La plume et le plateau. Double dimension de l’écriture de Joël Pommerat

pommeratVéritable écrivain de plateau, Pommerat conçoit son travail dans un incessant aller-retour entre l’écriture textuelle et la scène, l’un et l’autre se nourrissant mutuellement et faisant partie d’un même processus d’écriture.

 

Cie Louis Brouillard

Né en 1963, Joël Pommerat est auteur dramatique et metteur en scène. En marge de ses activités théâtrales, l’artiste se plonge également durant quelques années dans une exploration de la pratique cinématographique et réalise une douzaine de courts métrages entre 1997 et 2000. Il ne poursuit pourtant pas ses recherches artistiques dans cette voie et cesse d’exploiter le support cinématographique pour produire des œuvres.

MA CHAMBRE FROIDE - Elisabeth Carrechio 200Autodidacte, son apprentissage du théâtre s’effectue sur le tas. En 1990, au moment où il crée sa première mise en scène (Le chemin de Dakar. Monologue non théâtral), il fonde la Compagnie Louis Brouillard. La création du spectacle Au monde en 2004, qui rencontre un large succès, marque un tournant dans l’évolution de la compagnie qui gagne en notoriété et devient plus prolifique. À partir de cet instant, la compagnie Louis Brouillard jouira d’une reconnaissance toujours plus importante. En 2005, le metteur en scène devient artiste associé à la Scène nationale de Chambéry pour trois ans. En 2006 puis en 2008, la compagnie est invitée au festival d’Avignon. De 2007 à 2010, il est en résidence aux Bouffes du Nord à Paris, aux côtés de Peter Brook. Depuis 2010, il est également artiste associé à l’Odéon-Théâtre de l’Europe à Paris. En 2010, la Compagnie Louis Brouillard reçoit le Molière de la meilleure compagnie pour le spectacle Cercles/Fictions et se voit remettre le même prix en 2011 avec Ma chambre froide, création qui rapporte également à Joël Pommerat le Molière de l’auteur francophone vivant.

 

ci-dessus : Joël Pommerat, en répétition de Pinocchio
ci-contre : Ma chambre froide
photos : Élisabeth Carrechio

 

À l’origine, le projet d’être comédien

C’est au collège que Joël Pommerat découvre le théâtre grâce à une professeure de français. Il fait ensuite ses premiers pas en tant que comédien dans des troupes amateurs. Interrompant ses études avant l’obtention de son diplôme du baccalauréat, il est engagé par la suite dans une compagnie, le Théâtre de la Mascara. Il est alors âgé de dix-neuf ans. Après cette expérience, afin de bénéficier d’une formation d’art dramatique, il se présente à l’École du Théâtre National de Strasbourg et au Conservatoire de Paris, mais sans succès. À la recherche de rencontres enrichissantes, il s’investit alors dans divers projets collectifs. À vingt-trois ans, Pommerat fait définitivement une croix sur la carrière de comédien. Mais s’il renonce au métier d’acteur, il garde cependant en mémoire son expérience passée et les sensations physiques ressenties sur les planches dans son travail de recherche. Cette trajectoire particulière du metteur en scène, qui passe par une expérience concrète du plateau est clairement constitutive et déterminante dans son approche artistique : « J’ai décidé de chercher le théâtre à partir de mes sensations. Et je me suis senti aussitôt libéré, libre, maître à bord. Libre et responsable de ce que j’allais créer1. » L’entreprise de création de spectacles le pousse dans l’aventure de l’écriture. Pommerat étant dépourvu d’une véritable culture scolaire, cette écriture est avant tout basée sur l’intuition, l’envie. L’écriture lui permet de « penser », de construire et proposer une réflexion sur l’homme et l’identité, dans une perspective presque philosophique et ontologique.

Dans un refus de tomber dans les schémas courants de l’état de dépendance de l’auteur de théâtre vis-à-vis de la figure du metteur en scène, Joël  Pommerat décide de monter ses propres textes. C’est alors qu’il s’aperçoit combien écriture et mise en scène sont liées, nouées.

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Cendrillon © Cici Olsson



1 Claudine Galea (propos recueillis par), « Dialogue entre Claudine Galea et Joël Pommerat, novembre-décembre 2005 », in Ubu Scènes d’Europe, n°37-38, 2006, p. 54.

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