Derrière la lettre au Père Noël

Réclame fatale

À côté de la publicité, des effets de mode et d'émulation dans les cours de récréation ne sont pas à négliger, pour expliquer les ventes massives de tel ou tel jouet particulier.  Le responsable d'un magasin de jouets liégeois en est convaincu : «La publicité est bien sûr souvent à l'origine de ces effets de mode, mais pas toujours. Par exemple, il y a chez les enfants  un engouement certain pour tout ce qui touche à l'univers du catch pour le moment. Or, on ne peut pas vraiment dire qu'il y ait eu matraquage publicitaire ». Il arrive aussi que des campagnes publicitaires échouent.

Pour la plupart, les grandes chaînes de magasins de jouets fonctionnent selon le plan marketing qui leur a été communiqué par les grandes marques comme Mattel, Lego, ou Sony. Les articles estampillés Dora, High School Musical ou encore Cars doivent trôner en tête de gondole cette année.  Selon une étude récente du CRIOC, les plus grandes stars en cette fin d'année, sont les jouets sous licence en lien avec des films, des dessins animés,  et les consoles Wii.

Notre vendeur de jouets, lui, essaie de se différencier de ses concurrents en proposant des jouets qu'ils n'ont pas encore. Sachant que les enfants ont désormais accès, via le satellite, à des chaînes d'autres pays, et qu'ils y voient des publicités pour des jouets qui ne se vendent pas encore en Belgique, il tente de se les procurer avant tout le monde. Rien ne peut contenir l'ouragan pub. 

 

argent noel

Père Noël ne connaît pas la crise

Visiblement, dans le monde merveilleux de saint Nicolas et du Père Noël, la crise n'existe pas, ou alors elle est bien matée. L'industrie du jouet se porte même on ne peut mieux, puisque, toujours selon l'étude du CRIOC, le consommateur belge dépense en moyenne entre 230 et 330 euros par enfant et par an pour des jouets,  selon qu'il achète ou non des jeux vidéos. Sans surprise, les plus grandes dépenses ont lieu en fin d'année.

Le prix moyen des jouets a pourtant bel et bien grimpé, passant de 10,94€ en 2007, à 11,45€ en 2008, puis à 12,10€ pour le premier semestre 2009, une augmentation notamment imputable à la hausse de matières premières comme le prix du plastique, dérivé du pétrole. Playskool, Fisher Price, Kiddieland et Little People sont 10 à 15% plus chers que l'année passée, tandis que les produits européens tels Lego et Playmobil, qui ne sont pas fabriqués en Chine, connaissent une augmentation moins importante, autour des 5 %. Mais les parents, loin de répercuter la crise sur le la Saint-Nicolas de l'enfant chéri, sont prêts à payer plus cher pour les jouets de marques connues.

Cette année, pour la première fois, la vente de jeux vidéo a diminué par rapport à la vente de jouets traditionnels. Ceux-là représentent aujourd'hui moins d'un tiers (30,4%) des achats par les ménages. Suivent les jouets pour bébés et préscolaires (13,8%), les jouets graphiques, puzzles et jeux de société (8,9%), poupées (8,6%) et les jeux d'extérieur et sportifs qui connaissent de plus en plus de succès (7,4%).

 

Les ateliers du Père Noël

Une question demeure problématique: celle de la fabrication des jouets. Aussi sûrement que le père Fouettard est un remède allégorique à l'autorité parentale défaillante, les petits lutins du père Noël sont une charmante métaphore pour masquer la triste réalité des travailleurs chinois de moins de 12 ans qui fabriquent, dans des conditions désastreuses dénoncées à plusieurs reprises par China Labour Watch, 95% des jouets avec lesquels nos têtes blondes s'amusent, réfléchissent, évoluent sainement, apprennent les valeurs de la vie telles que la coopération et le respect de l'autre...

Le « made in China » n'a fait réagir dans les chaumières qu'à l'heure où les enjeux relevaient du non respect des normes de sécurité dû à la sous-traitance en chaîne dans le sud de la Chine. On se souvient notamment du scandale de Mattel, et du rappel de plus de 20 millions de pièces en 2007. Quand la présence de plomb dans la guitare de Barbie Rockstar présente des dangers pour la petite Laura, l'origine du jouet alarme, tandis qu'elle interpelle à peine quand, quotidiennement, des milliers d'enfants chinois assemblent cette Barbie et tous ses clones, environnés de produits chimiques toxiques dans des pièces dépourvues d'aération. Les magasins de jouets estiment qu'ils n'ont pas le choix, en fin de compte, c'est le client qui décide, c'est lui qui veut des produits moins chers et ne s'émeut pas des conditions de fabrication. Les mêmes objets fabriqués en Europe reviendraient  trois ou quatre fois plus cher...

Alors, garants d'éthique, d'équité, et de respectabilité, les vieux sages barbus vêtus de rouge ? Pas forcément...

 

Bérénice Vignol
Novembre 2009

 

icone crayon

Bérénice Vignol est étudiante en  2e année du Master en Information et Communication, finalité spécialisée en journalisme.

Page : précédente 1 2