D'un bus à l'autre... des histoires de Liège pas ennuyeuses du tout !

Du 7 août au 26 octobre, un bus pelliculé par l'artiste belge Christine Mawet circulera sur la ligne 4 (centre ville) et sur la ligne 31 (Liège-Chaudfontaine-Trooz) en prélude au Festival (permanent) des 5 saisons. Ce bus propose aux voyageurs un dispositif ludique, didactique et touristique tout à fait inédit : des visites guidées et des petites histoires téléchargeables sur supports MP3 et GPS, rédigées avec beaucoup d'humour par Vinciane Despret (ULg) avec l'aide de Paul Gailly.  Animations et concours sont aussi au programme.  

Festival des 5 saisons

 

 

Au centre ville, 5 histoires autour du nom de Liège

Le trajet de la ligne 4 forme une boucle au centre ville. Quel que soit son trajet, le voyageur pourra découvrir des histoires drôles et passionnantes qui tentent d'expliquer l'orgine du nom de la ville et de son origine, des histoires qui parlent des sources et cascades responsables de l'accent liégeois, des souris qui sauvèrent la ville, des invasions des barbares inventeurs du « bègue-lingue », des animaux qui rendent l'Histoire non ennuyeuse, et du grand jeu de piste créé par Dieu pour saint Monulphe...

Quelques extraits :

... Car à cette époque, les villes se multipliaient et beaucoup n'avaient pas de nom. Ce qui entraînait pas mal de confusions et de rendez-vous manqués. Vous imaginez : un chef Barbare envoyait un message à un de ses collègues « Allons demain envahir et brûler la ville sans nom, on s'amusera mieux à le faire ensemble ». Et ils se retrouvaient avec leurs troupes dans deux villes différentes.  Pour remédier efficacement au désordre, rien ne vaut un bon motif militaire. Les Barbares convinrent qu'il était urgent de se mettre d'accord et de donner à la ville un vrai nom. Cette ville semblait n'avoir été créée que pour permettre à tous ceux qui voulaient se défouler de le faire : elle allait donc s'appeler leud , ce qui en Barbare désigne la chose publique. Le problème, c'est qu'entre-temps les Romains s'étaient mis de la partie. Ils voulaient avoir leur mot à dire. Les Romains ont donc dit : « On est d'accord avec l'idée, mais il faudrait le dire en latin » ...

 ... Selon Kurth, le terme leudicus, terre publique, prenait son origine dans une décision politique : Liège était une possession d'état, donc une terre publique, elle avait été nommée en conséquence. On le voit, la proposition est simple, lapidaire, clairement énoncée. On ne s'ennuie pas longtemps avec une thèse pareille, mais on s'ennuie quand même. Dès lors, en dépit du prestige de son auteur et de la simplicité de son énonciation, cette thèse apparut aux yeux des historiens « de la petite école », du fait même de son caractère profondément et radicalement ennuyeux, sujette à caution. Autant dire, complètement fausse...

... Au loin, dans la direction de Liège – ce qui est une façon de parler puisque Liège n'existait pas encore – Monulphe vit donc une croix lumineuse tomber du ciel. Cette croix lumineuse a dû lui paraître bizarre, ce qui était le but de la manœuvre divine, quoique, allez savoir avec les saints, il leur arrive souvent des choses peu ordinaires (sinon ils ne deviendraient jamais saints) qui finissent par émousser leur sens commun. Monulphe reçut à ce moment sa nouvelle feuille de route. On ne sait pas précisément sous quelle forme elle lui parvint, mais elle lui enjoignait de changer de trajet, d'emprunter la ligne 4, il y a une correspondance à l'heure 27, et de se rendre là où la croix était tombée. Là, toujours d'après les indications, il devait croiser un fleuve appelé Liège, y fonder la ville qui devrait porter ce nom et gagner la postérité et pas mal de béatitude...

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Œuvres de  Christine Mawet, artiste liégeoise qui a décoré le bus pour le Festival des 5 saisons.
À paraître aux éditions Mardaga / Façons de voir : Christine Mawet, Les vanités du ginko.   

 

 

De Liège à Trooz : visite guidée

Tout au long du trajet de la ligne 31, d'étape en étape, d'arrêt en arrêt, de petites histoires sont racontées au voyageur : un peu d'histoire de la région, un peu de botanique ou de zoologie, quelques anecdotes, et toujours beaucoup d'humour.

Extraits :

... Nous allons passer devant l'île aux corsaires, à la confluence de la Vesdre et de l'Ourthe. L'île aux Corsaires : il y a toute une enfance dans ce programme. Attendez avant de conclure trop vite. La vieille montagne occupait autrefois ce site. La vieille montagne n'était pas une vraie montagne, juste un volcan technologique qui s'est formé à l'ère géologique industrielle. Un volcan qu'il fallait nourir avec ce qui vient du plus profond de la terre...

... Et maintenant, les plantes utilisent comme nous les transports en commun. Le train, par exemple. Si vous avez la chance d'en voir passer un, sur  la ligne dont nous longeons par moment le talus, vous pourrez dire que les clématites qui colonisent ses abords ont appris à l'utiliser. C'est avec lui qu'elles sont arrivées. Avec beaucoup de sagacité, elles profitent des déplacements d'air et se laissent emporter à la suite de la locomotive. Personne ne contrôle si elles ont bien un ticket. On a bien tort. On n'imagine pas le nombre de végétaux clandestins qui empruntent chaque jour les lignes de chemin de fer...

... Au Moyen-Âge, on leur en aurait fait un beau procès aux étourneaux. En bonne et due forme. Avec menace d'excommunication et tout le saint tremblement. Mais aujourd'hui, vous n'y pensez pas ! On n'est pas des barbares. On a trouvé une solution plus rationnelle. Il suffisait d'amputer les arbres. Plus de perchoirs, plus d'étourneaux. On n'est pas des barbares. Juste pas très responsables de ce que nous faisons naître et grandir...

 

festival des 5 saisons

Téléchargez les textes en MP3

Tous ces textes ont été enregistrés au studio de la Province de Liège par Jean-François Hustin. C'est le comédien François Sikivie qui les dit pour vous.  Dès le 7 août, il vous sera possible de les télécharger, gratuitement,  depuis le site web du Festival des 5 saisons.  

Une belle occasion de prendre le bus entre août et octobre !

 

 

Claudine Purnelle
Juillet 2010

 

 


 

Vinciane Despret est philosophe et psychologue. Ses principales recherches portent sur les pratiques et les savoirs de l'éthologie, de la psychologie humaine et animale et de l'ethnopsychologie.