Nouvelle orthographe

Nouvelle orthographe : une réponse de Francis Dannemark

Cher Jean-Marie Klinkenberg,

J'ai peu de temps pour me pencher sur toutes les réactions que suscite cette réforme mais je sens une grande agitation. Pour revenir un instant sur le sujet, je dirais ceci : une réforme est indispensable mais quelle réforme ?

Celle qu'on nous propose semble boiteuse et de nature à augmenter la confusion. Je sens que de nombreux enseignants se cabrent, la plupart des gens dans mon entourage (toutes professions et tous âges confondus) y sont radicalement opposés et je devine que la plupart des éditeurs la refusent ou vont la refuser en bloc. Mes amis en France prennent tout cela pour une histoire belge. C'est dire...

Pas de réforme vaut mieux qu'une mauvaise réforme ; mais pas de réforme, c'est courir le risque majeur d'une fracture sociale, d'une perte de vitalité du français sur le plan international alors qu'il est déjà en régression, etc. Votre argumentation m'a profondément touché, je vous le dis du fond du coeur.

Bref, la complexité du problème me laisse perplexe. Et je mesure humblement les limites de ma compétence. Mais je suis heureux de voir le débat prendre de l'ampleur. C'est de ce débat que pourra naître une réponse adéquate.

Bien à vous,

Francis Dannemark

PS :

J'ajouterais ceci : je crois qu'une première réforme efficace serait celle qui proposerait des aménagements simples à expliquer et faciles à appliquer ; toute réforme accompagnée de nombreuses exceptions et variantes me semble dangereuse et vouée à l'échec si l'on se souvient que l'orthographe officielle souffre déjà d'une extrême complexité. Mais je ne suis pas sûr qu'une telle réforme soit possible. La langue française se prête mal aux rénovations simples.

Peut-être faudrait-il alors songer à une rénovation radicale? Les Japonais l'ont fait, il y a un siècle, en simplifiant leur écriture. Et cela a marché. Mais ils ont dû consacrer des moyens financiers extraordinaires à cette opération : il a fallu "traduire" tous les textes existants afin que la population ne perde pas accès à sa culture. Et l'on pourrait se demander si, d'un point de vue moral, le bénéfice a été aussi grand qu'il l'a été sur le plan économique. Rien n'est simple et tout se complique, comme le dit si bien Sempé.

 

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Francis Dannemark est écrivain et co-directeur de la collection Escales du Nord aux éditions Le Castor Astral.

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