1941-2011 : 70 ans de Théâtre Universitaire à Liège

L'ère Robert GERMAY, 1983-2007...

Pour aborder ce chapitre de la 4e présidence, il faut faire un retour en arrière et examiner l'histoire du Théâtre des Germanistes Liégeois. Comme évoqué plus haut, la Section de Philologie germanique, elle non plus, ne rechignait pas, depuis les années 1930, à exploiter les vertus pédagogiques bien connues du théâtre, en l'occurrence dans l'apprentissage des langues et des littératures dont elle assurait l'enseignement. Une douzaine de pièces connurent ainsi la scène, entre 1933 et 1949, en langues originales, à savoir l'allemand, l'anglais et le néerlandais, par des étudiants guidés respectivement par les Professeurs A.-L. Corin (1889-1968), Victor Bohet (1887-1948) et René Verdeyen (1883-1949).3

Le théâtre donnait aux étudiants germanistes l'occasion d'étudier des auteurs et leurs œuvres, d'une manière certes moins académique, mais tout aussi sérieuse et plus ludique, tout en pratiquant leur langue d'origine. Les années 60 ne furent pas en reste, avec des spectacles en anglais proposés sous la direction du fils Corin, Fernand (The Baikie Charivari de James Bridie en 1963, e.a.).

Quant à l'allemand, ce sont des étudiants qui sollicitèrent spontanément leur professeur de Littérature, Armand Nivelle, qui les encadra pour présenter Woyzeck de Büchner, en 1962, au Foyer des Étudiants, place du Vertbois. Parmi la bonne vingtaine d'étudiants constituant la distribution, on comptait Robert Germay, qui se retrouva, en 1963, assistant-bibliothécaire de la Section. Il prit alors  rapidement la direction de l' « opération théâtre », montant successivement Kennen Sie die Milchstrasse ? (Karl Wittlinger, 1965), Bierdemann und die Brandstifter (Max Frisch, 1968), Romulus der Grosse (Friedrich Dürrenmatt, 1971). D'épisodique qu'il était depuis l'origine, le théâtre pratiqué dans la famille Germaniste devint ainsi plus assuré et régulier : le Theater der Lütticher Germanisten (TLG) était né et prêt à devenir une véritable troupe – et Association de fait – avec son Mockinpott de Peter Weiss, donné, en 1973, dans un Sart Tilman brut de décoffrage et mis en scène par Robert Germay (1940- ?). Ce spectacle déclencha sur bien des points une profonde évolution : fidélisation d'un noyau dur de comédiens, première intégration de techniciens son et lumière attitrés, premiers subsides de la Communauté germanophone, d'abord, française ensuite, de la Cosocu de l'ULg, première affiche professionnelle (Erwin Kirsch), première collaboration avec les télévision et radio scolaires nationales (RTB) dans le cadre des émissions d'apprentissage de l'allemand, première reprise du spectacle sur deux saisons aux Chiroux, après le Sart Tilman...

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Mockinpott avec R. Germay et R. Grosch

Sur le plan de l'évolution de la pratique et de l'esthétique théâtrales aussi, Mockinpott marqua un grand tournant tant par le choix d'un texte « détonnant » par son caractère peu, voire anti-littéraire , que par une mise en scène accentuant le caractère visuel du spectacle.

En reconnaissance de la grande qualité esthétique et du caractère novateur de cette production, la Communauté germanophone en subsidia la diffusion - y compris en matinées scolaires - dans les villes de la région : Saint-Vith, Eupen, La Calamine... Le Goethe Institut de Bruxelles la mit également à son programme, et une décentralisation en Allemagne (Remscheid), première d'une longue série future, lançait la « carrière » internationale du TLG. Suivraient bientôt l'Autriche, la Pologne, etc. Le beau succès ne se démentira pas pour la quinzaine de spectacles - en allemand mais aussi en anglais et en français - que la troupe présentera par la suite. On sait aussi de source sûre que la perspective de pouvoir « entrer au TLG » amena plus d'un ou d'une germanophone à s'inscrire à l'Université de Liège plutôt que, comme le voulait une vieille tradition, à Louvain. L'exemple le plus fameux fut celui de Marcel Cremer qui, à la fin de ses études à l'ULg, après 6 années de Théâtre des Germanistes,   retourna fonder à Saint-Vith le théâtre Agora, qui figure aujourd'hui parmi les théâtres qui comptent dans le milieu professionnel belge et étranger.

Une des forces des productions du TLG, outre la qualité de jeu, résidait dans la justesse de l'analyse dramaturgique qui présidait à toute mise en scène, et dans laquelle excellait alors Éveline Orban-Michiels qui officiait aussi comme rigoureuse trésorière de la troupe. Le dernier spectacle produit sous le label « Théâtre des Germanistes Liégeois » sera Der Turm de Peter Weiss, mis en scène par Alain Chevalier en 1998. Depuis lors, le TLG a complètement fusionné avec le TU(R)Lg, seule « appellation contrôlée » utilisée aujourd'hui, quel que soit le répertoire.

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Rosencrantz et Guildenstern sont morts

En reprenant la présidence du TULg en 1983, le directeur/metteur en scène du Théâtre des Germanistes, Robert Germay, ramenait le siège social de l'asbl de Stavelot à l'ULg, mais, surtout, il amenait dans ses bagages un long carnet d'adresses étrangères et une solide expérience de décentralisations internationales dont il allait faire bénéficier le Théâtre universitaire proprement dit. Des tournées mémorables emmenèrent régulièrement, dans un même autocar, les troupes du « TULg/TLG united » présenter ensemble un spectacle de chaque troupe tantôt à Nantes (Indians et Die Versicherung), à Wroclaw (Érasme et Rosencrantz et Guildenstern sont morts), à Vilnius (Passion et Le Projecteur réparé), voire même trois pièces ensemble à Zagreb (Lovely Rita, Le Projecteur réparé, Passion). Ce sont sans doute aussi ces nombreuses prestations dans tant de pays ni francophones ni germanophones qui montrèrent la grande capacité des mises en scène liégeoises à franchir allègrement la fameuse barrière de la langue. 


 

3 Il convient de citer aussi les pièces qui constituent la "Préhistoire" du Théâtre des Germanistes :
- 1933-34 :
The Twelve-pound Look (Sir James.Matthew Barrie);
Riders to the Sea (John Millington Synge);
Augustus Does His Bit (George Bernard Shaw)
- 1934-35 :
Maria Magdalena (Friedrich Hebbel);
Das Spiel vom deutschen Bettelmann (Ernst Wiechert)
- 1936-37 : Dolle Hans (Jan Fabricius)
- 1937-38 :  The Admirable Crichton (Sir James Matthew Barrie)
- 1938-39 : Die Kommstunde (Leo Weismantel)
- 1940 :
Het daghet in het Westen (Nico van Suchtelen);
Vóór het diner (Josine Adriana Simons-Mees) 
- 1941 :
The Flashing Stream (Charles Morgan) : travaillé par les étudiants, mais représentation interdite par la Kommandantur (on peut s'en étonner encore aujourd'hui quand on sait que la pièce fut pourtant créée en allemand (Der leuchtende Strom) à Brême en 1940)
- 1946 : Die häusliche Frau (Hermann Baler)
- 1947-48 : The Admirable Crichton (Sir James Matthew Barrie)
- 1949 : Iphigenie (Johann Wolfgang von Goethe)
- 1963 : The Baikie Charivari (James Bridie)
- 1963 : Der Todt Mann (Hans Sachs)
 

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