Il faut sauver Saint Nicolas

Les parents sont quelquefois tentés de mettre fin à la croyance de leur enfant, par refus du mensonge et de la tromperie, par peur des moqueries de la part des camarades, ou parce qu'ils pensent aider ainsi leur enfant à grandir. Le docteur Jean-Marie Gauthier, pédopsychiatre, pense au contraire qu'il faut sauver le mythe ancien, dans l'intérêt de l'enfant...     

 

... parce que la croyance est naturelle

enfant noël

Jusqu'à l'âge de 6 ans, l'enfant est dans un univers naturellement merveilleux, dans un espace auquel il n'imagine pas de limites, une sorte de bulle qui lui apporte la sécurité dont il a besoin. Il est donc naturellement enclin aux croyances. Ce sont les années magiques. Ensuite, lorsqu'il se rend compte qu'il peut mentir, cacher des choses à ses parents, il commence à se poser des questions, à émettre des doutes. C'est le début de l'âge de raison. À ce moment-là, il cesse de croire au Père Noël. C'est naturellement qu'il n'a plus envie d'y croire, il se désillusionne en grandissant. 

Raconter l'histoire de saint Nicolas n'est donc nullement une tromperie, c'est participer à cette magie, dont l'enfant a besoin. Ce n'est jamais un problème pour lui. On ne croit jamais trop ou trop longtemps au Père Noël ou à saint Nicolas.  Ce qui peut être délicat, en revanche, c'est d'être forcé trop tôt à y renoncer. Il est bien préférable de laisser les choses se faire toutes seules, plutôt que de vouloir que l'enfant soit plus avancé intellectuellement qu'il ne peut l'être. Le contraindre à vivre la Saint-Nicolas dans le cadre de référence de l'adulte, c'est un peu lui voler son enfance.

Pourquoi pousser les enfants à grandir plus vite, à être tout de suite dans la performance ? Performance pour quoi ? qui conduit à quoi ?  Quel est vraiment l'objectif de l'adulte quand il pense vouloir aider son enfant ?  Il est important de se poser toutes ces questions.

... parce que la magie est indispensable

Le mythe de saint Nicolas (ou du père Noël) gêne certains parents par son caractère irrationnel. Or, si on prive l'enfant du caractère magique de la fête, elle perd sa signification symbolique et inconsciente, dont l'enfant a besoin pour soutenir sa confiance dans l'avenir. Si on le pousse trop tôt à la rationalité, l'enfant n'est pas armé pour affronter les difficultés de la vie.

Et que font ces parents-là des dessins animés ou des ours en peluche en costume de marins ?

Il faut bien l'avouer, les adultes ne sont pas rationnels non plus ! Le docteur Gauthier le souligne avec force : « Arrêtons de croire que nous sommes des êtres rationnels ! Qui pourrait trouver de la raison dans la crise financière que nous avons vécue ? Nous sommes dans un monde de marchandises, parfaitement irrationnel. La société est organisée autour de l'argent. Or l'argent porte en lui sa propre destruction, puisqu'on ne peut rien en faire, sinon le dépenser, c'est-à-dire le faire disparaître. C'est complètement irrationnel. Nous avons construit des fictions que nous présentons comme rationnelles, parce qu'elles fonctionnent sur le mode rationnel, mais la fiction sous-jacente, c'est bien une fiction. »


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