Venus du Nord
Arni Thorarinsson, L’Ange du matin
Aevar Örn Jósepsson, Les anges noirs
Dans le domaine littéraire, l’Islande est un cas singulier. Cette île de quelque trois cent mille âmes est peut-être le pays qui compte le plus d’écrivains par habitant. Et notamment d’auteurs de romans policiers, alors que la société islandaise est peu criminogène, comme aime à le dire leur chef de fil traduit en plus de vingt langues, Arnaldur Indridason. Derrière le créateur du commissaire Erlendur se profilent Jon Hallur Stefansson (à ne pas confondre avec son presque homonyme publié chez Gallimard, Jon Kalman Stefansson), auteur de Brouillages et de L’Incendiaire parus chez Gaïa et Babel Noir, ainsi qu’Arni Thorarinsson, auteur de Dresseur d'insectes ou du Temps de la sorcière, ou Aevar Örn Josepsson dont de nouveaux livres viennent d’être traduits.
Le héros de L’Ange du matin est un journaliste enquêtant sur la disparition d’une petite fille au moment où une postière sourde est retrouvée morte. En plus de tenter de démêler une affaire particulièrement complexe, il doit «affronter» un commissaire qui le déteste. Cette intrigue très bien menée éclaire d’une lumière sombre un pays mal en point au lendemain de la crise financière qui a entraîné la ruine de ses responsables, les nouveaux Vikings. Comme souvent dans le polar nordique, un intérêt particulier est porté sur la psychologie et l’humanité des personnages.
Par le biais d’une enquête sur l’évaporation d’une informaticienne hors pair menée par trois policiers, c’est aussi la vie d’un commissariat de Reykjavik que met en scène Aevar Örn Josepsson dans Anges noirs. Un microcosme humain, trop humain, même si le contexte dans lequel il évolue l’entraîne le plus souvent dans les marges de la société. On croise ici une grande variété de personnages. Notamment un chef d’entreprise dont la voiture a été vandalisée et qui entretenait avec la disparue, divorcée et mère de deux enfants, des rapports mi-professionnels, mi-intimes, qui avaient tous deux tourné au vinaigre.
Arni Thorarinsson, L’Ange du matin, trad. Éric Boury, Métailié, 310 p. - Aevar Örn Josepsson, Les anges noirs, trad. Séverine Daucourt-Fridriksson, Gallimard/Série Noire, 354 p)
Jo Nesbo, Fantôme
De la littérature policière norvégienne, qui ne jouit pas en français de la même popularité que la suédoise (Millénium, Camilla Läckberg, Henning Mankell..) ou l’islandaise, Jo Nesbo (né en 1960 à Oslo) est le plus célèbre et brillant représentant. Fantôme est la neuvième enquête de Harry Hole depuis L’Homme chauve-souris traduit en français en 2002. Après un détour par Hong Kong où cet ex-inspecteur était allé soigner sa déprime consécutive à sa rupture amoureuse, puis par le Congo sur la trace d’un tueur en séries, voici le pas toujours fringant Harry Hole de retour à Oslo. Il retrouve une ville profondément changée, livrée aux trafiquants de drogue. La drogue, et notamment une nouvelle venue, la fioline, est le fil rouge de cette intrigue qui implique douloureusement son héros puisqu’Oleg, le fils de la femme qu’il aime, se voit impliqué dans le meurtre d’un dealer. Fantôme offre une plongée vertigineuse au cœur d’une cité que l’auteur montre sous ses atours les mois seyants. Signalons que ce roman existe sur un CD audio lu par Frédéric Dimnet: 15h30 d’écoute! (Gallimard/Ecoutez Lire).
(trad. Paul Dott, Gallimard/Série Noire, 547 p.)