelques pistes pour les décideurs

Un des objectifs du projet était d'adresser des pistes aux personnes dotées d'un pouvoir de décision ou de conseil en la matière, quel que soit le niveau où s'exercent leurs prérogatives : des instances européennes aux parents, en passant par les autorités nationales, régionales, locales et les enseignants, chacun est en mesure d'ajouter sa pierre à l'édifice. Les suggestions qui suivent synthétisent quelques idées forces développées dans le rapport international (Androulakis et al., 2007).

 

Enseigner l'intérêt des langues et des cultures

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Les élèves interrogés n'ont que des représentations limitées, voire partiellement erronées, des différentes langues, alors que les attitudes à l'égard d'une langue sont susceptibles d'exercer une influence sur l'efficacité de son enseignement.

Il serait certainement utile de veiller à sensibiliser les élèves à l'intérêt de compétences en langues, d'aider les élèves à dépasser la vision de l'anglais comme une simple lingua franca et de développer leur intérêt pour les langues – y compris l'anglais – en tant que moyen d'accès à une diversité linguistique et culturelle. Les élèves devraient être amenés à dépasser leurs stéréotypes.


Adapter la méthodologie de façon à exploiter les compétences déjà acquises et multiplier les interactions

L'importance des acquis antérieurs par rapport à de nouveaux apprentissages est bien connue. Dans l'optique d'un apprentissage des langues tout au long de la vie, il importe de tirer parti des compétences linguistiques déjà acquises par l'individu, qu'il s'agisse de langues du foyer, de langues apprises en milieu scolaire ou des expériences de communication vécues. Selon Androulakis et al. (2007), « dans la perspective spécifique d'un développement du plurilinguisme, l'articulation des apprentissages les uns aux autres montre en outre à l'apprenant la valeur de toute compétence linguistique, toute langue servant à en apprendre d'autres, y compris les langues minorisées dans la société et aujourd'hui encore à l'école » (p. 288).

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Développer et mettre en pratique l'éveil aux langues

Selon le ministre à l'origine de l'introduction de l'éveil aux langues en Communauté française, « l'éveil aux langues vise à préparer les individus à vivre dans des sociétés linguistiquement et culturellement plurielles en mettant l'élève en contact avec des matériaux sonores et visuels provenant d'une variété de langues de divers statuts (langue de l'école, langues nationales, langues endogènes, langues des migrants, ...). L'élève est amené à effectuer des activités de découverte de ces matériaux, à les explorer et à les comparer, tout ceci principalement de manière ludique » (Nollet, 2003, p. 10). Le recours systématique à cette approche peut renforcer l'intérêt des jeunes pour les langues en général et les aider à opérer des transferts de compétences d'une langue à l'autre.


 

 

Photos © ULg- Michel Houet

 

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