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Des œuvres entre nature et culture

06 juillet 2010
Des œuvres entre nature et culture

En collaboration avec l'Asbl Les Ateliers d'Art contemporain, la Commune de Chaudfontaine se lance dans un pari osé, le festival des cinq saisons. Une exposition d'œuvres mêlant nature et culture qui poussera dans le parc Hauster. L'ambition : que les œuvres évoluent dans le temps avec leur environnement.

 

trio inaccessible grange Pince à linge

À gauche : Le trio inaccessible : Trois peupliers devenus trop dangereux ont dû être abattus. Ils ont été coupés respectivement à 4, 7 et 11 mètres de haut. L'artiste Bob Verschueren les a creusés et y a replanté trois jeunes peupliers. Cette œuvre est un exemple d'œuvre éphémère. Quand les jeunes peupliers auront poussé, les anciens troncs devront être coupés...
Au centre : Parcours ascensionnel :  Pas besoin d'être aussi agile que le baron perché pour atteindre la cime des arbres, avec ce  parcours ascensionnel labyrinthique de Christian La Grange.
À droite : Pince à Linge : L'artiste Uysal Mehmet Ali imagine la surface de la Terre comme une peau et a voulu illustrer son élasticité en installant cette pince à linge de 6 mètres de haut.



N'en déplaise à Vivaldi et à son patrimoine bravant les époques depuis trois siècles, au Parc Hauster, à Chaudfontaine, se déroulera à partir d'octobre le festival des cinq saisons. Mais que le virtuose vénitien se rassure, l'événement n'entend pas faire de l'ombre à ses célèbres concertos.

Les calidifontains auront peut-être remarqué une fourmilière d'architectes, de plasticiens, d'artistes, de politiciens, de partenaires divers en col blanc s'activer et proliférer dans le parc Hauster ces derniers mois. Il ne s'agit pas d'une simple cure de jouvence de ces trois hectares de nature domestiquée. Mais bien de la préparation d'une exposition intégrant art plastique et nature dans un même cercle où ils pourront s'interpénétrer à leur guise.

tableau composteur

Les matériaux utilisés sont tous naturels ; sauvages ou domestiqués (Pommes de pain, feuilles, branches, arbres coupés ou haies taillées). « Il y a un patrimoine naturel exceptionnel à Chaudfontaine, se targue Daniel Bacquelaine, Bourgmestre de la commune. La volonté dans ce projet est de la mettre en valeur et non pas de l'occulter à travers ce jardin d'art contemporain. Le festival mélangera nature végétale et expression culturelle en rappelant l'importance de la biodiversité et de notre environnement. » Et cette sensibilité à la nature se ressent jusque dans ses plus petits détails. En vue de défricher un amas de rochers envahis par une végétation trop luxuriante, ils feront appel à l'équipe d'Alice et de Bebette, expertes en matière de défrichage puisque ce sont... des chèvres. 

Le tableau composteur :  Michel Davo met en scène la pourriture et le processus de compostage. Cette œuvre est interactive. N'hésitez pas à y jeter votre trognon de pomme...

 

jardin des cycles

Le terme « festival » peut prêter à confusion. « Il ne s'agit pas d'une exposition ponctuelle, développe Dorothée Luczak, directrice artistique du projet. Certaines œuvres sont éphémères, mais d'autres évolueront avec le cycle des saisons. Et nous restons ouverts à l'intégration future de nouvelles œuvres. » Un des intérêts de cette expérience unique en Belgique, c'est donc bien sûr de voir évoluer les œuvres présentées dans leur contexte naturel, quand les feuilles chuteront, sous 10 centimètres de neige ou escortées par les bourgeons émergeant au printemps. Ce qui explique les quatre cinquièmes du nom troublant de l'événement. Et la cinquième saison ? « Nous voulions souligner que le concept des saisons est quelque chose de culturel. Dans nos régions, nous en avons quatre. Au pôle Nord, il n'y en a que deux. En Chine, ils en ont cinq. Ici, la cinquième saison, c'est l'évolution des œuvres, leur interconnexion avec la nature, mais aussi avec les visiteurs. Elle donne le ton sur le fait qu'on axe le festival sur la durée. »

Le jardin des cycles : Le pétrole est une énergie fossile. Que faire des barils quand l'or noir aura été consommé ? Dimitri Xenakis et Maro Avrabou donnent une idée de recyclage dans « le jardin des cycles », qui sera construit pour le festival.
 
