En 1904, la Maison Porquin, qui s'élève à l'emplacement de l'actuel Théâtre de la Place, est abattue. Avec cette destruction, s'efface la trace la plus tangible à Liège du règne de l'évêque Ernest de Bavière : l'hôpital dont il avait, trois siècles auparavant, favorisé la naissance. Les soeurs Régulières de saint Augustinen en assureront lontemps la gestion et les soins aux malades1.
Au tournant du 17e siècle, la création de la « Maison de Miséricorde chrétienne » s'inscrit dans un climat socio-économique et religieux complexe. Le vigoureux démarrage industriel qui anime alors la cité mosane n'empêche pas la majeure partie de la population de connaître une grande pauvreté. Sur le plan religieux, Liège vit au rythme de la réforme catholique issue du concile de Trente. Le rigorisme dogmatique s'y combine avec l'esprit de compassion. En France, le temps sera bientôt celui de saint Vincent de Paul.
La « Maison de Miséricorde chrétienne » dépend d'une confrérie fondée en 1600 par de riches bourgeois de Liège, avec l'appui de l'évêque Ernest. Leur dénomination, « Confrérie de Miséricorde », est alors exceptionnelle dans les Pays-Bas mais fréquente en Italie, un pays que le prélat liégeois connaît bien pour y avoir étudié. Dans la Péninsule, de telles Compagnies, vouées aux œuvres charitables, existent parfois depuis le Moyen Âge.
Les Confrères s'assignent pour tâche de secourir les familles liégeoises honorables, mais dans le besoin. Ils visiteront les malades à domicile, ainsi que les prisonniers. Très vite, la nécessité d'un nouvel hôpital pour les malades s'impose à eux. Ce vœu se concrétise en 1603. Ernest de Bavière offre aux Confrères un palais construit en 1570 et dont il s'est rendu acquéreur. La Maison Porquin, du nom de son premier détenteur, abritera l' « Hôpital de Miséricorde », bientôt surnommé « Hôpital de Bavière ».
L'acte de fondation et les premiers règlements éclairent la finalité de l'institution et ses différents rouages.
Les conditions d'admission y sont strictement définies. L'hôpital est une maison de soins, non un hospice pour vieillards, ni un orphelinat, ni un lieu d'hébergement pour les indigents. On y accueille les citadins ou résidents de Liège, hommes et femmes, adultes, « vrayement pauvres », et catholiques. En pratique, d'après ces critères d'âge, de pauvreté et de résidence, nombre de patients se recruteront parmi les serviteurs de la bourgeoisie liégeoise. Les soins sont en outre réservés aux patients curables et non contagieux, pour autant que leur mal ne soit ni « infame », ni la conséquence d'une « débauche ou faulte propre ».
L'acte de 1603 organise la prise en charge médicale des patients et ses modalités. Il affecte deux médecins au service de l'hôpital. Ces praticiens jugent de l'opportunité d'hospitaliser un malade par un examen préalable à son domicile. Ils prescrivent les traitements et suivent l'évolution des patients par une visite quotidienne à leur chevet.
La gestion journalière de l'hôpital échoit à une congrégation féminine, des Régulières de saint Augustin, présentes à Bavière jusqu'au 20e siècle. La Maison de miséricorde est aussi un couvent avec sa hiérarchie et les diverses contraintes de la vie conventuelle.
Olivier Henrotte, Chapelle de l'hôpital de Bavière, 19e s. Collections artistiques de l'ULg
1 Les origines de l'hôpital de l'hôpital de Bavière ont été étudiées par Mlle Juliette Noël dans un mémoire de licence soutenu en 1948 et malheureusement inédit. Avec une extrême gentillesse, elle a bien voulu nous le communiquer et j'ai complété ses informations par des recherches personnelles entreprises dans le cadre de l'année « Ernest de Bavière-2012 », c'est à dire du quatrième centenaire de la mort de ce prince-évêque.