Saint Nicolas et Père Noël expliqués aux grands

Comment gérer les nombreux cadeaux que l'enfant reçoit des autres membres de la famille ?

noel

Malheureusement, nous sommes aujourd'hui face à une désacralisation de Père Noël et de Saint Nicolas à cause de la scandaleuse récupération commerciale dont ils sont victimes. L'image du « bon père » n'est pas celle d'un père qui offrirait tout et tout le temps. Les cadeaux de la Saint-Nicolas ou de Noël doivent pouvoir garder leur côté exceptionnel et unique, c'est ce qui leur donne leur valeur structurante.

Je me rappelle le cas d'un petit garçon que la mère noyait sous les cadeaux, un jour qu'elle lui avait offert un nouveau cadeau pour le récompenser d'être venu à sa séance, il lui a répondu « Mais maman, arrête avec tes cadeaux, ce n'est plus la Saint-Nicolas ! » D'autre part, on remarque souvent que les enfants victimes des excès de générosité de la part des membres de leur famille finissent par « oublier » de reprendre leurs cadeaux, un moyen efficace pour se protéger contre l'écœurement procuré par la démesure de la fête. 

Les parents se demandent souvent s'il faut privilégier des jouets éducatifs ou des jeux qui amusent. Quel est votre avis à ce sujet ?

Je suis étonné de ce type d'opposition. J'ai l'impression que les gens qui font ce type de différence ne savent pas ce qu'est le jeu et la notion de plaisir qu'il provoque. On doit avant tout penser à des jeux avec lesquels l'enfant va pouvoir jouer. Et il y jouera parce que le jeu va satisfaire son plaisir de découverte, de curiosité mais aussi parce que ce jeu lui permettra de reproduire des réalités tout en réparant ce qui a été blessant pour lui. Prenons l'exemple d'une petite fille qui a eu une mauvaise journée d'école, qui s'est fait gronder par son institutrice. Que fait-elle ? Elle rentre chez elle, aligne ses poupées et leur passe le savon du siècle. Elle reproduit sa réalité tout en réparant ce qui a été blessant. C'est un peu schématique, mais le mécanisme est celui-là.

L'enfant a une perception d'un monde où règne la toute-puissance et reste persuadé qu'il peut agir sur le monde. Un résidu de ce mécanisme se trouve dans l'expression fausse utilisée par tant d'adultes : "Quand on veut, on peut." C'est une des raisons pour lesquelles les jeux vidéo ont tant de succès : les enfants se vivent comme s'ils pouvaient voler, faire des bonds de 3 mètres et assommer des géants. Ainsi, dans les jeux vidéos, ils entrent dans la peau de leurs personnages favoris et mettent en actes leur fantasmatique. Ce à quoi, nous, parents, nous devons veiller, c'est de bien leur préciser que ce n'est qu'un jeu. Nous devons nous garder de toute séduction du même type vis-à-vis de l'enfant. Ce qui fera la limite de l'enfant, c'est le modèle parental. Si l'enfant vit dans un monde perçu comme régi par des lois de type magiques, de toute puissance, nous devons, nous adultes, nous garder de l'y enfermer et devons, au contraire lui signifier que le chemin est la réalité et pas une fuite illusoire dans le fantasme.

En clair, ce n'est pas juste la volonté d'un adulte qui lui apporte ce qu'il désire, il y a à passer par la réalité pour toute chose (des études pour un diplôme, une grossesse pour un enfant, du temps pour mûrir, etc.). C'est cela qui est structurant pour l'enfant : lui faire sentir que l'illusion de toute puissance mène à l'impuissance... En revanche, c'est le détour par la réalité qui permettra à l'adulte d'atteindre «la puissance», les plaisirs réels plutôt que des pseudo-satisfactions illusoires (la possibilité d'exercer un métier, de faire des enfants, de fonder une famille). Mais il faut lui laisser découvrir cela à son rythme et ne jamais le couper de ces racines magiques : c'est le terreau de la fiction, de l'imagination, de la créativité et quelquefois du génie, qui, comme chacun sait est d'abord et avant tout un étonnement.

Les parents qui posent la question en termes « éducatif ou ludique », montrent que, pour eux, les deux sont antagonistes et que l'apprentissage de choses sérieuses ne peut se faire dans le plaisir et la rêverie. C'est évidemment faux, c'est même tout le contraire. Le succès d'émissions du type «C'est pas sorcier» est bien dû à la rencontre entre le plaisir de découvrir en s'amusant, au maintien intact de la curiosité infantile et humaine qui sont les deux vrais moteurs des apprentissages.

 

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Donc, en résumé : Saint-Nicolas, comme le Père Noël, sont là pour apaiser une angoisse très profonde pour l'enfant et il faut leur laisser ce visage apaisant de celui qui aime inconditionnellement, ne pas l'instrumentaliser de manière perverse en maniant la punition.  Ce rôle est dévolu au mauvais, le Père Fouettard par exemple, qui, on le sait, ne sévit jamais et est complètement neutralisé par le bon Saint Nicolas ou le bon Père Noël.

Après tout, ils ne passent pas si souvent qu'on doive leur gâcher leur fête !

 

Vincianne d'Anna
Novembre 2009

 

 

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Vincianne d'Anna est journaliste indépendante

 

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