The Hobbit - le film

HobbitAprès bien des aventures qu’aurait pu vivre son héros homonyme, The Hobbit est enfin arrivé sur nos écrans, près de dix ans après la sortie de la trilogie du Seigneur des Anneaux. Mais cette adaptation était-elle nécessaire pour perpétuer le mythe Tolkien sur grand écran, ou n’était-ce qu’un prétexte à des rentrées financières supplémentaires ? Reprenons : « In a hole in a ground, there lived a Hobbit… »

Nous sommes à la fin des années 90. Peter Jackson, petit chouchou des studios avec ses films qui coûtent peu et rapportent beaucoup propose d’adapter The Hobbit suivi du Seigneur des Anneaux. Refus catégorique : The Hobbit n’est pas assez vendeur, mais va pour le cultissime Lord of the Rings. Épuisé mais pas désespéré à la fin du tournage de la trilogie (274 jours quand même !), Peter Jackson revient à la charge avec son Hobbit, mais en tant que producteur cette fois. On invite d’abord Sam Raimi puis Guillermo del Toro pour réaliser le film. La suite est connue : del Toro propose une vision très sombre, peu hollywoodienne, ce qui ne plaît pas ; surgit alors la grève des scénaristes en 2008 ; la MGM s’enfonce davantage dans ses ennuis financiers  un peu plus tard ; en 2010, del Toro jette l’éponge. Et Peter Jackson revient derrière la caméra pour retrouver l’univers de Tolkien.

Si je vous explique tout ça, ce n’est pas tant pour justifier la longueur de création du Hobbit que pour comprendre comment le mythe « Tolkien au cinéma » s’est forgé. Bénéficiant de rediffusions multiples à la télévision, de l’explosion d’une génération faussement geek sur internet et de l’exploitation du filon heroic-fantasy par les producteurs de cinéma et concepteurs de jeux vidéo, la trilogie du Seigneur des Anneaux est devenue le pôle d’un empire culturel majeur, les Gandalf, Gimli et autres Frodon étant rentrés dans l’imaginaire populaire quand on parle de magiciens, nains et autres antihéros. Surtout, une communauté de fans s’est constituée, avide de l’univers de Tolkien sous toutes ses formes – ce qui implique un marché financier incroyable entre les produits dérivés et les événements de tous types. Ce qui explique, en partie, pourquoi The Hobbit n’est qu’une pâle copie du Seigneur des Anneaux.

L’art du copié-collé… en moins bien

Première erreur de Peter Jackson : vouloir faire de The Hobbit une trilogie. Là où un Seigneur des Anneaux nécessitait un tel traitement, un Hobbit soulève davantage de questions, compte tenu du nombre réduit de pages mais aussi d’une première adaptation en 1977, en animation, qui durait 1h30 et tenait parfaitement la route. Soit, admettons. Le film s’ouvre donc sur un récit antique, du temps où les Nains dominaient la Montagne et vivaient en paix avec les hommes, jusqu’à l’attaque du dragon Smaug. Raconté en voix-off par Galadriel, Elfe intemporelle mais surtout absente du livre original… Bref, la voici narrant l’histoire de Smaug et des Nains sur des images un peu sépia, ponctuées de quelques ralentis, avec la musique tragico-lyrique de Howard Shore, avant de passer sur la Comté où vit Bilbo. Un air de déjà vu ? Oui, The Hobbit commence de la même façon que La Communauté de l’Anneau, à quelques détails près. Ce n’aurait qu’une faible incidence si The Hobbit n’était pas célèbre pour son introduction « In a hole in a ground there lived a Hobbit ». Lorsque Tolkien introduit son livre de cette façon, il place d’emblée Bilbo comme le héros de son histoire (ce qui, dans le roman, sera toujours le cas). À l’inverse, conscient du manque de charisme des hobbits au cinéma, Peter Jackson décide de placer non plus Bilbo mais Thorin, roi des Nains, comme figure majeure du film. Ainsi le scénario sera-t-il construit autour de ce roi déchu, ténébreux, maudit – un Aragorn en modèle réduit, si on peut dire. En privilégiant la recette de ses films à la trame originale, Peter Jackson en vient à dénaturer le sens du livre de Tolkien, mais ce n’est pas là le moindre de ses défauts.

LesNains Thorin, véritable héros du film, passablement rajeuni par rapportau livre
Les Nains   -   Thorin, véritable héros du film, passablement rajeuni par rapport au livre


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