 

D'un bus à l'autre...passage

Les organisateurs ont la volonté que l'art déborde du parc. Pour parvenir à leurs fins, ils ne vont certes pas tailler des haies jusqu'au casino de Chaudfontaine, non. Des bus du TEC, de la ligne 4 d'abord (qui fait le tour de la ville de Liège), et de la ligne 31 ensuite (qui se rend à Chaudfontaine), seront entièrement pelliculés par l'artiste Christine Mawet, qui exposera également des œuvres au parc. Tout au long du parcours, les passagers pourront entendre des textes rédigés par Vinciane Despret (département de philosophie de l'Université de Liège) et lus par le comédien François Sikivie. Ces œuvres viseront à interpeller les passagers sur la vie, sur le mouvement, sur le rapport entre l'homme et le vivant végétal ou animal, mais aussi sur le passé des lieux qu'emprunteront les bus. Elles seront également disponibles sous format texte et en mp3 sur le site du festival.

Au-delà de la Province, les différents acteurs du festival envisagent des partenariats, des synergies avec d'autres manifestations similaires dans toute l'Europe.

Voir l'article : D'un bus à l'autre... des histoires de Liège pas ennuyeuses du tout !

Cinq saisons, et plus si affinité

Bien sûr, certaines œuvres sont éphémères. D'autres perdureront, et d'autres évolueront. Le parc vivra également de l'interaction que ses organisateurs entendent mettre en place avec le public et avec d'autres artistes. Tout projet rentrant dans les thèmes exploités pourra être proposé, par le biais de candidatures spontanées sur le site web du festival.

Les organisateurs proposeront également une série de concours, d'animations et d'événements, de stages ponctuels qui permettront au public de découvrir le parc sous de nouveaux angles ou de participer à son évolution.

Des concours seront également organisés dans les bus des lignes 4 et 31. Par exemple, par la distribution aux passagers de bulbes de fleurs qu'ils pourront planter le long du parcours. Les plus originaux seront récompensés.

Le festival des cinq saisons vise donc la durée, le long voyage. Les 800.000 euros débloqués jusqu'à maintenant permettront à la commune de Chaudfontaine et aux Ateliers d'Art contemporain d'assurer la pérennité du parc pendant deux ans. Une telle somme a pu être récoltée entre autre parce que le projet a déjà séduit beaucoup d'organes, tant publics que privés. Outre une aide du FEDER, l'événement s'inscrit dans le cadre de la présidence belge du conseil de l'Union Européenne. On peut également citer parmi les partenaires l'Interreg, la Région wallonne, la Communauté française, la Province de Liège ou encore l'Université de Liège, parmi beaucoup d'autres.

Et alors que les plantes poussent toujours, si votre curiosité a déjà germé, le parc reste ouvert tout au long de la préparation du festival. Et les artistes et organisateurs présents sur place n'hésiteront pas à expliquer leur travail aux visiteurs qui se promèneront dans ce cadre bucolique.

Pour plus d'informations sur les activités proposées, sur le festival ou sur les artistes exposés, consultez le site http://www.festival5saisons.org/.

natura humana

Publications

À noter également que l'équipe du festival développe une politique éditoriale consacrée aux artistes de la Communauté française. Un magnifique premier ouvrage, Natura humana, publié aux éditions Mardaga / Façons de voir, est consacré aux œuvres de Bob Verschueren.

 

 

 


Philippe Lecrenier
Juillet 2010

 

crayon

Philippe Lecrenier, journaliste indépendant, collaborateur du site Reflexions  

 


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