Regards croisés, Japonais en Belgique et Belges au Japon

Sous leurs airs de joueurs de poker, que cachent-ils, ces Japonais ? Sont-ils contents ou contrariés ? Que ressentent les Belges qui se rendent au Japon ? Et pourquoi décident-ils souvent d'apprendre le japonais ? Kanako Goto, Japonaise en Belgique depuis quelques années, tente  ici de dévoiler ce que ces deux camps pensent tout bas – Japonais en Belgique, et Belges au Japon.

Japanese in Belgium

Quatre Japonais ayant séjourné en Belgique, et plus précisément à Liège, nous font part de leurs impressions.

Japanese in Brussels – premières impressions du pays

Nous arrivons en Belgique ! Dans l'avion, à l'annonce de l'heure locale, nous reculons nos montres de 7 heures. On recommence la journée qu'on avait déjà entamée de l'autre côté. On atterrit sous la pluie, par une température bien fraîche pour un mois de juillet. En Belgique, on s'habille de la même manière au printemps, en été et en automne. Ville de Bruxelles. Nous sommes surpris de la petite taille du sympathique Manneken pis puis découvrons  la splendeur de la Grand Place. Le soir, à table, un kilo de moules nous rebutent un peu par la couleur noire de leurs coquilles. Coquillages noires et  chair orange : ce contraste de couleurs n'existerait pas au Japon. Nous ne sommes plus au Japon.

Les gens sont gentils, on peut le dire. Ils parlent plus lentement le français qu'en France et prennent des nouvelles de notre santé quand ils nous fournissent un renseignement – du moins, c'est ce que nous avions compris alors – : « Au coin, vous tournez à droite et c'est droit devant vous. Ça va ? Allez, au revoir ». Ce « ça va ? » symbolise pour nous la gentillesse des habitants de la Belgique. Nous ne comprenons pas encore les subtilités des savoureux belgicismes, nous nous y ferons plus tard.

Les Bruxellois ne sont pas nécessairement belges. Pour un Japonais, cette diversité de nationalités est étonnante, à tel point qu'on se demande quasiment si on est vraiment en Belgique.

Un petite déception : à Bruxelles, nous n'avons pas eu droit aux gaufres si appréciées au Japon sous le nom de « Belgian Waffles »,  des gaufres très sucrées et souvent parfumées à la cannelle, finalement  assez proches des gaufres de Liège.

GSM, Gaufres et une Japonaise

Japanese in Liège – la vraie expérience d'une vie belge

Venir à Liège ne rime pas avec tourisme pour la majorité des Japonais, qui ont pour objectif  de suivre (et survivre à) des études universitaires ou d'autres formations. En se rendant au centre ville, on découvre les ruelles étroites, un peu sombres. Au Japon, on ne parle pas aux inconnus dans la rue, et , bien sûr, on n'est pas non plus abordés par eux. Alors, intimidés par quelques mendiants pleins d'assurance, nous nous sentons presque obligés de leur répondre en ouvrant nos porte-monnaie.

Un peu plus tard, nous voilà dans la file d'attente de la cité administrative. Un agent nous examine de pied en cap, il faut réciter jusqu'au nom de jeune fille de sa mère, dont la sonorité est de toute façon peu familière aux oreilles de l'agent, pour enfin être inscrit en tant que résident étranger. Nous sommes désormais bien casés dans un panier « étrangers » et dans un sous-panier « non-EU ».

Ainsi, nous devrons payer 2500 euros de minerval au lieu de 850...  seulement parce que nous  sommes « non-EU ». Nous ressentons cela comme une discrimination – mais nous ne le disons pas parce que nous sommes sans doute trop gentils, naïfs et mous – et cela décourage, dès le début de l'année académique, les studieux étudiants venant du Japon. C'est la vie...

Si la vie est ainsi, il faut se consoler. En mangeant des frites ? Ou des moules ? Et en buvant de la bière ? Après avoir traversé tant d'épreuves administratives et financières, on oublie sa première frayeur face aux moules noires et aux frites grasses. Comme le dit très bien un dicton japonais, on ne peut pas se battre avec un ventre vide.

À la maison, au Japon, on peut très bien manger un steak avec des couverts occidentaux, puis, on pose les couverts, et prend une paire de baguettes pour attaquer le riz. Chez les Belges, on attaque le pain avec des mains. Pareil pour les frites… un peu barbare non ? Mais quelle question… !  

 

Quand on commence à penser aux frites au milieu des cours, vers 11 heures ou vers 17h30, c'est un signe qu'on a déjà mis le pied dans un piège nommé Liège.

Les murs grisâtres des immeubles, les petits chocolats posés à côté d'une tasse de café, les longues vacances, le bruit de fond de la fête du 15 août qu'on entend jusque sur l'autre rive de la Meuse, les sourires qu'on échange avec des inconnus manqueront terriblement aux Japonais qui retournent au pays, même longtemps près leur départ...

Japonais à Gand
Un couple japonais au centre ville de Gand

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