L'histoire méconnue de l'industrie belge du zinc

L'essor de l'industrie belge du zinc

En 1825, le brevet Dony dont Mosselman était devenu titulaire tombe dans le domaine public. Une série de sociétés anonymes se constituent et obtiennent l’octroi de concessions pour l'exploitation de gîtes plombo-zincifères. Au milieu du siècle, une vingtaine d'usines à zinc sont implantées et forment le pôle liégeois du zinc.

Le secteur est largement dominé par la Vieille-Montagne qui possède la plus grande concession en étendue et en richesse. Fondée en 1837 avec le soutien de la Banque de Belgique par les héritiers Mosselman et dotée d’un siège liégeois et d’un autre parisien, elle est considérée comme la première multinationale d’Europe. Il s’agit d’une entreprise intégrée dominant l’ensemble du processus de production. En matière de production de zinc brut et laminé, elle se profile dès l’origine comme le leader européen, donc mondial. La production y est alors réalisée dans les sites belges de Saint- Léonard, Angleur, Moresnet et Tilff mais aussi, dès l’origine, dans des sites français et anglais. Au milieu du siècle, elle poursuivra son expansion, sous la conduite de Louis-Alexandre Saint-Paul de Sinçay (1815-1890) – ingénieur d'origine parisienne, diplômé de l'ULg –, en absorbant des sociétés belges puis étrangères. Au cœur de l'entreprise, de Sinçay met en œuvre une politique paternaliste jugée précoce et exemplaire. Son fils Gaston lui succédera jusque 1938.

Maugendre VM 1855bLe gîte de la Vieille Montagne à Moresnet © Collections du CHST - album Maugendre, 1855

En Belgique, ce géant industriel rencontre toutefois une certaine concurrence. La s.a. de la Nouvelle-Montagne (1829) possède des concessions à Stembert (Verviers), Prayon et Engis et se spécialisera dans la chimie du zinc. La s.a. de Corphalie près de Huy (1831), second producteur belge, deviendra en 1862 la s.a. métallurgique Austro-Belge. La s.a. de Laminne, du nom de son fondateur installe deux usines à Ampsin et Antheit au début des années 1840. Enfin, la s.a. Compagnie des Mines et Fonderies du Bleyberg (1846) exploite un important gisement dans la vallée de la Gueule. L'implantation de l'ensemble des fonderies de zinc, à partir des années 1830, s'avérera conflictuel. C'est que le four liégeois, très gourmand en charbon, est particulièrement insalubre, répandant à l'intérieur et à l'extérieur des halles d'épaisses vapeurs et fumées chargées de poussières. Contenant, entre autres, du soufre et du plomb, elles anéantissent la flore donnant à l'environnement des usines un aspect particulièrement lugubre. Face à l'importance de ce problème de pollution, l'industrie se contente d'abord de distribuer des compensations aux voisins ou d'acquérir leurs terrains. Dans un second temps, elle est forcée par les autorités à investir dans le développement de procédés susceptibles de diminuer les nuisances. Si l'investissement dans la technologie ne fut pas négligeable, les industriels du zinc refuseront longtemps, au nom de la rentabilité, d'adapter le four liégeois à ce défi.

Ce dernier connaît pourtant une série d'améliorations qui témoignent du dynamisme technologique de l'industrie. Le besoin d’un rendement accru, la nécessité de l’économie d’énergie, la comparaison avec le procédé silésien ou avec les techniques utilisées en sidérurgie stimulent tour à tour les recherches menées au cœur des usines. Les brevets, que les sociétés déposent abondamment, témoignent de cette volonté d’améliorer le procédé Dony. La production se diversifie également une première fois. À la fin des années 1840, la Vieille-Montagne, qui s’adjoint l’expertise et les brevets de l’inventeur français Leclaire, parvient à produire industriellement un blanc de zinc de grande qualité voué essentiellement au secteur de la peinture. C’est le début de l’application à grande échelle du procédé de fabrication de blanc de zinc par combustion, étape importante de l’histoire de la chimie naissante du zinc. L’usine de Valentin-Cocq (Hollogne-aux-Pierres) en devient la capitale mondiale. Sur le marché international, la lutte contre la concurrence allemande marque la seconde moitié du 19e s. Dans ce contexte, la croissance de la production belge est remarquable jusqu’à la fin du siècle.

Pôle liégeois zinc vers 1860b
Carte du pôle liégeois du zinc vers 1860 réalisé par Arnaud Péters

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